Hyperconvergence : après le buzz, la concrétisation en France ?

Gérer de concert serveurs et stockage semble une évidence pour faire face au besoin croissant de ressources. Diademys et Interdata témoignent de la réalité du déploiement de la convergence sur l’Hexagone, des avantages et des limites à dépasser.

L’explosion des besoins en stockage et en puissance de calcul amène les entreprises à revoir leur approche traditionnelle des infrastructures informatiques. Pour répondre à ces problématiques, des offres d’hyperconvergence intégrant les équipements serveurs et réseau ont lentement vu le jour entre 2000 et 2010.

On trouve deux tendances sur ce créneau. Des éditeurs, dans le sillon de Nutanix ou Simplivity, proposent un logiciel intégrant et optimisant les serveurs et les réseaux avec une approche de type software defined, initialement basée sur l’hyperviseur Vmware. Par ailleurs, Cisco qui a lancé ses propres serveurs s’est très vite associé à EMC et VMware dans VCE (puis avec NetApp) pour proposer des packages matériels et logiciels. Dans cette seconde famille, HP a depuis longtemps vanté les mérites de l’hyperconvergence, sur laquelle se positionnent également des constructeurs comme Dell.

Silicon.fr a rencontré Interdata et Diademys, deux intégrateurs français, qui nous livrent leur retour d’expérience de terrain en matière d’hyperconvergence. « Avec le succès croissant du SaaS, les entreprises ont pris l’habitude de n’acheter qu’en fonction de leurs besoins avec la possibilité d’une croissance progressive. Les autres acteurs se sont positionnés de façon différente, en assemblant des solutions existantes » observe Nicolas Millet, ingénieur avant-vente chez Interdata, partenaire de Simplivity.

Avantages et bénéfices bien perçus

L’hyperconvergence rencontre un succès croissant sur l’Hexagone, avec des avantages qui semblent évidents sur le terrain. « L’hyperconvergence peut répondre à tout type de besoins de quelques serveurs à plusieurs dizaines. Et plus encore lorsqu’il s’agit de disposer de points de reprise sur un second site. L’offre peut ainsi répondre à un besoin de garantie des performances applicatives, d’évolutions permanentes, mais aussi de consommation électrique maîtrisée », rapporte Fabrice Tétu, PDG de l’intégrateur et hébergeur Diademys, partenaire de Nutanix.

« Avant tout, la pertinence des offres d’hyperconvergence dépend du degré de maturité de l’entreprise par rapport à la virtualisation » analyse Nicolas Millet. « Parmi les avantages de ces solutions, on retrouve la facilité de gestion et d’utilisation, l’intégration avec l’existant aussi bien pour le matériel que pour l’administration et un rapprochement entre les utilisateurs et l’informatique grâce à un service plus rapide et plus précis (VM, clonage, sauvegarde…). La quasi-totalité des clients est convaincue, suite à une démonstration par nos équipes. »

Un sentiment partagé par Fabrice Tétu : « Nous nous sommes intéressés à l’hyperconvergence en étudiant les offres de Nutanix. Une plate-forme en rupture par rapport aux approches traditionnelles. Si l’investissement initial coûte environ 10 % plus cher à l’entreprise, les délais d’intégration et d’évolution dans son système d’information sont divisés par deux. Ainsi, l’ajout d’une appliance nécessite au maximum une demi-journée sur un datacenter ou un dual datacenter, en incluant tous les composants (serveurs, stockage, câbles, logiciels…). De plus, l’espace nécessaire dans le datacenter est divisé par un facteur de trois à sept, ce qui représente également une économie substantielle. Autres avantages : l’intégration via le logiciel est simple et fortement automatisée, la performance des appliances est très optimisée (y compris avec les fonctions de tiering pour le stockage, avec le meilleur équilibre possible RAM/SSD/disque dur). »

Le facteur humain, à considérer plus que jamais

Toutefois, l’arrivée de nouvelles technologies  bouscule souvent les habitudes en place, multipliant les freins et nécessitant des formations, pas toujours souhaitées par les informaticiens concernés.

« Dans les grandes entreprises, les équipes serveur et stockage sont dissociées. L’hyperconvergence pose donc des questions d’ordre organisationnel », constate Nicolas Millet. « Ainsi, certains peuvent se demander si l’entreprise a encore besoin de spécialistes du stockage à l’avenir. C’est pourquoi l’adoption de telles solutions nécessite de la réflexion et de la sensibilisation. En revanche, dans les PME, la question ne se pose pas. Au contraire, c’est souvent la même personne ou une toute petite équipe qui gère l’ensemble, et voit immédiatement dans l’hyperconvergence une opportunité de simplification. »

