Bibliothèque numérique : le rôle de la France se précise

Le débat sur la création de la bibliothèque numérique européenne sort enfin un peu de son enlisement. Profitant de la réunion du comité de pilotage, mardi 10 janvier, la délégation française a levé une partie du voile qui planait sur ses ambitions

Les Français veulent une bibliothèque numérique et ils le font entendre. Il faut dire qu’après plusieurs mois de discussions rien n’est fait. Du coup, cocorico, lors du comité de pilotage, nos chers compatriotes ont affiché leur volonté d’ouvrir un site d’ici à la fin du premier semestre 2006.

Dans ses colonnes, le quotidien Les Echos nous apprend que, concernant la partie française, la ligne à suivre est claire. La BNE devra être « une bibliothèque des savoirs » au service du grand public. Pour les Français le risque de voir cet ambitieux projet tomber dans l’escarcelle des seuls scientifiques est une vraie menace qui tuerait le futur-né dans son ?uf. Le volet technique de la BNE a été lui aussi évoqué. Car si le débat a été animé, voire violent, à propos de la diversité culturelle et de la volonté de faire de cet outil un bien universel au service du plus grand nombre, l’aspect technique a été rarement évoqué. La BNE manque cependant d’un solide « Business Model ». D’ailleurs, plusieurs entreprises spécialisées dans la numérisation à grande échelle lorgnent déjà sur ce marché qui promet d’être très rentable dans les années à venir. (Lire nos articles) L’avantage de la France est d’avoir travaillé sur Gallica depuis plusieurs années. Rappelons que derrière ce mystérieux nom se cache le site créé spécialement par et pour la Bibliothèque Nationale de France (BNF) à l’initiative de Jean-Noël Jeanneney, un pionnier en la matière et soit-dit passant un fervent défenseur de la diversité culturelle et de l’accès au savoir pour le plus grand nombre. Gallica devrait donc « servir de socle à la brique française du projet européen », comme l’indique Les Echos. Reste que pour y parvenir, Gallica va devoir subir une refonte et ainsi remettre aux normes (OCR) les documents déjà numérisés. D’après les déclarations du groupe de pilotage, l’objectif de numériser 60.000 documents d’ici la fin de l’année est jouable. Enfin, contrairement à ce que propose actuellement Gallica, la BNE devra mettre à disposition des ouvrages encore sous droits, ce qui induit la mise en place d’une offre de téléchargement payant pour rester dans la légalité. La BNE d’accord, mais quid du financement ? Personne, ni au sein du comité de pilotage, ni du côté de la commission, ne peut faire une évaluation précise de ce que va coûter la création de la BNE et encore moins comment le projet va être financé. Le ministère français de la Culture, a indiqué dans un communiqué qu’il souhaitait un financement mixte privé et public. Pour ce qui est du volet français, interrogé par le quotidien, Jean-Noël Jeanneney a précisé « pour la France, l’effort de numérisation pourrait s’élever entre 8 et 15 millions d’euros. » Enfin, pour l’heure, on peut se demander si la BNE existera bien à la fin du premier semestre de la nouvelle année. Car les freins à son développement se multiplient, alors que des problématiques encore plus importantes, comme celles pour le choix du moteur de recherche, ou simplement sur la participation ou pas des autres pays européens, n’ont toujours pas de réponses. Cette ébauche de projet devrait être présentée au Président de la République et à la Commission européenne d’ici peu.