Le crowdfounding au service du FTTH en Seine et Marne

Pour finaliser et accélérer le déploiement de la fibre optique jusqu’aux résidences, Covage a mené une expérimentation de pré-commercialisation des raccordements finaux auprès de la population. Avec succès.

Le crowdfunding, on connaissait pour la production de films, le spectacle vivant, la musique, le monde associatif, la recherche scientifique, la création de sociétés privées, bien sûr, voire la presse. Mais l’application du modèle de financement participatif au déploiement de réseaux de communication, on n’avait jamais vu. C’est pourtant en s’appuyant sur ce principe que Covage a assuré le raccordement de la fibre optique résidentielle (FTTH) dans la ville de Chevry-Cossigny en Seine-et-Marne. Une expérimentation menée il y a 3 ans déjà.

Cette commune de 3000 âmes environ pour 1500 foyers, avait été fibrée par la Sem@for77, une filiale de l’opérateur d’infrastructures désignée comme délégation de service public (DSP) dans le cadre du projet de réseaux d’initiative publique (RIP) du département. Si la fibre optique arrive jusque dans la rue, il reste à couvrir les derniers mètres jusqu’aux domiciles des particuliers. C’est la partie raccordement qui est généralement laissée à la charge de l’opérateur final de service. Or, ces derniers mètres coûtent cher à déployer. « Entre 150 euros en ville et 300 à 500 dans les villages, voire plusieurs milliers parfois, indique Pascal Emond (photo), directeur commercial & développement de Covage. C’est une barrière à l’entrée qui peut freiner le déploiement du très haut débit. »

50 euros pour avoir la fibre

Pour palier ce risque, Covage a donc fait appel à la population concernée. « L’idée du crowdfounding est d’intégrer une démarche qui associe les futurs clients du réseau de manière symbolique et par laquelle on arrive à faire prendre conscience de l’importance du projet à la collectivité », indique le responsable. Autrement dit, impliquer la population à manifester son intérêt pour le projet auprès des pouvoirs publics (maire, Conseil Général…) qui se tourneront alors vers les opérateurs de services pour les convaincre de raccorder. Le tout orchestré par l’opérateur d’infrastructure qui sera potentiellement en charge du raccordement final en propre ou en sous-traitance pour un opérateur de service. « Nous coordonnons l’ensemble de la logistique des raccordements », rappelle Pascal Emond. Dans le cas de Chevry-Cossigny, Covage a travaillé avec Orange.

Concrètement, les foyers intéressés pour avoir la fibre optique étaient invités à s’engager en payant 50 euros. « C’est à la fois très bas (en regard du coût total du raccordement, NDLR) et suffisamment élevé pour éviter l’effet d’aubaine, c’est une amorce qui matérialise l’engagement du futur client », explique Pascal Emond. Un effet de levier qui a fonctionné. « Le jour du rendez-vous, il y avait 560 personnes à faire la queue devant la mairie pour déposer leur chèque. » Soit un tiers environ des 1500 foyers de la commune. Suffisant pour intéresser les opérateurs, qui paieront certes la différence, mais pourront s’appuyer sur une base concrète de prospects. « A partir du moment ou on associe les futurs utilisateurs, on est certain qu’il y aura un meilleur retour avec des coût de déploiement moins chers car cela permet de planifier les déploiements pour l’opérateur, et l’élu ou la collectivité a tout de suite la cote d’amour du projet qu’il a lancé. »

Une logique de pré-commercialisation

Plutôt que du crowdfounding; l’expérimentation de Chevry-Cossigny s’inscrit avant tout dans une logique de pré-commercialisation. « Ce n’est effectivement pas un investissement de la part des abonnés, ils n’obtiendront pas un retour sur les recettes », confirme Pascal Emond. C’est avant tout un outil qui permet d’accélérer les déploiements du très haut débit. Car le système s’appuie sur les mêmes outils sociaux que le financement participatif à partir desquels les utilisateurs peuvent voir, sur le web, la courbe des adhésions et créer une dynamique d’incitation. Un modèle adopté notamment en Allemagne ou en Louisiane aux États-Unis où les opérateurs se disent prêts à déployer la fibre à partir de 40% ou 50% de demandes d’une population.

Un modèle vertueux pour le déploiement du très haut débit en France qui ne fait pourtant pas encore école. « Il n’y a pas d’autres projets en cours de pré-raccordement car, dans le cadre des RIP, il faut gérer la multiplicité des opérateurs nationaux et alternatifs de service, explique le porte-parole de Covage. Mais il est plus facile de les fédérer dans un projet de pré-commercialisation. » Un modèle appelé à se développer dans les années à venir alors que la construction des premiers RIP s’achèvent. « On est au tout début du FTTH, 2015 et 2016 devraient constituer les premières vagues pour tester les services de pré-commercialisation et accélérer l’accès à la fibre », conclue Pascal Emond.

Les grandes dates du projet
4 Août 2010 : Lancement de l’appel à projets
7 Décembre 2010 : Projet de Chevry-Cossigny retenu avec 6 autres projets sur le plan national
1er Février 2011 : Réunion d’information
2 Février 2011 : Ouverture des inscriptions au point information
3 Février à 16h30 : 560 demandes enregistrées de raccordement sec
13 Mai 2011 : Fin des inscriptions (soumis à subvention) > 955 demandes enregistrées
18 Mars 2011 : Livraison du NRO
12 juillet 2011 : 1er client activé
15 Octobre 2011 : Inauguration du réseau FTTH de Chevry-Cossigny
1er Décembre 2011 : 100ème client raccordé chez Orange
11 Décembre 2014 : 918 abonnés

 


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