LA CITÉ DES SITES : Le gaz en zig zag

Histoire de gaz à travers les âges et Internet -sans omettre les inévitables « usines à gaz » et autres inconvénients collatéraux

1925: l’électricité n’est pas encore installée dans tous les immeubles (1), la lampe à huile ou à pétrole a disparu et on s’éclaire, pour quelques mois encore, au gaz, au gaz d’éclairage donc, qui donne une lueur faible que l’on remplacera bientôt par des lampes électriques à 25, 40 ou – luxe infini !- à 60 bougies, mot employé alors pour watts. Le gaz né de la distillation de la houille avait guère plus d’un siècle. Lebon avait d’abord distillé le bois, puis Winsor le charbon. L’opération s¹effectuait dans des usines à gaz, édifices lourds et complexes relégués dans la périphérie des villes. Elles ont toutes disparu sauf une, à Nyon, en Suisse, où l’immeuble industriel est devenu salle de spectacle et lieu de festival. Entre temps « usine à gaz » est devenu synonyme de complication. Ainsi on lit dans un dictionnaire dédié à l’informatique : « Dans les années 1950, ce terme désignait un ordinateur, qui occupait en général 500 m2 de surface au sol et pesait 30 tonnes. Désormais, c’est un énorme logiciel contenant des centaines de fonctions pas toujours indispensables et parfois rangées n’importe comment dans les menus. Voir Word. Les progiciels et les intégrés souffrent souvent de ce syndrome.» Ainsi les choses disparaissent, les mots demeurent. Sur une certaine planète… Le gaz a continué longtemps à éclairer les rues des villes. L’allumeur de réverbères fait même partie des préoccupations du Petit Prince. « La cinquième planète,écrit Antoine de Saint-Exupéry, était très curieuse. C’était la plus petite de toutes. Il y avait là juste assez de place pour loger un réverbère et un allumeur de réverbères. Le petit prince ne parvenait pas à s’expliquer à quoi pouvaient servir, quelque part dans le ciel, sur une planète sans maison, ni population, un réverbère et un allumeur de réverbères. Cependant il se dit en lui-même: Peut-être bien que cette homme est absurde. Cependant il est moins absurde que le roi, que le vaniteux, que le businessman et que le buveur. Au moins son travail a-t-il un sens. Quand il allume son réverbère, c’est comme s’il faisait naître une étoile de plus, ou une fleur. Quand il éteint son réverbère ça endort la fleur ou l’étoile. C’est une occupation très jolie. C’est véritablement utile puisque c’est joli.» ( https://galeb.etf.bg.ac.yu/mp/mp/ ) Courteline aussi Dans un registre plus terre à terre, on retrouvera avec bonheur l¹éteigneur de réverbère dans un des chefs d¹oeuvre de Courteline, Le Train de 8 heures 47 . Deux soldats, égarés à Bar-le-Duc, souhaitent trouver le chemin d’une « maison accueillante » et ne trouvent comme Cicerone qu’un brave homme donnant l¹impression de tituber. « Croquebolle et La Guillaumette lui emboîtaient le pas, le flanquaient de droite et de gauche; et ils évoquaient à eux trois l’idée d¹une figure de quadrille, d’un trio de clodoches inquiétant, évoluant vers les becs de gaz plantés au raz des trottoirs avec une rigidité correcte de cavalier seul. » Autre souvenir de réverbère, celui sur lequel Raymond Bussière est juché au début du film L’Assassin habite au 21, de Clouzot; de là il injurie la maréchaussée en la personne de Gabriello. Le gaz n’avait pas que des allumeurs-éteigneurs, il comptait beaucoup de simples employés. Parmi eux André Antoine, qui travaillait au gaz comme le Douanier Rousseau à l’octroi. (Le monde est vraiment petit; relevé en Belgique : « Question orale de Monsieur le Député André ANTOINE à Monsieur le Ministre des Transports, de la Mobilité et de l’Energie au sujet du décret relatif à l’organisation du marché wallon du gaz. » ) André Antoine ouvrit une petite salle à Pigalle passage de l¹Élysée des Beaux-Arts (devenu depuis rue André-Antoine), un peu comme Pascal de Pindray ouvre aujourd’hui Le Saint-Honoré (cie-st-honore.fr.st) et c¹est la révolution en forme de triomphe. Extrait d’un site de la Bibliothèque Nationale https://gallica.bnf.fr/anthologie/notices/00813.htm