Franck Simon : « France-IX est un point d’échange de tous types de données »

Né de la jungle des points d’échanges parisiens, France-IX ambitionne de rayonner à l’échelle internationale. Avec déjà des avancées significatives moins de deux ans après sa création.

« France IX n’est pas le point de peering de Google, précise d’entrée de jeu Franck Simon, directeur général de France-IX, mais une infrastructure et une organisation neutres. » France-IX est née, en juin 2010 officiellement, de l’histoire mouvementée des points d’échanges Internet – ou nœuds de peering – en France. Histoire qui remonte au milieu des années 90 avec la création de SfinX, le GIX (Global Internet eXchange) de Renater (Réseau National de télécommunications pour la Technologie l’Enseignement et la Recherche) à Paris.

L’idée, derrière, était d’optimiser le trafic Internet en toute neutralité en permettant aux opérateurs d’interconnecter leurs réseaux sans exploitation commerciale des transits de données (chacun s’accordant à accepter que les volumes échangés s’équilibraient). Une belle idée qui, hélas, n’a fait qu’attirer les convoitises. De France Télécom (ParIX) à PaNAP (Club Internet puis Bouygues Telecom en 2008) en passant par FreeIX (Iliad/Free) et d’autres, chacun a créé son GIX pour tirer la couverture à lui. Résultats, une douzaine de points d’échanges sur la région parisienne. « Paris était la risée des grands opérateurs étrangers qui préféraient alors s’interconnecter avec les GIX d’Amsterdam ou de Londres en Europe plutôt que d’avoir à négocier les interconnexions avec autant de points d’échanges en France », résume Franck Simon.

Unifier l’ensemble des acteurs

D’où son idée d’unifier l’ensemble des acteurs à travers la création de France-IX. Si Bouygues Telecom a joué le jeu, comme 140 acteurs du secteur (dont Google, Akamaï, Interxion, Amazon, CELESTE, Neotelecom…), Orange-France Télécom, SFR ou Iliad ont préféré ne plus faire de peering. « Je ne désespère pas de faire venir les opérateurs avec de nouvelles offres en cours de développement », indique Franck Simon.

L’offre de France-IX a pourtant déjà de quoi séduire avec 9 points de présence (8 à Paris, 1 à Marseille) et 3 passerelles (Sfinx à Paris, LyonIX à Lyon et LU-CIX au Luxembourg). Et un catalogue de produits offrant des connexions (ports) de 100 Mbit/s à 10 Gbit/s. Offre qui montera à 100 Gbit/s « quand les tarifs seront accessibles », précise le dirigeant. Car France-IX ne s’adresse pas qu’aux opérateurs. « C’est fini le modèle du point d’échanges pour les opérateurs. Les nouveaux clients sont les CDN [serveurs cache pour optimiser le réseau, NDLR], les prestataires de jeux en ligne, les grandes entreprises, le commerce électronique, les entreprises du cloud… » Bref, tous les acteurs susceptibles de transporter ou consommer de grands volumes de données.

Les 100 Gbit/s de trafic atteints

France-IX, une organisation originale
France-IX est une association de loi 1901, à laquelle adhèrent les membres, qui s’inscrit comme l’unique actionnaire de France-IX Services SAS, l’entité commerciale qui assure les services. Une structure originale qui évite les risques de prise de pouvoir interne. « Chaque membre a une voix et une seule quel que soit son poids », assure Franck Simon.

Et ça marche. France-IX a commencé l’année en franchissant les 100 Gbit/s de trafic d’échange. Un trafic facilité avec la mise en place de serveurs route à partir desquels les membres utilisateurs se déclarent leurs routes évitant ainsi de multiplier les accords d’interconnexion entre membres. « 75 % des membres les utilisent », assure Franck Simon qui revendique 10 000 routes. En matière de résultats, France-IX affiche un chiffre d’affaires de 600 000 euros sur 2010-2011 et en prévoit 900 000 cette année pour une dette de 600 000 euros à couvrir sur quatre ans. La structure emploie actuellement cinq personnes.

Fort de ce succès, l’entreprise reçoit aujourd’hui des demandes d’Afrique centrale et du sud, de la Thaïlande, des Émirats Arabes Unis… En 2012, France-IX va poursuivre ses développements en consolidant ses points d’échanges « via des passerelles avec des points régionaux, en interconnectant ou en montant nos propres points d’échanges en région » Le GIX va notamment renforcer sa présence à Marseille, tête de pont vers l’Espagne et le Maghreb. « L’idée est de monter des partenariats avec les régions et les pays proches » pour imposer France-IX sur la scène internationale et réajuster ainsi les grands équilibres des points d’échanges en Europe. « Je considère que la quatrième place [après les Pays-Bas, l’Angleterre et l’Allemagne, NDLR] pour un quatrième acteur majeur est accessible à France-IX », déclare Franck Simon.

Le dirigeant se dit « fier d’avoir réussi à faire revenir des acteurs qui étaient partis à Amsterdam, comme Microsoft ». Et il étudie aujourd’hui l’offre de peering pour les réseaux mobiles. L’arme secrète pour convaincre les opérateurs nationaux d’adhérer à l’association ?