Chaud et froid sur le marché du jeu vidéo

Le résultat positif des ventes de jeux vidéo aux Etat-Unis en décembre, +7%, cache en réalité une situation tendue pour les éditeurs.

Selon NPD Funworld, les ventes de jeux vidéo aux Etat-Unis ont progressé de +7% en décembre, pour un chiffre d’affaires de 1,51 milliard de dollars. Un chiffre encourageant sur une période de Noël qui s’est révélée plutôt décevante pour le marché du jouet. Et qui démontre que le jeu vidéo demeure un marché incontournable. La réalité sur le terrain est sans doute moins brillante pour tous les éditeurs. Et les disparités sont notoires entre le marché américain et le reste du monde. Si Noël 2003 a consacré la Playstation 2 de Sony, Nintendo s’essouffle sur sa GameCube, tout en restant le leader quasi monopolistique des consoles portables, avec la famille des GameBoy. Et Microsoft souffre avec sa XBox en Europe. Seul concurrent sérieux à la « Play », le PC familial: il a bénéficié d’un fort rebond des livraisons en décembre. Le marché est à la fois dispersé et concentré autour de ces cinq supports. Dispersé, car pour répartir les risques, il est préférable de tenter d’amortir le développement, les licences, la promotion et la distribution d’un jeu sur tous ces supports. Concentré, car pour survivre, les éditeurs se voient contraints à se regrouper, seuls quelques acteurs d’envergure pouvant espérer survivre dans les années à venir. L’exemple d’Electronic Arts, leader du marché, est significatif : il est l’un des seuls éditeurs capables de sortir un même jeu sur toutes les plates-formes. Et il est aussi l’un des plus rentables. Le français Infogrames a tenté de le suivre en faisant l’acquisition de petits studios, mais son endettement inquiète. Quant à l’éditeur des Final Fantasy, le japonais Square, il s’est résolu à fusionner avec Enix en novembre. Dans ces conditions, miser sur quelques jeux présente un risque majeur, assimilable à un coup de poker. L’éditeur britannique Rage vient d’en faire les frais. Malgré des ventes record en 2002, l’éditeur, dont la dette frôle les 800 millions d’euros, a tout misé sur le titre Rocky, jeu de boxe tiré de la série de films. Le Père Noël a déçu, et Rage a été placé sous l’administration judiciaire d’Ernst & Young, qui a découvert à ses dépends qu’on ne pouvait pas traiter les droits d’auteurs associés à une licence comme un vulgaire outil de production. Comme dans tout jeu de poker, la chance peut aussi sourire aux audacieux. Eidos, le père de Lara Croft qui publie une nouvelle aventure entièrement remaniée aux normes 3D des plus récents jeux vidéo, et que l’on donnait pour mort voici quelques mois, pourrait renouer prochainement avec les bénéfices après le succès des suites de Hitman et de Time Splitters. Il est cependant grand temps pour les éditeurs d’achever leur concentration. Selon une étude de JP Morgan publiée voici quelques jours, la croissance du marché devrait être de +16% en janvier, mais ralentir fortement à +4% en 2004, avant de subir une chute de -5% en 2005. Un éditeur comme Acclaim, qui accuse 13,9 millions de dollars de pertes à son premier exercice fiscal 2003, pourrait bien ne pas s’en remettre.