Aneel Bhusri (Workday) : «Nous avons choisi le cloud dès le départ»

Aneel Bhusri, dirigeant-cofondateur de Workday

L’éditeur pionnier de solutions SaaS (ERP, RH, Paie…) investit en Europe et accélère précisément en France. Entretien avec le dirigeant-cofondateur de Workday, Aneel Bhusri, qui espère bien continuer à piller des clients à SAP et Oracle.

Encore peu connu en France, Workday fait pourtant partie des pionniers du Cloud, avec une offre aujourd’hui très complète : gestion du capital humain, ERP, gestion de la paie, fonctions analytiques, mobilité intégrée, etc.

Dès 2006, David Duffield, fondateur et ex-CEO de PeopleSoft, et Aneel Bhusri, ex-directeur Stratégie chez PeopleSoft, positionnent Workday clairement face à Oracle et SAP avec leur offre de progiciel intégré et modulaire sur le Cloud. Et dès le départ, ils pensent à l’intégration. Des gens du logiciel, quoi, comme on disait chez…

En 2012, Workday fait sensation en entrant en bourse avec un grand succès, puisque la société est alors valorisée 9,5 milliards de dollars. Excusez du peu ! Aujourd’hui, elle reste valorisée au cours actuel à 10,6 milliards de dollars.

Silicon.fr a profité du passage à Paris d’Aneel Bhusri (notre photo), PDG et cofondateur de Workday, pour dresser le portrait de cette société dynamique et découvrir ses ambitions en France et en Europe.

Silicon.fr – Pouvez-vous nous rappeler l’évolution de Workday ?

Aneel Bhusri – David et moi étions chez PeopleSoft. Nous avons créé Workday en 2005, quelques mois après le rachat de PeopleSoft par Oracle [NDLR : OPA hostile fin 2004 pour plus de 10 milliards de dollars]. Puis, nous avons lancé un service Cloud en mode SaaS pour les Ressources humaines.

En 2007, nous avons complété notre offre avec un SaaS dédié à la paie, suivi en 2008 de la finance/comptabilité (ERP). Une offre SaaS modulaire avec Finances, RH et paie intégrées sur une plateforme gérée par des professionnels et facturée à l’usage.

Workday compte aujourd’hui 2000 employés, et est devenu public en octobre 2012. Nous enregistrons une croissance très forte, de près de 80 % sur le SaaS.

Techniquement, pourquoi le Cloud ? Et quels types de technologies ?

En 2005, les premiers vrais SaaS arrivaient à peine, en même temps ou dans le sillon de Salesforce. Pourtant, nous avons choisi le cloud dès le départ de la société.

Workday repose sur une infrastructure « pure multitenant » orientée objet, qui a été totalement développée à partir de rien. De plus, elle utilise notre technologie In-Memory, qui n’est pas une découverte aussi récente que semblent l’affirmer certains…

Et grâce au vrai multitenant, les mises à jour sont automatisées et les évolutions législatives et réglementaires intégrées partout en un temps record !

WorkDay, plate-forme service cloud
L’ensemble des services de la plate-forme cloud de Workday

Pas facile de se positionner sur les très grandes entreprises avec du Cloud…

Dès l’origine, Workday a ciblé les grandes entreprises avec l’offre de gestion des ressources humaines. Aujourd’hui, nous comptons plus de 450 clients à travers le monde, mais surtout aux États-Unis ou via des filiales de sociétés américaines. Ainsi, HP ou encore Philips utilisent Workday pour la gestion de leur capital humain.

Nos clients utilisent surtout le module HR (ressources humaines – ou gestion du capital humain) ou la combinaison HR + Payroll (Paie). Toutefois, plusieurs entreprises comme Netflix sont clientes pour toute la plate-forme Workday.

En ce moment, nous finalisons la signature de notre première grande entreprise en France.

Vous optez pour un modèle indirect, avec une activité de service Workday ?

Nos activités de services consistent essentiellement à apporter support et accompagnement à nos intégrateurs, comme Capgemini ou Accenture. Nous ne nous positionnons pas comme intégrateur en direct.

Qu’en est-il de votre présence en France et en Europe ?

La filiale française compte 20 personnes en France, pour accompagner nos clients internationaux existants, et français : des commerciaux et des équipes de marketing, de consultants et de gestion des produits. Pour faire face à notre forte croissance, nous embauchons essentiellement des développeurs. Dès la rentrée scolaire 2013, l’effectif de Workday France atteindra 30 personnes.

Aujourd’hui, sur un chiffre d’affaires de 274 millions de dollars, l’Europe représente moins de 10 % de notre activité. Dès 2013, nous souhaitons passer au minimum à 13 %.

Nous poursuivons notre expansion en Europe. Après le Royaume-Uni, aujourd’hui nous concentrons nos efforts sur la France, et bientôt sur les Pays-Bas. Un peu plus tard, nous nous déploierons aussi au Japon et en Espagne.

Cela signifie-t-il que vous avez localisé et adapté vos services Cloud ?

Notre produit est prêt pour l’Europe et s’adapte aisément aux spécificités et complexités réglementaires des divers pays. En effet, anciens de Peoplesoft, nous avons conçu la solution avec cette idée en tête dès le départ. Nous enregistrons une très forte demande pour nos solutions de paie, en mode Cloud évidemment.

Si la gestion des ressources humaines est déjà opérationnelle, nous travaillons actuellement à la localisation réglementaire et législative de la paie pour qu’elle soit disponible en 2016 en France, et dès 2015 au Royaume-Uni. Le pays suivant sera l’Allemagne. Sur les autres pays, nous passerons certainement par des partenaires spécialisés.

Quant à la gestion financière, elle sera disponible pour la France dès l’an prochain. Et sur cette offre, nous comptons déjà une cinquantaine de clients dans le monde.

Comment envisagez-vous les problématiques d’intégration ? Pas simple avec une offre Cloud…

Pour commencer, tous nos services Cloud sont naturellement intégrés entre eux. Donc, toute solution s’intégrant avec l’un d’entre eux, bénéficie de fait d’une intégration avec les autres.

La plate-forme Workday offre de nombreux outils Java éprouvés pour réaliser toute sorte d’intégration.

En février 2008, nous avons acquis la société Cape Clear (spin-off de Iona technologies, NDLR), qui nous a amené un bus applicatif (ESB ou Entreprise Service Bus, NDLR) avec de nombreux connecteurs.

Un grand nombre de nos clients réalise effectivement (ou fait réaliser) des intégrations avec des applicatifs existants. D’ailleurs, plus de 40 % d’entre eux intègrent nos solutions SaaS avec leur ERP financier SAP. De même, ils nous rapportent que la connexion de Workday avec SAP RH est très simple, par exemple.

Quant au module Workday Payroll, il s’interface simplement avec toutes les solutions existantes de gestion de la paie.

Comment analysez-vous le rachat de SuccessFactors par SAP, de Taleo par Oracle ou de Kenexa par IBM ?

Cela illustre leur besoin d’acheter des éditeurs de solutions Cloud, pour combler quelque chose…

De toute façon, cela montre que nous avions raison et que ces applications, ces technologies et ces modèles initient bien un grand mouvement de fond.

Néanmoins, tous ces acteurs sauront-ils vraiment composer avec ces offres qui incarnent une approche réellement différente de leurs modèles, sur presque tous les plans ?


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