Hollande à Obama : les écoutes de la NSA ? C’est déjà oublié

Lors d’une conférence de presse conjointe avec Barack Obama, François Hollande a mis l’accent sur « la confiance mutuelle restaurée » après le scandale de la surveillance massive pratiquée par la NSA. Circulez, il n’y a plus rien à voir ? Pour la Quadrature du Net, la surveillance globale reste « un grand bazar », auquel Paris participe largement.

À l’occasion de sa visite d’État aux États-Unis, François Hollande a mis l’accent, mardi 11 février, sur la confiance mutuelle retrouvée après les révélations sur les écoutes massives réalisées par l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA). La conférence de presse conjointe avec Barack Obama a donc bien été l’occasion de minimiser le scandale qui, depuis plusieurs mois, exacerbe les tensions entre Washington et ses partenaires internationaux.

Diplomatie et commerce first

« Nous avons établi une clarification entre le président Obama et moi-même sur le passé et travaillé à une coopération qui puisse permettre de lutter contre le terrorisme et en même temps de respecter des principes », a affirmé le chef de l’État français. « Il y a une confiance mutuelle qui a été restaurée, qui doit être fondée à la fois sur le respect de chacun de nos pays et également sur la protection de la vie privée », a ajouté François Hollande.

Barack Obama a de son côté assuré : « qu’il n’y aucun pays avec lequel nous avons un accord de non espionnage. Nous sommes engagés à protéger le droit [au respect] de la vie privée, ce qui est un engagement sans précédent, avec la mise en place de règles et procédures ». Une référence à la récente réforme à minima des services de renseignement décidée par Barack Obama. Le président américain, comme son homologue français, a aussi privilégié une communication centrée sur « l’amitié franco-américaine » et la poursuite des affaires diplomatiques et commerciales.

Dans ce domaine, les États-Unis sont les premiers investisseurs directs étrangers (IDE) en France avec un stock de 85,6 milliards d’euros en 2011 (18,5% du stock total d’IDE entrants). Selon les données de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII), ces investissements représenteraient environ 450 000 emplois en France. Par ailleurs, les États-Unis sont la première destination pour les investissements directs français à l’étranger (19% du stock total d’IDE sortants). Et la France est le 7e investisseur étranger aux États-Unis, où plus de 2 300 entreprises françaises sont implantées. Ce qui représente près de 500 000 emplois et un chiffre d’affaires cumulé supérieur à 170 milliards de dollars, d’après les chiffres officiels.

Washington et Paris complices ?

Alors, véritable réconciliation entre Washington et Paris ou simple mise en scène ? « Il n’y a pas besoin de réconciliation, car il n’y a jamais vraiment eu de clash ! Face aux États-Unis, la position de la France sur la NSA a toujours été ‘horizontale’ », explique à la rédaction Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net. « L’interdiction, début juillet 2013, du survol de l’espace aérien français par l’avion du président bolivien Evo Morales [ndlr : la France avait un temps soupçonné la présence d’Edward Snowden, alors en fuite vers Moscou, à bord de l’appareil] en est l’illustration sans doute la plus honteuse à l’échelle internationale », ajoute-t-il.

« Cette surveillance globale est un grand bazar dans lequel les services échangent des données en permanence, et la France y participe », assure le cofondateur de l’organisation de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet. « Le vote de l’article 20 (anciennement 13) de la loi de programmation militaire (LPM) [ndlr : qui étend l’accès administratif aux données de connexion et de géolocalisation, sans contrôle judiciaire] prouve que la France participe, y compris sur son territoire », insiste le porte-parole de La Quadrature du Net.

Un scandale planétaire

Rappelons que la NSA est au cœur d’un vaste scandale depuis l’été 2013. Les documents dérobés par Edward Snowden, ancien consultant et administrateur système de l’agence, ont mis en lumière des pratiques de surveillance à grande échelle. Sont ciblés : les citoyens, les dirigeants, les institutions et leurs systèmes d’information. Quant aux collusions avec d’autres services, dont le CGHQ britannique, et de grands noms de la filière IT, elles alimentent l’ère du soupçon qui conduit les entreprises et les citoyens à s’interroger sur la confidentialité de tous leurs échanges numériques.

Pour tenter d’apaiser la critique, Barack Obama a présenté, le 17 janvier dernier, une réforme à la marge du renseignement américain et de la NSA (Lire : Barack Obama et la NSA : une réforme pour rien ?). La nomination récente à la direction de la NSA et de l’US Cyber Command du vice-amiral Michael Rogers n’a rien fait pour apaiser les critiques. Bien au contraire.


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