Drones et sécurité : peut-on miser sur un blocage logiciel ?

Suite aux survols de la capitale ou à ceux de centrale nucléaire, la France réfléchit à un arsenal de mesures permettant de limiter les incursions de drones au-dessus de zones sensibles. Sans toutefois évoquer la piste logicielle, celle d’une mise à jour des firmwares.

Après de nouveaux survols de la capitale par des drones dans la nuit de mardi à mercredi 4 mars, les autorités françaises semblent décidées à réagir. Depuis octobre, soixante survols de drones ont été constatés au-dessus de Paris et des centrales nucléaires françaises, a indiqué le ministère de l’Intérieur. Le Figaro évoque ainsi toute une batterie de mesures pour lutter contre ces survols non autorisés : nouveaux types de radars, immatriculation des drones, obligation de contracter une assurance, tagage des engins par une puce et un transpondeur permettant de tracer leurs trajectoires, systèmes de brouillage, « jets de matière » (sic)…

Nos confrères expliquent que le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), structure dépendant du Premier ministre, planche sur le sujet et a remis un rapport confidentiel sur le sujet à Manuel Valls le 30 janvier. Pour le compte du SGDSN, l’Agence nationale de la recherche a même lancé un appel d’offres, doté d’un million d’euros, pour identifier d’autres procédés. Toujours, selon Le Figaro, 23 projets sont en lice ; les candidats retenus devraient être annoncés d’ici une quinzaine de jours.

« No-fly zones »

Étrangement, cette débauche de moyens semble pour l’instant faire l’impasse sur la solution la plus simple et la moins coûteuse pour l’Etat : un blocage à la source, implanté dans le logiciel même qui anime les appareils. En effet, pour les drones équipés de GPS, il est possible d’inscrire les zones interdites de survol au cœur du logiciel. Directement pour les nouveaux modèles ou via une mise à jour pour les engins déjà vendus. C’est d’ailleurs la solution que le fabricant chinois de drones DJI utilise pour ses modèles Phantom 2. Ceux-ci ne peuvent ni voler, ni décoller d’une des zones interdites définies par l’autorité américaine en charge de ces questions (Federal Aviation Authority), des « no-fly zones » qui couvrent notamment Washington, les frontières terrestres des Etats-Unis, mais aussi 10 000 aéroports.

Il faut dire qu’en janvier dernier, un des drones DJI a terminé sa course sur les pelouses de la Maison Blanche ! Le tout sans avoir été détecté par les systèmes de radars entourant le bâtiment hébergeant le président américain. Car les Etats-Unis connaissent, en la matière, les mêmes problèmes de sécurité que l’Hexagone et cherchent, eux aussi, des parades. En janvier, un drone chargé de 6 livres de méthamphétamine s’est écrasé sur un parking de Tijuana, ville frontière mexicaine, mettant en évidence l’utilisation des engins sans pilote pour les livraisons de drogue.

Trop facile à contourner ?

Face à ces usages détournés, la solution de la mise à jour logicielle est, sur le papier, séduisante. Elle permet déjà d’éviter le survol ‘par accident’ ou par défi de zones interdites par des utilisateurs lambda. Sans pour autant complexifier la législation, une volonté des autorités françaises qui semblent ne pas vouloir brider un secteur qui emploie quelque 3 000 personnes dans l’Hexagone.

Reste que la solution de la mise à jour des firmwares est loin d’être parfaite, comme le souligne Gérôme Billois, senior manager en gestion des risques et sécurité au sein du cabinet de conseil Solucom : « D’abord, il y a de fortes chances que la mesure soit facile à contourner. Tout dépend de la façon dont elle est implémentée. Ensuite, la maintenance s’annonce compliquée : qui gère la liste des zones interdites ?, quand est-elle mise à jour ?, comment imposer les mises à jour aux utilisateurs ?, etc. Si ces sujets ne sont pas traités correctement, la mise à jour des firmwares restera une protection superficielle ». Et Gérôme Billois d’y voir avant tout une mesure pour marquer les esprits.

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