Cloud et PME : anatomie d’un paradoxe (tribune)

Sur le papier, le Cloud paraît bien adapté aux contraintes et besoins des PME. Qui y trouveraient tarifs attractifs et offres de bon niveau, résume Guillaume Plouin, architecte Cloud et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet. Sauf que nombre de PME ignorent ce qu’est le Cloud…

Mon évolution professionnelle m’amène à fréquenter un peu moins les grands comptes, et un peu plus des petites entreprises. Cela m’a amené à faire le constat suivant : si, dans les grandes entreprises, on polémique sur la sécurité du Cloud, de plus en plus d’entre elles ont finalement fait un premier pas ; mais, dans les petites entreprises, on ignore tout simplement l’existence du Cloud. On se base encore largement sur des solutions aléatoires en terme de disponibilité.

Et pourtant…

Pourtant les bénéfices du Cloud sont beaucoup plus évidents pour une petite entreprise que pour une grande :

  • Le Cloud permet de se passer d’une équipe de production et d’une salle machine. Les petites entreprises peinent à investir sur ce sujet, se retrouvant avec une infrastructure peu résiliente (cf. la caricature du serveur sous un bureau), une dépendance aux vacances de l’administrateur, tout ça à un coût plutôt élevé pour leur trésorerie.
  • Le Cloud permet de disposer de prix souvent intéressants, avec des offres gratuites/pro/entreprise comme celles de Google, Microsoft, Trello, Evernote, Dropbox…
  • Le Cloud permet d’accéder à de nouveaux outils : une TPE n’avait pas les moyens de s’offrir une CRM avant Salesforce.

Par ailleurs, le risque d’indiscrétion sur les données (NSA) est faible pour nombre de petites entreprises.

Un début d’explication

J’ai constaté sur le terrain que les petites entreprises sont prises par l’opérationnel, et manquent de ressource pour faire de la veille. Elles sont donc mal informées sur l’état de l’art du SaaS. De plus, j’ai rencontré un certain nombre de personnes rebutées par la lecture en anglais, et il est vrai que le Cloud parle encore beaucoup en anglais et en dollars.

Enfin, elles ont souvent envie d’un interlocuteur dans le monde réel, un partenaire de confiance, proche géographiquement, issue de leur réseau de connaissance.

De fait, elles se contentent du niveau de disponibilité/résilience que peut offrir une équipe informatique de 5 personnes, alors que le Cloud leur offrirait le niveau de sécurité dont disposent les grands comptes.

Comment les faire basculer ?

Les opérateurs télécom proposent des offres Cloud pertinentes pour les petites entreprises :

L’idée est de proposer une sorte de DSI clef en main comprenant infrastructure réseau et outils SaaS. Ces offres proposent une facture unique, une authentification unique, avec un interlocuteur connu, présent en régions. Je ne connais pas leur niveau d’adoption.

Avec “Dégooglisons Internet”, Framasoft propose un début d’offre intéressante pour ceux qui ne souhaitent pas être hébergés par les géants américains. On pourrait aussi imaginer que La Poste, OVH ou d’autres acteurs français se décident à proposer des offres SaaS.

Je pense qu’il faudrait aussi que les grands acteurs américains se rendent plus accessibles aux petites entreprises : en développant leur réseau d’intégrateur en régions, en communiquant vers elles…

Guillaume PlouinIl faudrait aussi un effort de vulgarisation en France (cf. mon livre “Tout sur le Cloud personnel” chez Dunod), du bouche à oreille autour du Cloud. Cela prend du temps et c’est frustrant, car on aimerait voir nos petites entreprises mieux tirer parti des progrès de l’informatique…

Guillaume Plouin, architecte Cloud, est l’auteur de “Cloud Computing, Sécurité, stratégie d’entreprise et panorama du marché” et “Tout sur le Cloud Personnel” chez Dunod.

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