Une PME doit-elle nommer un chief digital officer ?

Alors que les grands comptes se sont massivement dotés d’un CDO, la pertinence de recruter ce type de profil se pose pour les entreprises de taille plus modeste. Les PME/ETI qui sautent le pas choisissent des candidats aux contours radicalement différents que leurs grandes sœurs.

Total, L’Oréal, Axa, La SNCF, AccorHotels… La quasi-totalité des grandes entreprises françaises du CAC 40 et du SBF 120 ont nommé, ces cinq dernières années, un Chief digital officer (CDO). Selon les cas, il est appelé aussi directeur de l’innovation, directeur du numérique, Chief transformer officer ou Chief client officer.

Incarnation de la transformation numérique, ce CDO, selon le cabinet de recrutement Michael Page, « définit et pilote la stratégie digitale de l’entreprise pour intégrer les nouveaux canaux aux outils et méthodes déjà existants. »

Est-ce que la création de ce type de poste trouve sa pertinence dans des entreprises de taille plus modeste ? Oui, selon Pierre Cannet, general manager de Blue Search Conseil, société de conseil en RH. « Un CDO va accompagner la montée en puissance des équipes digitales des grosses PME et des ETI de 500 à 2000 salariés. Elles sentent le souffle du boulet de l’uberisation, notamment dans le retail, et veulent se renforcer. »

Pierre Cannet, Blue Search Conseil

À la différence des grands comptes, ces entreprises n’ont pas un vivier de ressources internes suffisant pour faire monter ce CDO par la promotion. Elles procèdent donc par recrutement externe. Le profil recherché diffère aussi de leurs grandes sœurs. « Les ETI ne veulent pas d’un CDO évangéliste, d’une sorte de porte-parole de la stratégie digitale coupé du business, observe Pierre Cannet. Certains CDO de grands comptes passent la moitié de leur temps à faire de la politique. »

Un opérationnel polyvalent

À l’inverse, le CDO d’une ETI est un opérationnel bien arrimé au business. Rattaché au plus haut niveau, à la direction générale, il a parfois en charge le marketing et l’e-commerce. « Les mains dans le cambouis, il sera capable de descendre dans la machine. La fonction est plus complète, c’est à la fois la tête et les jambes. » L’équipe autour de lui sera toutefois moins nombreuse.

Conscientes de la pénurie qui sévit sur le marché de l’emploi pour ce type de poste, les ETI font le pari de la jeunesse en recrutant des trentenaires attirés par le pari d’intégrer des organisations souples où ils auront les mains libres. À la différence de grandes structures où le périmètre du CDO chevauche souvent celui du directeur marketing et du DSI, créant des rivalités, sa feuille de route sera plus claire. Elle privilégiera l’efficacité opérationnelle.

Comme ce qui se ressemble s’assemble, les patrons choisissent des professionnels qui ont une expérience de leur secteur d’activité, de préférence dans une entreprise de taille comparable. « Ils n’ont pas de fascination, comme peuvent l’avoir les PDG de grands comptes, pour les “GAFA players” ». À savoir ces cadres débauchés à prix d’or chez Google ou Amazon.

De même, les ETI seront moins élitistes sur le cursus du postulant. « Elles vont chercher des diplômés d’une bonne école de commerce de province et plus rarement des ingénieurs de formation, sauf parfois dans le BtoB. »