État d’urgence : les Sages invalident la copie de données informatiques

La disposition de la loi sur l’état d’urgence autorisant la copie de toutes les données informatiques accessibles lors d’une perquisition administrative, a été censurée par le Conseil constitutionnel.

Saisie d’une question de constitutionnalité posée par la Ligue des droits de l’homme, le Conseil constitutionnel a censuré, vendredi 19 février, un paragraphe de la loi sur l’état d’urgence portant sur la copie de données informatiques. L’état d’urgence avait été décidé au lendemain des attentats du 13 novembre à Paris et Saint-Denis, et renouvelé depuis pour une nouvelle période de trois mois. Dans ce contexte, l’essentiel de l’article 11 de la loi du 3 avril 1955 dans sa rédaction résultant de la loi du 20 novembre 2015 (perquisitions administratives en tout lieu, y compris un domicile, de jour et de nuit) a été validé. Mais le Conseil constitutionnel a jugé non conformes, aux droits et libertés que la Constitution garantit, les dispositions permettant « à l’autorité administrative de copier toutes les données informatiques auxquelles il aura été possible d’accéder au cours de la perquisition ». Tous les terminaux sont concernés : ordinateurs, tablettes, smartphones, serveurs…

Pas de saisie informatique sans juge

Dans sa décision, la Conseil Constituionnel a considéré « que cette mesure est assimilable à une saisie » alors que « ni cette saisie ni l’exploitation des données ainsi collectées ne sont autorisées par un juge, y compris lorsque l’occupant du lieu perquisitionné ou le propriétaire des données s’y oppose et alors même qu’aucune infraction n’est constatée ». L’institution souligne, par ailleurs, que « peuvent être copiées des données dépourvues de lien avec la personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics ayant fréquenté le lieu où a été ordonnée la perquisition ».

Pour les sages, enfin, « le législateur n’a pas prévu de garanties légales propres à assurer une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public et le droit au respect de la vie privée ; que, par suite et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, les dispositions de la seconde phrase du troisième alinéa du paragraphe I de l’article 11 de la loi du 3 avril 1955, qui méconnaissent l’article 2 de la Déclaration de 1789, doivent être déclarées contraires à la Constitution ».

Les droits fondamentaux en question

L’avocat de la LDH, Patrice Spinosi, a indiqué que la décision du Conseil démontre « la légitimité » de l’action menée jusqu’ici. De son côté, l’association de défense des droits et libertés La Quadrature du Net a souligné que « la censure partielle de la loi sur l’état d’urgence est un succès et souligne le travail indispensable de recours administratifs conduit par diverses organisations de défense des droits ».

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