Leclerc va-t-il agiter le marché du mobile ?

Le géant de la distribution n’est pas MVNO mais lance avec Afone une offre tarifaire dégressive plutôt originale. Il vise 100.000 lignes actives en un mois et envisage de se lancer dans l’ADSL

Après Auchan et Carrefour, le troisième géant de la grande distribution en France se jette à son tour dans le bain de la téléphonie mobile. Comme ses concurrents, Leclerc ne vient pas pour faire de la figuration, et le groupe tient à agiter le marché, tout comme il l’a fait dans les produits pétroliers par exemple.

Pour autant, Leclerc se lance un peu tard sur un marché déjà bien encombré et où la concurrence est rude. « Nous ne sommes les pionniers de la distribution dans le mobile car il n’y a pas de prime au premier entrant », explique Michel Edouard Leclerc. « Il nous fallait un concept, une idée forte et flexible pour s’adapter au marché. Nous avons pris notre temps, quand on s’appelle Leclerc, on ne peut pas décevoir », explique-t-il.

En effet, le groupe se démarque dès le départ en ayant fait le choix de ne pas être MVNO (opérateur mobile virtuel) comme ses concurrents Auchan et Carrefour.« Nous avons voulu minimiser les contraintes », explique le patron du groupe. Du coup, Leclerc a opté pour un accord avec Afone, opérateur fixe-mobile-internet, bien connu du monde de l’entreprise et lui même MVNO de SFR. Ce partenariat prend la forme d’une société commune à parts égales baptisée Metaphone, c’est cette structure qui commercialisera les offres mobiles. On notera cependant que SFR se retrouve indirectement opérateur hôte de deux géants de la distribution : Carrefour et Leclerc…

Ne pas être MVNO répond également aux objectifs tarifaires de Leclerc qui ne voulait pas être prisonnier de tarifs de gros trop contraignants. Pour autant, même à travers le partenariat avec Afone, ces contraintes existent. C’est sur ce point que le groupe a trouvé une astuce assez originale.

« Comme on ne peut pas négocier le prix de gros de la minute de communication avec l’opérateur hôte, nous avons décidé de contourner le problème », explique Michel Edouard Leclerc.

L’offre qui sera lancée début décembre est dont le nom est E.Leclerc Mobile joue la carte des remises différées. Explications. Il s’agit donc d’une offre prépayée (cartes en libre-service rechargeables en ligne ou par téléphone) proposant un coût de 0,39 euros la minute, soit un tarif identique à celui pratiqué par les distributeurs concurrents.

Mais après chaque demi-heure de communication, le compte de l’utilisateur est crédité en euros. Conséquence, après une heure de communication, la minute passe à 0,30 euros, après deux heures, elle passe à 0,20 euros et enfin au bout de 2h30 de communication, la minute revient à 0,10 euros, le tarif plancher proposé par Leclerc.

Deux heures de communications mensuelles (en France métropolitaine) reviennent ainsi à 33 euros (au lieu de 46,80 sur la base du tarif de base), trois heures à 40,50 euros.

« Ce tarif dégressif mensuel permet de proposer les prix les plus bas du marché : plus on téléphone, plus ça baisse. C’est en fait une remise différée, une idée que nous avons d’ailleurs breveté », s’enthousiasme le patron du géant. « Nous avons voulu combiner les avantages du pré-payé et de l’abonnement sans leurs inconvénients ».

Pré-payées, les offres n’impliquent aucun engagement minimum, les recharges sont valables 12 mois et fonctionnent avec n’importe quel mobile deSIMlocké. Une gamme de 9 mobiles à partir de 1 euros est également proposé, le tout sous forme de produits en libre service sous blister. La portabilité est évidemment possible et le SMS est facturé 0,09 euros.

Avec cette approche originale basée sur des tarifs dégressifs et lowcost, Leclerc estime qu’il dispose d’une arme de poids pour s’imposer sur le marché. Mais il compte surtout sur son réseau (plus de 500 magasins) pour soutenir son offensive.« Nous visons 100.000 lignes actives dans le premier mois de lancement », confie Michel Edouard Leclerc. Et d’ajouter : « nous lançons la bataille des prix sur le marché, les autres concurrents vont être obligés de réagir ».

Objectif ambitieux surtout lorsqu’on connaît les difficultés actuelles d’Auchan et Carrefour sur le marché des MVNO. Ces deux groupes qui visaient lors de leurs lancements les premières places du podium seraient encore loin du compte… La faute aux opérateurs traditionnels qui captent leurs clients avec des durées d’engagement de 24 mois. A fin 2006, seuls 25% des abonnés français pouvaient changer d’opérateur, s’agace Leclerc.

Surtout, le groupe ne va pas s’arrêter là. « Nous voulons proposer de la convergence, c’est le facteur clé de la réussite », poursuit le patron. Avec Afone, Leclerc entend proposer de l’Internet mobile mais surtout de l’Internet fixe haut débit, Afone étant partenaire de Completel dont le réseau DSL est déjà utilisé par… Darty.

Hasard subtil, A-Mobile, le MVNO d’Auchan vient juste d’annoncer qu’il propose désormais l’Internet mobile avec carte SIM et clés USB à brancher sur son laptop. L’offre prépayée Hyper@ qui englobe la carte, la clé, cinq heures de connexion limitées à 50 Mo de data est proposée à 99,90 euros.

« Nous n’avons pas vocation à vendre l’iPhone » L’affaire avait fait grand bruit. Un magasin Leclerc a mis en vente en octobre le mobile iPhone d’Apple (à 999 euros…), débloqué alors qu’Orange possède l’exclusivité de la distribution. L’opérateur a d’ailleurs menacé de poursuivre le distributeur. Cette vente avait-elle été préparée ? S’agissait-il d’un coup ?« Pas du tout », répond Michel Edouard Leclerc. « Il s’agit d’une initiative prise par un chef de rayon, je n’étais au courant de rien et d’ailleurs, aucun iPhone n’a été vendu. Je le répète : nous n’avons pas vocation à distribuer ce terminal »… Fin de la polémique ?