Télécoms : les opérateurs n’échapperont pas au marché unique européen

Neelie Kroes Europe

Les opérateurs jouent de leur influence pour tenter d’obtenir une révision du prochain paquet télécoms européen. Au coeur des débats : la fin des frais d’itinérance et la neutralité du Net.

Les critiques s’intensifient à l’encontre du paquet « continent connecté » adopté le mois dernier par la Commission européenne. Réunis à Bruxelles mardi 8 octobre lors du FT-ETNO Summit 2013, les dirigeants des principaux opérateurs du continent se sont opposés au projet porté par la vice-présidente de la Commission Neelie Kroes chargée de l’agenda numérique.

Ses opposants estiment que les mesures destinées à réformer et harmoniser le marché européen des télécommunications, en particulier la fin des frais d’itinérance, leur coûteraient cher et freineraient l’investissement dans les réseaux de nouvelle génération, 4G et fibre optique.

Un manque à gagner sans contrepartie pour les opérateurs ?

La fin des frais d’itinérance souhaitée par Bruxelles coûterait aux opérateurs 7 milliards d’euros d’ici 2020, d’après le lobby européen des télécoms ETNO (European Telecommunications Network Operators’ Association). « Je ne vois pas quelle est la nécessité de donner à un malade un mauvais remède », si ce n’est pour « qu’il meurt », a déclaré lors du forum le PDG d’Orange Stéphane Richard.

Ce point de vue est partagé par Philipp Humm. Pour le directeur général Europe du groupe britannique Vodafone, « il y a très peu de choses dans la proposition qui nous permettent de mener à bien la consolidation et d’atteindre la croissance ».

Outre la fin des frais d’itinérance pour 2014 sur les appels mobiles entrants lors de déplacements dans l’UE, la proposition inclut des mesures relatives aux investissements transfrontaliers des opérateurs, à l’assignation des radiofréquences et à la neutralité du Net.

En matière de neutralité, il est prévu d’interdire « le blocage de contenu », mais de permettre la fourniture de « services spécialisés » à qualité de service garantie. Ouvrant la porte à un Internet à plusieurs vitesses, cette mesure fait hurler les associations d’utilisateurs et les défenseurs des libertés. À l’inverse, elle est considérée par les opérateurs comme l’une des « dispositions positives » du paquet…

Les régulateurs des 28 pays membres de l’UE réunis au sein de l’ORECE (BEREC en anglais), partagent « les objectifs généraux » de la Commission. En revanche, ils estiment que l’initiative « trop rapide » de Bruxelles fait peu de cas des interrogations des acteurs du marché.  Pour l’ORECE, il faut estimer clairement l’impact de la proposition sur l’innovation, la protection des consommateurs et l’investissement.

« Un marché unique des télécoms pour l’Europe »

Malgré les critiques des industriels comme des consommateurs, Neelie Kroes a réaffirmé l’urgence du marché unique lors du Sommet organisé par l’ETNO et le Financial Times autour de la thématique : « Un marché des télécommunications unique pour l’Europe ? »

« Éliminer les obstacles est bon pour le secteur, mais on ne peut le faire sans éliminer les frais d’itinérance, sans supprimer les majorations sur les appels fixes et mobiles passés vers d’autres États membres, sans règles cohérentes sur la neutralité du Net », a déclaré la vice-présidente de la Commission en charge du numérique.

« Je pense que la filière profitera à terme de ce paquet, a insisté Mme Kroes. Mais ce n’est pas pour cela que je le fais. Je le fais pour la croissance et l’emploi en Europe : c’est 1% de PIB que nous pourrons gagner avec un véritable marché unique des télécoms. »

Priorité de fin de mandat pour Neelie Kroes, le paquet législatif relatif à la création d’un « continent connecté » doit recevoir l’aval du Parlement et du Conseil de l’UE pour entrer en vigueur. Le texte fera l’objet de nouveaux débats lors du Conseil européen sur le numérique les 24 et 25 octobre prochains.


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