L’inventeur de la mise en scène moderne « André Antoine (1858-1943), fondateur du Théâtre-Libre à Paris, est considéré comme l’inventeur de la mise en scène moderne. Sur l’étroite scène ouverte le 30 mars 1887, il s’affirme comme le défenseur du théâtre naturaliste. Tout comme Émile Zola (1840-1902) dans le domaine romanesque, il considère le jeu des acteurs, les décors, costumes et lumières dans une perspective réaliste. « Antoine fait dessiner ses programmes par de grands artistes : Ibels, Forain, Vuillard, Signac, Willette, Toulouse-Lautrec. Leurs compositions réalistes, souvent féroces, témoignent de l’atmosphère du Théâtre-Libre, de l’esprit du répertoire et de la liberté du jeu. Les lithographies réalisées par Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901), peintre et caricaturiste du spectacle et du réalisme populaire, sont à cet égard particulièrement expressives. » Nous en reproduisons une et, à cette occasion, nous avons découvert https://udenap.org/tl/toulouse_lautrec.htm. Le site de l’université américaine de Napierville qui propose entre cent autres choses tout simplement l¹intégralité des lithographies de Toulouse-Lautrec. L’homme avait inventé le gaz, il lui restait à le découvrir et, depuis longtemps, on ne fabrique plus le gaz, on l’extrait du sol. Et nous faisons appel au très remarquable site de Gaz de France, https://www.gazdefrance.com/ pour comprendre : « Voici 5 000 ans, les Chinois, intrigués par ces mystérieux flammèches qui sortaient parfois des entrailles de la terre, se prosternaient devant eux et leur rendaient l’hommage qu’on rend aux dieux. « On sait, de façon certaine, que l’emploi du gaz naturel comme combustible remonte à des temps très anciens puisque Aristote (384-322 avant J.-C.) soutenait que les rois de Perse auraient installé leur cuisine dans des endroits où les feux sortaient de la terre. Au VIIe siècle après J.-C., les Japonais sont les premiers à essayer d’exploiter le gaz naturel et le pétrole en creusant de véritables puits. Au XIIe siècle, les puits creusés peuvent atteindre 100 m; ils sont réalisés par un ouvrier descendant au bout d’une corde. En 1610, un chimiste flamand Jan Baptist van Helmont découvre le gaz carbonique et imagine le terme « gaz  » pour définir cet état de la matière. Ce terme vient d’un mot flamand « ghoast » qui signifie « esprit ». En Europe, ces curieuses « fontaines de feu » suscitent beaucoup d’intérêt. En 1618, le docteur Jean Tardin publie Une histoire naturelle de la fontaine qui brûle près de Grenoble (2), avec la recherche de ses causes et de ses principes. Mais, curieusement, personne ne songera à quelques exploitations que ce soit. L’exploitation industrielle du gaz naturel a commencé au début du XIXe siècle aux États-Unis. En 1821, elle s’organise dans une petite ville de l’État de New York, Fredonia. C’est dans ce même État qu’est construit, en 1870, le premier gazoduc en troncs de pins évidés. Il était long de 40 km. En 1998, les États-Unis commercialisent, à eux seuls, 65 milliards de mètres cubes, soit 88% de la production mondiale de gaz naturel. Avec la découverte de gisements européens de gaz naturel, le gaz manufacturé est de plus en plus remplacé en tant qu’énergie. En France, en 1939, le 1er gisement de gaz naturel est découvert à Saint-Marcet, dans les Pyrénées. Douze ans plus tard, on découvre, dans les Pyrénées-Atlantiques, un gisement de gaz naturel à Lacq. Cette date est un tournant pour l’industrie gazière française : on passe du gaz manufacturé au gaz naturel. La dernière usine à gaz ferme ses portes en 1971, à Belfort. Entre 1970 et 2002, la part du gaz naturel dans le bilan énergétique français est passée de 5 % à 14 %.» Le site de Gaz de France est très disert. «70 ans de consommation mondiale sont d’ores et déjà comptabilisés. Et 200 ans de consommation sont prévus grâce à la prospection des nouveaux gisements. La pénurie est bien loin !» Tout de même, deux siècles, c’est peu ! Inodore ou sulfureux? La communication se manifeste par tout moyen. Ainsi des émissions quotidiennes