L'effet Raman au service des liaisons optiques longue distance

Des représentants des sociétés Agarik et Ekinops expliquent ce qu’est l’effet Raman et ce qu’il permet de réaliser dans les très haut débits

Les communications grande distance sont un sujet critique lors de la définition d’une architecture réseau. Dans le domaine des liaisons optiques, des répétiteurs sont nécessaires tous les 80 km. Pour les opérateurs réseau, c’est un problème épineux. De fait, pour mettre en place ces répétiteurs, il faut louer des espaces situés entre les centres informatiques. Un important coût mensuel vient ainsi se greffer à l’investissement de départ.

Ceci explique pourquoi le prix du Mbps est souvent 10 fois plus important en province qu’en région parisienne. « L’irrigation locale » à moindre coût est donc essentielle ; elle suppose une réduction du prix de transport de l’information.

Agarik est une filiale de Bull, spécialisée dans l’hébergement virtualisé et la gestion d’infrastructures web critiques. Ekinops est un équipementier télécom français à la croissance fulgurante (4x en 2007 et 3x prévus en 2008). En début d’année, les deux compagnies ont lancé la plus grande liaison optique de l’hexagone. Elle relie les centres de stockage d’Agarik de Saint-Ouen (93) et de Trélazé (49), soit une distance de plus de 400 km. La plate-forme Ekinops 360 a été choisie.

Le tout s’effectue avec un seul point intermédiaire et sur trois canaux de 2,5 Gbps. Normalement il aurait fallu un répétiteur tous les 80 km. Le secret réside dans l’amplification optique à effet Raman.

François-Xavier Ollivier, directeur des opérations et co-fondateur de la société Ekinops et Laurent Seror, directeur des opérations et fondateur de la société Agarik apportent quelques explications.

Vous avez dit Raman ?

L’effet Raman est d’ores et déjà utilisé pour les liaisons optiques sous-marines. Son usage pour des liaisons terrestres est cependant peu répandu.

La fibre transporte le signal sur une certaine longueur d’onde. Avec la distance, ce signal se « dilue ». Mais il n’est pas perdu. En fait, nous le retrouvons dans le flux utile au transport des informations. L’amplification Raman récupère ou « pompe » ce signal. Dans la pratique, la distance de transfert (sans répétiteur) peut ainsi être portée à près de 250 km.

Curieusement (mais logiquement) l’effet Raman est plus efficace à partir d’une certaine distance. En effet, avec une courte longueur de fibre optique, le train d’ondes de base n’a pas le temps de perdre sa puissance et l’effet Raman ne retrouvera rien dans le signal de transport.

Pour François-Xavier Ollivier les amplificateurs optiques à effet Raman ont plusieurs utilisations : « Ils permettent d’augmenter les distances de liaison sans multiplier le nombre de répétiteurs. Mais ils peuvent également être utilisés pour augmenter le nombre de canaux et le débit des liens optiques. »

Une explosion de technologies

La prochaine étape pour la liaison optique Saint-Ouen / Trélazé sera le passage à quatre liens de 10 Gbps.

Agarik compte également appliquer cette recette à d’autres centres de données installés en province (toujours avec Ekinops). Laurent Seror se montre aussi intéressé par les possibilités de multiplexage de différents liens 1 Gbps sur une unique liaison 10 Gbps. « C’est une technique très intéressante pour les clients qui souhaitent disposer d’un lien 1 Gbps dédié au meilleur prix ».

Pour Ekinops, le but est maintenant de démocratiser les liaisons classiques dont la portée sera de 100 à 120 km (contre 80 km aujourd’hui). La hausse des débits est aussi un sujet d’importance pour la compagnie. Le 40 Gbps est d’actualité, le 100 Gbps étant en ligne de mire. Tout ceci sera nécessaire pour le transport de vidéos au format HD, un marché en pleine expansion.

La société travaille enfin sur des amplificateurs hybrides qui combineront le très faible niveau de bruit des solutions Raman et la forte puissance des techniques classiques. Elle souhaite également proposer un ROADM à 10 Gbps. Une avancée intéressante.