Le CEO d’Apple dénonce les DRM

L’hôpital se moque-t-il de la charité? Steve Jobs recommande aux ‘majors’
d’ouvrir le marché

Dans une lettre reprise par la presse britannique, le CEO de Apple, Steve Jobs, conseille aux majors « d’abandonner rapidement les différentes technologies de DRM. »

Le document sobrement intitulé « Reflexions sur la musique » n’est pas signé de Nietszche, mais bien de la main Steve Jobs.

Il s’agit d’une lettre sous forme d’essai quasi philosophique à propos de l’iTunes, et sur l’évolution de la musique en ligne, en particulier en ce qui concerne les fameux DRM empêchant l’utilisateur de faire des copies des titres dont il a payé les droits.

Jobs déclare que son groupe a été obligé de créer un système de DRM pour satisfaire les maisons d’édition partenaires de sa plateforme iTunes Store. Mais pour lui les temps ont changé, et il existe des alternatives. Il écrit ainsi  » Nous pouvons continuer sur ce chemin des DRM, ou proposer la vente de licences pour que d’autres puissent utiliser la technologie FairPlay, ou bien carrément choisir de supprimer la technologie DRM. Apple est plutôt en accord avec cette ultime option, dans la mesure où les DRM sont inefficaces puisqu’elles n’empêchent absolument pas le piratage. »

« Imaginons-nous dans un monde sans DRM, ou les magasins en ligne proposeraient de la musique dans un format ouvert. Dans un tel univers, chaque baladeur serait capable de jouer tous les types de musique et le client pourrait donc acheter de la musique sur toutes les plates-formes. C’est à l’évidence la meilleure solution pour le consommateur. »

À se demander si Steve Jobs ne va pas bientôt s’interroger sur une autre problématique cruciale, à savoir : la culture est-elle un bien marchand comme les autres?

Comme le souligne un analyste de Gartner. « Je trouve qu’il est très intéressant de voir que la compagnie qui a fait les plus extraordinaires profits avec les DRM donne désormais la leçon à l’industrie sur ce ton : Messieurs vous avez créé le problème alors maintenant, merci de nous en débarrasser. »

Ce curieux document trouve certainement sa source dans les nombreuses plaintes en provenance des pays européens contre la plate-forme iTunes (en théorie, l’iPod est le seul baladeur capable de lire les fichiers achetés sur iTunes). Récemment le régulateur norvégien a jugé illégal le programme de la pomme.

« Le problème des DRM a été soulevé par la plupart des pays européens. Les personnes qui sont agacées par cette situation doivent comprendre que les DRM ont été imposées par les majors. Ce sont ces dernières qu’il faut convaincre de vendre des morceaux étiquetés DRM-free. »,explique Jobs.

En clair, Steve Jobs ne veut plus entendre le mot FairPlay. Pourtant, la RIAA semble avoir mal interprété le propos du CEO de la firme de Cupertino puisqu’elle vient de publier un communiqué dans lequel elle se frotte les mains estimant que Steve Jobs venait de proposer de vendre des licences de cette techno. Faire la sourde oreille sur un problème musical, voilà une jolie contradiction.

La confusion de la RIAA semble donc monumentale, car le document est pourtant clair : « Si nous revendons des licences FairPlay nous ne pouvons plus garantir de protection aux quatre géants de l’édition. »

Selon Apple sur presque tous les iPod seulement 3% des morceaux présents sur le baladeur proviennent de iTunes le reste est issu de contenus personnels (copie de CD) ou piraté.

Rappelons que Bill Gates s’est déclaré contre les DRM. Alors que Microsoft use et abuse des DRM, notamment au sein du duo baladeur Zune et plate-forme Zune MarketPlace, le fondateur de la firme estime aujourd’hui que les DRM ne sont pas la bonne solution. En tout cas, en l’état.

« Les contraintes pour le consommateur sont nombreuses. Il y a encore d’énormes problèmes avec les DRM et nous avons besoin de modèles plus flexibles « , a-t-il déclaré lors d’une réunion de blogeurs. Et d’ajouter: « Nous n’avons pas mis en place exactement ce qu’il faut en termes de simplicité ou d’interopérabilité. »

Enfin, certains groupes commencent à comprendre que les DRM pénalisent leurs business. Ainsi Yahoo ou Virgin vendent des morceaux sans DRM. Même s’ils sont encore minoritaires, ils illustrent un changement d’état d’esprit qui finira bien par s’étendre.

D’ailleurs Virginmega s’est félicité de la déclaration de Jobs. « Cette nouvelle prise de position de la part de Steve Jobs est une grande victoire pour l’industrie et pour les consommateurs de musique en ligne« , explique Julien Ulrich, directeur général de la plate-forme. « Après le ralliement de la plupart des producteurs indépendants, les majors seront les derniers acteurs à convaincre de la nécessité de proposer des titres sans verrou« .