sur le thème de la maison. « gestes d’intérieur ». On peut les revoir toutes en vidéo et les apprécier. Je dois dire que j’ai commencé à m¹intéresser à cette série quand j’ai vu qu’était préconisée une température ambiante de 19°. J’ai imaginé la RATP promouvant une publicité : « Ne prenez plus le métro ni l’autobus, allez à pied !». La publicité télé proprement dite de Gaz de France est très belle mais je trouve bizarre de parler de Dolce vita alors que ce titre cher à Fellini a incontestablement des relents sulfureux. Il est vrai que le gaz naturel est à l¹origine inodore et que l’odeur lui a été adjointe pour identifier les fuites éventuelles. J’ai aussi appris que Gaz de France s’intéressait de très près à l’athlétisme et, en particulier, au Marathon de Paris. La 28e édition du Marathon de Paris se déroulera le 4 avril prochain. À cette occasion, on lit dans le site officiel https://www.parismarathon.com/ cet interview de Joël Lainé, organisateur de l’épreuve. « Le marathon de Paris approche, qu’attendez-vous de cette 28e édition ? Dans un premier temps, cette 28e édition est marquée par un succès en terme d’inscriptions, jamais égalé. Un mois et demi avant la date de l’épreuve, nous affichions complet avec 35 000 inscrits. Depuis maintenant trois semaines, nous sommes contraints de refuser des inscriptions. Ce record montre bien l’engouement que suscite le Marathon de Paris. Maintenant, nous attendons de cette nouvelle édition des résultats sportifs encore meilleurs que l’an passé. Je vous rappelle que le record de l’épreuve a été battu l¹an dernier en 2 heures, 6 minutes et 33 secondes. Et que Benoît Zwierzchiewski, arrivé deuxième, avait égalé la meilleure performance européenne. A noter également que sur les dix meilleures performances mondiales enregistrées sur les différents marathons courus dans le monde, quatre ont été obtenues à Paris. C’est assez formidable pour notre marathon et pour sa réputation sur le plan international. « Justement, on dit désormais que le Marathon de Paris est l¹équivalent de celui de New York ou Londres. Qu¹en pensez-vous ? Sincèrement, je crois que New York et Londres demeurent les deux marathons de référence. Derrière, Chicago, Berlin et Paris se disputent la troisième place. Maintenant, je dois avouer que nous sommes en bonne position. Nous progressons chaque année alors pourquoi pas, dans les années à venir, rivaliser avec New York et Londres. Toutefois, je pense que le Marathon est plus un phénomène anglo-saxon que latin. De ce fait, nous sommes les moins bien placés au niveau de la culture, notamment en terme de spectateurs. On voit régulièrement sur le Marathon de New York près d’un million de spectateurs présents sur le parcours. De notre côté, c’est encore une de nos difficultés. Il est difficile de mobiliser les gens pour encourager les coureurs. Nous comptons de 150 000 à 200 000 spectateurs, ce qui n’est déjà pas si mal, mais nous sommes très loin de l¹engouement populaire que peuvent rencontrer les coureurs sur un marathon comme New York. » J’espère que le très cher ami qui s’arrête pour me saluer devant ma porte vingt minutes après le passage des premiers a pensé à s¹inscrire ! Louis FOURNIER (1) « Gaz à tous les étages» lit-on encore sur de vieilles façades. (2) Il y a pas très loin de Grenoble un village, Saint-André-le-Gaz. Le ‘Gaz’ m’a toujours intrigué et on m’avait dit, dans la région,où l¹on avait sans doute entendu parler de la fontaine qui brûlait, qu’il y avait eu autrefois une poche de gaz à Saint-André, laquelle avait été exploitée. Le petit Lacq du Dauphiné, en quelque sorte ! Voulant en avoir le coeur net, j’ai pris contact avec la mairie de Saint-André qui a bien voulu m’envoyer une documentation écrite en 1942 par Mme Ramasset, institutrice. Eh bien ! De vrai gaz point. Un relais de poste n’était pas loin de la rivière Bourbre mais il n’y avait pas de pont et on traversait par un gué. « Un passeur passait ‘à dos’ femmes et enfants tandis qu’hommes et voitures le passaient allègrement« . Le mot gué s’est corrompu en gas puis en gaz.