France Connect, catalyseur des échanges de données entre administrations ?

Officiellement inauguré la semaine dernière, France Connect fournit aux citoyens une identité sur les services publics en ligne. Surtout le service vise à réduire le nombre de pièces justificatives, en autorisant les transferts de données inter-administrations.

Pas moins de deux ministres, Axelle Lemaire et Jean-Vincent Placé – étaient présents, en milieu de semaine dernière, à l’inauguration officielle de France Connect, le service de gestion des identités qui fait figure de composante de base de la stratégie d’Etat plate-forme portée par la Dinsic, la DSI de l’Etat. « Notre ambition est de généraliser l’usage de France Connect d’abord dans le service public et, à terme, de l’exporter également dans la sphère privée », affirme Jean-Vincent Placé, le secrétaire d’Etat à la réforme de l’Etat (en photo ci-dessus). Officiellement créé par un arrêté publié en août 2015, le service compte déjà quelque 25 services actifs, s’appuyant sur 3 fournisseurs d’identité (la Cnam, la DGFiP et La Poste).

« L’histoire de ce service a débuté le 17 septembre 2014, en même temps de que celle de l’Etat plate-forme, raconte Guillaume Blot, le chef du programme Etat plateforme et France Connect. Ce service n’est ni la résurgence d’une carte d’identité électronique, ni un simple identifiant unique. Mais qu’est exactement France Connect ? J’avoue, que le 17 septembre 2014, nous nous posions aussi la question ». Bâti dans le cadre d’une démarche de co-construction (avec 30 open labs ou hackatons, impliquant au total 600 personnes), le service propose aux usagers un accès universel aux services publics en ligne leur évitant de créer un compte à chaque nouvelle administration sollicitée et de jongler avec de multiples identifiants et mots de passe. « Est-il normal que les usagers portent leurs avis d’imposition à d’autres administrations ? », illustre Yannick Girault, chef de la mission stratégie relations aux publics au sein de la DGFiP. « France Connect permet de fluidifier le parcours de l’usager et diminuant le nombre de pièces à fournir. Sur le site Service-public, le format des pièces jointes (utilisées pour envoyer des pièces justificatives, NDLR) demeure le frein principal pour les usagers », explique Régis Pérol, le responsable produits et services numériques de la Dila (Direction de l’information légale et administrative). Autre principe clef du service : c’est le citoyen qui accepte les transferts de données entre administrations, aucun échange n’ayant lieu sans son consentement.

21 projets PIA font appel à France Connect

Lemaire
Axelle Lemaire

La secrétaire d’Etat au Numérique, Axelle Lemaire, identifie, elle, un autre ingrédient nécessaire à la réussite de France Connect : le design. « C’est notre responsabilité collective de démontrer aux citoyens notre capacité à délivrer des services optimaux et personnalisés, lance-t-elle. Les économies que nous dégagerons ne seront qu’un effet connexe ; une dématérialisation sèche des services publics ne serait pas acceptable pour les citoyens. »

Après des expérimentations démarrées dès l’été 2015, avec le Conseil Départemental des Alpes-Maritimes, France Connect est officiellement en régime nominal depuis la fin mars, avec près de 90 000 usagers différents. « Au total, avec les trois fournisseurs actuels, on fédère plus de 22 millions d’identités, précise Guillaume Blot. L’Insee, de son côté, jouant un rôle central en assurant la vérification des identités via le répertoire national des personnes physiques. » En plus des services utilisateurs actuels (Service-public, le permis à points, la Caisse nationale d’assurance vieillesse…), 21 projets s’inscrivant dans le cadre de l’appel à projets du PIA (Programme d’investissements d’avenir) sur la transformation numérique, doté de 150 millions d’euros, s’appuient sur le service d’identité. Citons le cas  du ministère de l’Intérieur, visant à créer un France Connect dédié aux élus et agents de l’Etat, ou encore Palyma, projet qui voit Paris, Lyon et Marseille travailler de concert sur les vignettes de stationnement. « Nous allons aussi travailler avec les professions réglementées comme les experts comptables », ajoute Guillaume Blot.

« On diminue les échanges d’informations »

Henri Verdier
Henri Verdier

« La France est un grand pays informatique, mais a raté le tournant du numérique. Nous sommes aujourd’hui en train de nous rattraper. Au sein de l’Etat, c’est la stratégie d’Etat plateforme, née il y a deux ans, qui porte cette ambition », dit Henri Verdier, le directeur de la Dinsic. Pour le DSI de l’Etat, la transformation numérique est avant tout une transformation culturelle, qui doit pouvoir compter sur une informatique agile, modulaire, souple, et qu’on peut ouvrir à l’extérieur par pans entiers (via des API). « Palyma illustre bien ce fonctionnement nouveau qu’autorise France Connect. Avant la fin d’année, les villes de Paris, Lyon ou Marseille pourront calculer les vignettes de stationnement à partir de données fiscales transmises par la DGFiP, de celles relatives aux plaques d’immatriculation venant du ministère de l’Intérieur et du quotient familial que détient la Cnaf, souligne Henri Verdier. On diminue ainsi les échanges d’informations. Mettre ce principe au cœur du système d’information de l’Etat s’avère très prometteur. »

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