Le Sénat adopte et encadre la loi Hadopi

Adopté à une large majorité, le texte maintient le principe de la coupure de l’accès en cas de récidive

C’est fait. Le sénateurs ont adopté ce jeudi soir la fameuse loi Création et Internet ou Hadopi censée lutter contre les effets pervers du piratage des oeuvres culturelles. Le texte a été adopté à une très large majorité, seul le Parti communiste s’est abstenu, le PS qui avait pourtant raillé le projet de loi s’est finalement rangé derrière le texte de Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication.

L’esprit initial du texte, la fameuse riposte graduée, a été préservé. En cas de téléchargement illégal, les internautes recevront d’abord des messages d’avertissement par mail et par lettre recommandée, avant de se voir couper leur accès Internet en cas de récidive sauf s’il accepte une transaction.

Avant le vote, la commission des Affaires économiques du Sénat avait déposé un amendement proposant de remplacer la coupure d’accès par une amende. Une proposition finalement repoussée. Pour la sénatrice UMP Sophie Joissains, l’amende pénaliserait « inégalement les parents, selon leurs moyens financiers et serait d’autant plus regrettable que le système a fait ses preuves aux États-Unis et au Canada où 90 % des contrevenants rentrent dans le droit chemin au deuxième avertissement. »

Ce sera la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l’internet (Hadopi) qui sera chargée d’appliquer les sanctions. Sa mise en place était prévue pour le 1er janvier 2009 et son budget devrait avoisiner les 15 millions d’euros. Elle agira donc en dehors de toute procédure juridique…

Catherine Procaccia (UMP), Michel Magras, ou Joëlle Garriaud-Meylan (UMP) se sont dits au contraire persuadés « que l’amende serait bien plus efficace »que la suspension de l’abonnement internet.

Face aux critiques liées à la sanction suprême, la coupure pure et simple de l’accès, les sénateurs ont adopté un amendement qui introduit la possibilité d’une suspension partielle de l’abonnement en laissant certains services comme la messagerie, à l’internaute. La baisse du débit pourra être appliquée, si elle est faisable techniquement.

Dans les zones non dégroupées, où couper l’Internet revient à couper aussi le téléphone (1,2 million de foyers), l’accès ne sera pas suspendu mais l’internaute devra prouver qu’il utilise un outil pour empêcher tout téléchargement illégal… Quel outil, comment le vérifier, devra-t-on installer un mouchard ? La loi ne le précise pas.

Afin d’éviter les abus ou les contentieux, les sénateurs ont également voulu bien encadrer le périmètre de l’Autorité.

Enfin, pour les entreprises et les établissements collectifs, le texte prévoit une mesure alternative. Ces entités devront installer des « pare-feux » pour empêcher les salariés ou les utilisateurs de pratiquer le téléchargement illégal depuis leur poste.

Frappé par une procédure d’urgence, le texte va maintenant être examiné par les députés. Le projet de loi ne sera débattu qu’une seule fois par Chambre. En cas de désaccord, le texte ira en Commission mixte paritaire. Mais malgré cette procédure d’urgence, le projet pourrait être examiné par le Conseil constitutionnel. L’Europe pourrait également avoir son mot à dire puisque le Paquet Télécom inclut un amendement qui rejette le principe de riposte graduée…

A lire : TRIBUNE: la loi Hadopi, un échec annoncé ?