DADVSI : l’amendement Vivendi soulève l’opprobre des FAI

L’amendement prévoyant la pénalisation des éditeurs de logiciels P2P inquiète les fournisseurs d’accès à Internet qui ne veulent pas devenir les gendarmes de la Toile

Dans cette affaire chacun prêche pour sa paroisse. Aujourd’hui, c’est au tour de l’AFA, la très influente association des fournisseurs d’accès et de services à Internet, de tirer la sonnette d’alarme.

Dans un communiqué, elle critique vivement l’amendement Vivendi voté par l’Assemblée en mars dernier. Ce dernier instaure le principe de la responsabilité des éditeurs de logiciels permettant l’échange illicite des ?uvres, et la suppression récente par la commission des Affaires culturelles du Sénat de la responsabilité pénale ne semble pas satisfaire l’AFA. L’article de la loi est pour le moins clair : « la loi prévoit de sanctionner tout dispositif sciemment destiné à la mise à disposition non autorisée d’?uvres ». Mais attention, le problème de l’AFA n’est pas de défendre les ingénieux éditeurs de plates-formes P2P. En réalité, c’est tout le contraire. Pour l’association, les sites qui hébergent les miroirs permettant le téléchargement de ces applications sont souvent localisés à l’étranger, dans des pays ou les contraintes légales sont moins pesantes. Or, les FAI, dans un élan digne d’Harpagon devant sa cassette pleine d’écus, ne souhaitent pas avoir à filtrer l’accès à ces URL. La douloureuse serait trop importante, « voire même inefficace » peut-on lire dans La Tribune. L’AFA est longtemps restée dans l’ombre, observant silencieusement les discussions houleuses entre les défenseurs de la diffusion libre des ?uvres sur Internet contre une rémunération des FAI, et les industriels de la musique qui souhaitent voir condamner les utilisateurs de P2P. Elle s’est par exemple bien gardée de donner son point de vue sur l’idée d’une licence globale, qui depuis est passée à la trappe. L’amendement Vivendi n’est pas le seul volet du texte à soulever la désapprobation. Dans un article publié le 3 mai, nous rapportions les critiques émises par plusieurs Sénateurs sur l’amendement concernant le problème de l’interopérabilité cher à notre ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, mais dangereux pour des groupes disposant d’un format propriétaire comme Apple. En étude au Sénat depuis le 4 mai et jusqu’au 10, une journée de réflexion supplémentaire pourrait intervenir le 12. Le texte devrait donc encore être remanié. Les sénateurs sont d’ailleurs déjà revenus sur :« l’exception aux droits d’auteurs en matière d’information » vivement critiquée, notamment par des journalistes et plus particulièrement par les photographes. L’amendement Universal

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Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 300.000 euros d’amende le fait de mettre sciemment à la disposition du public ou de communiquer au public, sous quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public, non autorisée, d’oeuvres ou d’objets protégés. » Le texte prévoit également des peines pour les éditeurs qui pourraient « inciter sciemment, y compris à travers une annonce publicitaire, l’usage » de ce type de logiciel. Le législateur a cependant tenu à apporter une précision: « Ces dispositions ne sont pas applicables aux logiciels destinés au travail collaboratif, à la recherche ou à l’échange de fichiers ou d’objets non soumis à la rémunération des droits d’auteur. » La loi vise donc très clairement à condamner les développeurs de solutions d’échange de données en ‘peer-to-peer‘ (P2P). Certes ces dernières sont le principal outil des personnes qui téléchargent illégalement des oeuvres, mais elles sont aussi de plus en plus au coeur des systèmes d’exploitation – Microsoft par exemple a installé sa propre solution dans le futur Windows Vista – et de nombreuses solutions qui adoptent justement un volet collaboratif. Par ailleurs, le gouvernement semble confondre l’outil et l’usage. Interdit-on les voitures parce qu’elles sont sources d’accidents ? « Autant incriminer les fabricants de marteaux parce que ceux-ci peuvent être utilisés pour blesser quelqu’un! », a regretté Patrick Bloche, député PS. Les députés qui ont adopté l’amendement ont souligné qu’il ne visait que les activités illégales. Mais on sait que cette loi est soumise à interprétation. Le ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres aura beau appeler à « ne pas faire naître des peurs là où elles existent pas« , la communauté ‘open source’ peut légitimement être inquiète.