Neutralité du Net: les critiques pleuvent sur la proposition de Google et Verizon

L’exclusion de l’Internet mobile et l’idée d’une régulation «raisonnable» du réseau par les opérateurs défendus par Verizon et Google s’attirent les foudres des citoyens aux Etats-Unis.

« il n’ya aucune raison juridique ou politique valable pour exclure l’accès sans fil à large bande de la [loi sur les communications électroniques]. » Dans un long argumentaire, l’organisme américain de défense des droits citoyens dans la société numérique Public Knowledge conteste les récentes suggestions de Google et Verizon Wireless sur la question de neutralité du Net.

Après avoir infirmé des rumeurs sur des accords commerciaux de gestion de trafic entre les deux entreprises, Google et Verizon déposaient, en début de semaine, une «proposition de cadre législatif» qui a eu le mérite de relancer le débat. Ils y suggéraient notamment que le libre accès à l’Internet fixe devait être régulé par la Federal Communication Commission (FCC) aux Etats-Unis tout en laissant aux opérateurs la possibilité de commercialiser des services premium.

Mais surtout, les deux partenaires proposent d’exclure l’Internet mobile du champ de la régulation, arguant de la naissance du marché. Que Google distribue aujourd’hui 200.000 système Android quotidiennement et a pris la tête des plates-formes mobiles dans son pays au deuxième trimestre n’a évidemment rien à voir avec cette vision de la régulation. Et c’est bien cette volonté d’exclusion qui inquiète.

La neutralité du Net seulement pour une partie de l’Internet

Public Knowledge est notamment soutenu par SavetheInternet.com (qui regoupe MoveOn.Org Civic Action, Credo Action, the Progressive Change Campaign Committee, ColorofChange.org and Free Press). Dans un communiqué du 9 août, la coalition déclare que Google et Verizon « promettent la neutralité du Net seulement pour une partie de l’Internet, celle dans laquelle ils cessent d’investir. Mais ils ouvrent aussi la voix à un nouvel Internet à partir de fibre optique et sans fil ou la neutralité du Net ne s’appliquerait pas et les entreprises pourraient choisir les sites auxquels les utilisateurs pourraient accéder depuis leur téléphone ou tout autre terminal Internet utilisant ces réseaux ».

La proposition de Google et Verizon a également agacé l’ Electronic Frontier Foundation qui tique notamment sur l’ambiguité contenue autour de l’idée d’une gestion «raisonnable» du réseau par les opérateurs et l’exclusion de l’Internet sans fil. Et on ne peut pas dire qu’elle enchante particulièrement la FCC, directement concernée, qui juge « inacceptable » tout accord commercial qui ne respecterait pas la liberté et l’ouverture d’Internet pour ses utilisateurs.

Facebook entre dans la danse

Les organismes associatifs ou d’Etat ne sont pas les seuls à faire entendre leur voix. Facebook aussi. Le premier réseau social au monde est sorti de sa réserve. Sur Mashable.com (mais bizarrement on ne trouve aucune communication officielle sur son propre site), Facebook entend continuer « à soutenir les principes de la neutralité du net à la fois pour les réseaux filaires et sans-fil. Préserver un Internet ouvert et accessible pour les innovateurs -indépendamment de leur taille ou de leur richesse- servira à promouvoir un marché dynamique et concurrentiel, où les consommateurs ont le contrôle final sur les contenus et les services délivrés à travers leur connexion Internet ».

Sans directement les nommer, Facebook n’en prend donc bien au projet de Google et Verizon. On peut cependant s’interroger sur l’objectivité du réseau social depuis que Google multiplie les incursions sur le marché des plates-formes sociales.

En France, la situation est beaucoup plus calme, la période estivale y aidant. Le Parlement devrait se pencher sur la question de la neutralité du Net à la rentrée. Il s’appuiera notamment sur le rapport du secrétariat d’Etat à la Prospective et au développement de l’économie numérique publié fin juin suite à la consultation publique. Il en ressortait que si les différents acteurs s’accordent dans l’ensemble à vouloir préserver un Internet ouvert, ils divergent sur la question de l’équité économique face aux usages. Au niveau européen, la Commission doit éditer un livre blanc sur la question pour l’automne.