Le jackpot des contenus mobiles

Avec le succès croissant des réseaux mobiles haut débit (3G et Edge), les éditeurs de contenus se frottent les mains. Notamment ceux qui possèdent les plus belles licences. Rencontre avec Jet Multimédia et Wonderphone

Un million d’abonnés Edge et 3G pour Orange, plus de 500.000 clients 3G chez SFR: le haut débit mobile est désormais un succès. Les utilisateurs ont adopté en masse ces technologies qui permettent d’accéder à partir d’un combiné multimédia, à des contenus riches, de télécharger des fichiers, de regarder la télévision ou encore de jouer. Le tout, avec un confort acceptable permis par les nouveaux réseaux des opérateurs.

Très vite, de grandes tendances de consommation se sont dégagées. Il apparaît que le haut débit mobile est plébiscité par les jeunes utilisateurs. Ces derniers consomment en masse des jeux, de la vidéo, de la télévision et bien sûr des contenus multimédias type musique, fond d’écrans, sonneries… Le succès de la 3G ou de l’Edge remplit les poches des opérateurs mobiles mais surtout des éditeurs dont les contenus sont de plus en plus consommés. Et pour certains d’entre eux, l’aventure tourne au jackpot. C’est le cas de Jet Multimédia, spécialiste du multimédia en ligne depuis 1989. Après avoir fait ses armes sur le Minitel, l’entreprise, filiale à 57% de Neuf Cegetel, s’est très vite tournée vers l’eldorado du mobile. Sonneries, fonds d’écran, musique s’écoulent comme des petits pains: le groupe réalise 31 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2005. Mais pour se démarquer, Jet a vite compris qu’il fallait nouer d’étroites relations avec les diffuseurs et les producteurs afin de proposer des marques fortes, qui pousseront les jeunes à consommer ces services surtaxés. Jet Multimédia s’est donc allié avec eTF1 (groupe TF1) pour créer TJM, une co-entreprise à part égale entre les deux groupes. « Celà faisait longtemps que nous discutions de ce projet de rapprochement », nous explique Manuel Cruz, président du Directoire de Jet Multimédia. « Désormais, c’est le moment de se lancer. L’objectif est de devenir un acteur de premier plan sur ce marché ». Juste équilibre Au-delà de la force de frappe et des moyens des deux groupes, il s’agit d’abord et avant tout de faire fructifier des licences porteuses. Les services issus de programmes TV forts, comme la Star Academy par exemple, ou de groupes de musique et d’artistes, sont les plus consommés par les clients. « L’acquisition de licences est un atout important », résume Manuel Cruz. C’est un euphémisme. Car la demande de contenus à valeur ajoutée ne cesse d’augmenter et les opérateurs qui proposeront des marques connues feront la différence. « La musique et notamment les sonneries représente encore 60 à 70% de notre business. Mais les contenus liés à la télévision constituent une attente très forte, il faut avoir une approche spécifique. Par ailleurs, l’exigence de qualité progresse d’année en année », explique le CEO. Si ces licences sont chères, elles sont pour autant indispensables. « La licence est un produit d’appel qui permet de vendre d’autres produits et donc de faire tourner l’entreprise », poursuit-il. « Le tout est de trouver un juste équilibre entre les licences fortes et la production de contenus ». Mais la licence n’est pas le seul moyen pour attirer le jeune consommateur. Chez Wonderphone, agrégateur et producteur de contenus pour mobiles (15 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2005 contre 6 millions un an plus tôt), on mise aussi sur la personnalisation. Personnalisation des contenus « On observe une véritable explosion de la demande de vidéos et de la musique », souligne Philipp Plaisance, p-dg de Wonderphone. « Mais si la télévision classique est un média de masse linéaire, le mobile relève d’un autre logique. Sa consommation est en fait une juxtaposition de communautés, de tribus ». « On cherche donc à personnaliser le plus possible nos contenus, à créer des communautés d’utilisateurs qui se réunissent autour de pôles d’intérêts, ce que ne sait pas faire la télévision classique », explique-t-il. Comme pour la télévision par ADSL, il s’agit de transformer le mobile en média personnel dont l’usage est plébiscité par les 11-25 ans. « En Europe, l’audience TV des 15-25 ans a été divisée par deux », rappelle le p-dg. Avec l’émergence de ces contenus à valeur ajoutée, se pose à nouveau la question du partage des revenus entre opérateurs et éditeurs. Les premiers sont accusés d’avoir voulu très longtemps tirer la couverture vers eux. « Il a fallu du temps pour faire évoluer les opérateurs », regrette Manuel Cruz. « Mais les choses s’améliorent ». « On arrive à trouver des modèles gagnant-gagnant », déclare de son côté Philipp Plaisance. Mais si actuellement, la plupart de ces contenus sont facturés à l’acte, l’avenir est au forfait. Ce qui risque de compliquer les relations entre opérateurs et éditeurs. Car dans le même temps, les contenus devront encore s’enrichir, notamment avec l’émergence des nouveaux réseaux haut débit mobile comme le HSDPA qui pointe le bout de son nez en Europe, et notamment en France.