Tous les logiciels de l’administration en Open Source ? Oui, mais c’est en Bulgarie

La Bulgarie impose l’Open Source pour le développement des logiciels de son administration. Et va créer un répertoire unique. Une démarche qui va plus loin que les autres initiatives prises en Europe. Y compris en France.

Tous les logiciels écrits pour l’administration bulgare vont être automatiquement placés en Open Source et versés dans un répertoire public. Adoptée par le parlement de ce pays dans le cadre d’un texte de loi sur le gouvernement électronique, la mesure prévoit la publication des codes source de tout logiciel développé pour l’administration. La décision s’étend aux interfaces et au design des bases de données. Une nouvelle agence gouvernementale sera chargée de la mise en application de cette législation et de la création d’un répertoire commun (sur le modèle de GitHub).

« Cela ne signifie pas que le pays entier va adopter Linux et LibreOffice, ni que le gouvernement demande à Microsoft et Oracle de libérer le code source de leurs produits […]. Mais cela signifie que tout logiciel spécifique développé pour le gouvernement sera accessible par quiconque, explique, dans un billet de de blog, Bozhidar Bozhanov, qui conseille le gouvernement bulgare sur ces sujets depuis un an. Après tout, ces développements sont payés par les contribuables ; ces derniers doivent donc être en mesure d’y accéder, voire d’en profiter ».

« Imposer l’Open Source par la loi »

Le consultant précise que cette décision vise à détecter les vulnérabilités logicielles dans les sites ou logiciels du gouvernement, des vulnérabilités laissées parfois béantes une fois les contrats de support avec les prestataires terminés, ou à mettre au jour de mauvaises pratiques de sécurité. En plus des bénéfices supposés sur ce terrain, la démarche pourrait aussi amener une certaine transparence entre administrations et faciliter les réutilisations d’applications. « J’espère que d’autres suivront notre approche assez radicale, utilisant le recours à la loi pour imposer la publication en Open Source », ajoute Bozhidar Bozhanov.

En France, le sujet de l’accès aux codes source a été au centre de débats juridiques, impliquant en particulier Bercy et l’Education nationale. Saisie par un étudiant menant des recherches sur la fiscalité, la Cada (Commission d’accès aux documents administratifs) a estimé début 2015 que le code source du logiciel simulant le calcul de l’impôt s’apparentait à un document administratif et devait être communiqué à toute personne en faisant la demande. Malgré la mauvaise volonté affichée par la DGFiP, cet avis a depuis été confirmé par le tribunal administratif de Paris.

France : le code source communicable

Côté Education nationale, les tensions se cristallisent autour du système d’Admission post-bac (APB), qui tente de faire coïncider les vœux de près de 800 000 élèves de terminale et étudiants en réorientation avec les places disponibles dans plus de 12 000 formations du supérieur. Réclamant davantage de transparence, l’association Droits des lycéens demande depuis des mois « la communication du code source de l’algorithme de l’APB, des textes l’encadrant et des critères paramétrables par les universités ». Là encore, la Cada doit se prononcer sur ce dossier que le ministère a tenté de déminer en publiant quelques informations relatives au fonctionnement de l’algorithme APB, mais pas son code source à proprement parler.

Tout récemment, la Commission mixte paritaire (CMP) qui se réunissait sur le projet de loi République numérique s’est prononcée pour la généralisation de l’accès aux codes source des logiciels de l’administration, au titre de la loi Cada. Tout usager en faisant la demande pourra donc accéder à ces données. Le dispositif n’a toutefois pas le caractère automatique de la démarche bulgare, qui impose l’Open Source d’entrée et centralise les codes sources sur un GitHub gouvernement. Par ailleurs, dans sa dernière version issue de la CMP, le projet de loi République numérique prévoit une exception à la communication des codes source en cas de risque de sécurité pour les systèmes d’information des administrations.

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