Côté compétences, l’hyperconvergence ne rencontre pas de frein majeur. « Avec Simplivity, peu de compétences supplémentaires sont nécessaires », assure Nicolas Millet. « Pour un informaticien qui maîtrise VMware, VSphere, la gestion de son hyperviseur et les tâches de sauvegarde/restauration/cloning, 15 minutes suffisent pour s’approprier les menus supplémentaires et les nouvelles fonctions. Et il en faut à peine plus pour un super-administrateur. »

Un marché attractif, mais diversifié

Le succès croissant de l’hyperconcergence aiguise les appétits, et le nombre de prétendants aux parts du gâteau explose, de nouveaux venus comme de constructeurs très installés. Néanmoins, les spécialistes tiennent à souligner les différences. « Toutes ces offres entraînent une émulation du marché », reconnait Fabrice Tétu. « Cependant,  l’approche des Cisco, VCE ou HP ou autre est très différente. Il s’agit en fait d’un assemblage de blocs matériels existants, parfois supervisés par des logiciels préexistants. Alors que pour Nutanix ou Simplivity, il s’agit de faire tenir le stockage et les serveurs dans quelques racks regroupés en constituant des pools de ressources virtualisés et extensibles, plutôt que d’assembler différents composants matériels. Nutanix nous semble cependant supérieur. Non seulement le logiciel est 100% Software Defined, mais surtout, il fonctionne sur toute solution matérielle. Ce qui n’est pas forcément le cas de ses concurrents, privilégiant des choix d’intégration de certains constructeurs. »

Pour Nicolas Millet, « Simplivity souhaite proposer une solution utilisable sur le champ et sans intégration complète dans le système d’information. Il s’agit donc d’un logiciel totalement intégré à l’hyperviseur, aujourd’hui VMware. Au départ, Nutanix a adopté le même positionnement, mais commence à se substituer à l’hyperviseur VMware. Dans le sillage de Simplicity ou Nutanix, Cisco essaie plusieurs solutions pour suivre la tendance. Cependant, l’approche est réellement différente, avec un package totalement intégré. Il s’agit de proposer un ensemble logiciel et matériel, avec des composants de plusieurs constructeurs. Cependant, il n’y a pas de réelle vision hyperconvergée initiale. »

Surtout pour les nouveaux projets

Pour le moment peu d’entreprises, et encore moins en France, ont généralisé cette approche hyperconvergée dans leur datacenter. Et cela ne sera pas pour demain, comme l’explique Nicolas Millet: « Dans la plupart des situations, il ne s’agit pas réellement de remplacement des serveurs et du stockage sur les applications existantes, mais plutôt de nouvelles applications. Et l’offre hyperconvergée s’impose le plus souvent, car elle est plus rapide et évolutive. Il s’agit bien entendu de projets en production, qui permettent d’envisager une implémentation plus large par la suite. Ces solutions regroupent les serveurs, le stockage, les hyperviseurs… Or, chez les clients les cycles de renouvellement du stockage et des serveurs sont rarement synchronisés. C’est pourquoi l’hyperconvergence concerne le plus souvent un périmètre restreint comme les nouvelles applications, les nouveaux datacenters, ou les nouveaux sites. Dans toutes ces situations, l’offre répond aux attentes. »

En la matière pourtant, on ne pourra pas accuser les cordonniers d’être les plus mal chaussés. « Sur nos infrastructures, nous déployons la solution Nutanix non seulement pour nos clients (hébergement cloud SAP), mais également pour nos propres besoins », témoigne Fabrice Tétu. Et Nicolas Millet renchérit: « Chez Interdata, tout ce qui était virtualisé a été porté sur Simplivity. Nos administrateurs ont constaté une diminution de la charge qui est passée à quelques heures par trimestre. Parce que la solution crée une couche de virtualisation de la donnée, il n’est pas indispensable de comprendre comment fonctionne précisément le stockage, le filesystem. Par exemple, pour créer un data store, il suffit de saisir la commande ‘create datastore’ et de ne plus se poser de questions. »

Et le réseau dans tout ça ?

La virtualisation réseau semble être la grande absente des offres hyperconvergées de ces éditeurs, qui ont surtout intégré serveurs et stockage. Force est de reconnaître que le réseau est également le dernier pan informatique à se normaliser pour le software defined.

« Dans nos datacenters, nous réalisons effectivement nous-mêmes la virtualisation du réseau », concède Frabrice Tétu. « Ce qui apporte aussi l’avantage de se préoccuper en amont des aspects de sécurité. Et si Nutanix ne proposait la virtualisation réseau à l’origine, dans les mois à venir elle sera de plus en plus intégrée de façon systématique. »

« Les acteurs de l’hyperconvergence ont peu pris en compte les aspects de virtualisation réseau », reconnaît Nicolas Millet. « Néanmoins, cela commence à s’intégrer via des API. Cette possibilité n’est qu’un début de réponse à la demande pressante des entreprises. Ainsi, Simplivity était en recul au départ, mais s’investit désormais beaucoup sur ces aspects, ainsi que sur Openstack. »

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