Navette Discovery : la NASA sur la sellette

La mission Discovery en rotation dans l’espace est-elle compromise ? La controverse s’installe: l’Agence spatiale américaine pouvait-elle éviter les débris qui ont entraîné la destruction de Columbia et menacent aujourd’hui Discorery ?

A l’origine de la polémique, la même cause qui en février 2003 a abouti à l’explosion en vol de la navette spatiale Columbia : des débris d’isolant qui se détachent du réservoir auxiliaire et génèrent des trous dans les tuiles thermiques qui protègent la navette.

Cet isolant, une mousse, sert à protéger la navette des froids extrêmes produits par l’oxygène et l’hydrogène liquide que contient le réservoir. En 2003, c’est un morceau d’un mètre qui est venu trouer l’aile de Columbia. Sur Discorery, un débris d’environ 400g de la même mousse isolante qui s’est détaché du réservoir a heurté le bouclier thermique de la navette. Cette mousse subit des conditions extrêmes, à vitesse supersonique: le dessus fond du fait de la chaleur, mais le dessous reste très fragile par le froid extrême du carburant. Sans oublier les vibrations et la pression. Ces débris ont toujours existé, mais la technologie, en particulier les caméras embarquées, permettent aujourd’hui de les visualiser. La commission d’enquête sur le drame de Columbia est arrivée à la conclusion que ces débris sont inévitables ! Une conclusion qui est loin de satisfaire tout le monde. Et d’abord les proches des victimes de Columbia, qui ne comprennent pas pourquoi si le défaut a été confirmé, il n’est toujours pas évité. Plus grave encore, d’anciens techniciens de la NASA mettent en cause, dans un article paru dans le New York Times, l’attitude de l’agence, l’accusant de prendre de mauvaises décisions, de rater certaines occasions et de faire des évaluations douteuses. Des accusations graves que les imprécisions dans la communication de l’agence ne font qu’accentuer. Ainsi reconnaît-on plus ou moins officiellement que les critiques sont plus ou moins justifiées. William W. Parsons, responsable de programme à la NASA, n’a-t-il pas déclaré le 24 juin « Nous sommes prêts à décoller« , pour avouer le 28 juillet que « Nous nous sommes trompés » ? Et l’affaire rebondit à moins quelques jours de la fin de la mission, avec la découverte de deux protubérances d’excès de joints entre des tuiles thermiques sur le ventre de la navette. Elles pourraient entraîner une nouvelle sortie dans l’espace de deux astronautes pour colmater la brèche qu’elles révèlent entre deux briques. Pour certains techniciens qui critiquent la NASA, ce type d’erreur aurait dû être évitée par le programme de modification de la navette, qui a tout de même coûté la bagatelle d’un milliard de dollars. Renforcer la mousse en y incorporant des fibres par exemple. Un programme qui cependant n’a abouti qu’à la réduction de la taille des débris ! Alors, le retour de la mission est-il compromis ? La NASA rappelle que tout vecteur spatial se dégrade au décollage, et que les bilans de santé du bouclier thermique ont révélé que 90% de ce dernier est en bon état. Et puis, nous sommes toujours en matière d’espace dans les limites de l’exploration, ce qui comporte des risques inévitables. Une question demeure et interpelle les observateurs, cependant? Le silence de l’Agence spatiale canadienne et de Boeing, la première étant chargée de superviser les travaux de construction du réservoir externe par le second ! Après le transfert de 15 tonnes d’équipements dans la station ISS à laquelle la navette s’est amarrée, et l’évacuation de 13 tonnes de déchets de ladite station, Discovery doit terminer sa mission avec un retour le 8 août. Chacun retiendra son souffle, les membres de la NASA et les proches de l’équipage plus que tout autre !