Google cède à la censure chinoise

Sur son site Google.cn, le moteur de recherche va bloquer les expressions politiquement interdites par le gouvernement chinois

Tous les compromis sont possibles pour peu que s’ouvre le gigantesque marché chinois. La Chine entend censurer les sites Web qui ne répondent pas à sa ligne politique ? Qu’à cela ne tienne, Google se pliera à la contrainte et respectera les directives gouvernementales.

Après Yahoo! et Microsoft (MSN), qui ne cachent pas qu’ils appliquent la censure et même collaborent avec les autorités chinoises jusqu’à la délation (lire nos articles), il ne manquait plus que Google. Le moteur de recherche a lancé ce mercredi son site ‘Google.cn‘, qui va graduellement s’étendre dans les mois à venir par l’adjonction de serveurs sur le territoire chinois. Et Google n’a pas caché sa volonté d’appliquer les règles anti démocratiques du gouvernement si elles lui profitent. « Dans Google.cn, nous allons retirer les liens vers des sites que nous pensons offensants pour le gouvernement chinois, avec la perspective que le gouvernement va ensuite autoriser Google à exploiter des serveurs localisés en Chine« , a déclaré un porte-parole du moteur au Wall Street Journal. Le nouveau site emploie des filtres sophistiqués pour bloquer l’accès aux sites politiquement sensibles. Et Google s’est engagé à ce que les serveurs locaux n’hébergeront pas de blogs ou d’e-mails qui pourraient créer des problèmes de légalité avec le gouvernement. En l’échange de cette soumission et collaboration sans faille, Google devrait obtenir du gouvernement chinois l’autorisation de travailler localement et sans limite. Face au géant chinois Baidu, l’absence de serveurs locaux entraîne des délais de téléchargement qui nuisent à sa démarche concurrentielle? RSF ‘ecoeuré’

L’organisation Reporters sans frontières (RSF) se dit mercredi « écoeurée » d’apprendre que Google a décidé de lancer en Chine « une version censurée » de son moteur de recherche. Pour RSF, « le lancement de (Google.cn) marquera un jour noir pour la liberté d’expression en Chine ». Alors que cette entreprise « défend les droits des internautes américains face à la justice américaine, elle bafoue ceux de ses utilisateurs chinois », s’exclame-t-elle. « Exit les informations sur le Tibet, la démocratie ou les droits de l’homme en Chine », estime RSF. Pour RSF, « les déclarations offusquées de Google sur le respect de la confidentialité des internautes apparaissent comme un comble d’hypocrisie à la lumière de leur stratégie en Chine ». « Comme ses concurrents, cette entreprise nous explique qu’elle n’a pas le choix, car elle doit se plier aux lois locales », explique RSF pour qui « cet argument a fait long feu ». En matière de censure, fait-elle valoir, « les entreprises américaines se plient aujourd’hui aux mêmes règles que leurs concurrentes chinoises ». Elles continuent pourtant de se justifier en invoquant l’effet bénéfique de leur activité sur le long terme.