Numericable-SFR met fin aux augmentations de salaires

La CFDT lance une pétition en ligne pour dénoncer l’absence d’augmentation salariale, générale comme individuelle, chez SFR. Et dénonce les pratiques RH du nouveau propriétaire du second opérateur mobile hexagonal.

Les esprits commencent à s’échauffer chez Numericable-SFR. A la CFDT, du moins. Le syndicat a lancé, jeudi 19 février, une pétition en ligne pour revendiquer des augmentations de salaires individuelles. Adressée au directeur général du groupe Eric Denoyer, la pétition vise, en réalité, plus à alerter sur la situation de l’entreprise.

Eviter les débrayages

Un procédé pour le moins original. « On cherchait quelque chose de différent aux débrayages », explique Olivier Lelong, délégué syndical CFDT pour SFR. Le porte-parole s’alarme d’une situation « où personne ne comprend plus rien ». Depuis l’acquisition de SFR par Numericable, les équipes sont dirigées selon une logique purement économique par les nouveaux propriétaires issus du sérail d’Altice, la holding de Patrick Drahi propriétaire à 60% de Numericable-SFR (et bientôt 80% peut-être) qui, dès leur arrivée chez SFR, ont coupé tous les projets et où toute dépense, même la plus petite, doit être validée par le comité d’investissement. A des niveaux qui dépassent parfois l’entendement. « On a failli se faire couper l’eau trois fois parce qu’on ne payait pas la facture », illustre Olivier Lelong. Qui ajoute que : « ces derniers temps, c’est la course pour trouver du papier A4, faute de renouvellement des commandes ».

Et le refus net de la direction de procéder à des revalorisations salariales va dans le même sens. « On est habitué à l’absence d’augmentation générale mais, cette année, il n’y aura pas d’augmentation individuelle non plus, alors que 2014 a été une année très agitée, souligne Olivier Lelong. Le message de la direction tel qu’on le perçoit est que le salarié coûte trop cher. Pourtant, même s’ils sont en baisse, les résultats de SFR ne sont pas catastrophiques. » En attendant que le groupe publie ses résultats annuels prochainement, la CFDT souligne, dans un tract non encore édité en ligne (mais reproduit en fin d’article), que le cours de l’action Numericable-SFR aura augmenté de 60% en un an et celui d’Altice de 160%. Comme quoi, il y a bien des tendances à la hausse dans le nouvel ensemble.

2000 prestataires éjectés

Selon le syndicat, ce climat rejaillit sur le moral des équipes. « Le ras-le-bol s’installe, les gens n’ont plus les moyens de travailler », estime le porte-parole de la CFDT. En cause, les méthodes d’Altice sur le projet de réorganisation de la DSI, notamment. Lequel vise à réinternaliser nombre de tâches jusqu’alors assurées par des prestataires extérieurs. Plusieurs sociétés ont été victimes de cette politique. Dont, BT qui assurait le service d’exploitation réseau, aujourd’hui repris par Telindus (l’intégrateur racheté en 2014 par SFR). Au total, environ 2 000 salariés en prestations techniques extérieures auraient disparu du jour au lendemain des murs de Numericable-SFR.

« On supprime des postes, on en crée d’autres en attribuant des activités que les salariés ne connaissent pas forcément, s’agace Olivier Lelong. Sur le principe, on est d’accord [pour réinternaliser la chaîne des prestations], mais pas sur la façon de faire : on ne commence pas par supprimer les sous-traitants avant de savoir comment les remplacer. » Une façon de mettre la charrue avant les bœufs qui risquent de mettre en danger la maintenance et le développement du réseau et pourrait placer Numericable-SFR en porte-à-faux vis-à-vis de ses obligations de moyens.

200 démissions

Cette situation commence à démotiver les salariés. Environ 200 d’entre eux auraient démissionné depuis l’arrivée de Numericable en novembre 2014. « Les cabinets de recrutement sont très sollicités par les personnels de SFR », indique Olivier Lelong. Qui ajoute que nombre de salariés attendent encore trois ou quatre mois pour voir comment la situation va évoluer avant de se décider à partir. Le responsable syndical voit cette manœuvre comme un « moyen de contourner l’accord de garantie de l’emploi » signé par Patrick Drahi lors de la bataille pour acquérir SFR. Accord qui court jusqu’en juillet 2017. D’ici là, il se pourrait bien que la masse des 9 000 salariés de SFR ait quelque peu fondue sans que le groupe n’ait eu à licencier à proprement parler.

Les dirigeants d’Altice seront-ils sensibles à la préoccupation des salariés ? A l’heure où nous écrivions ces lignes, la pétition dépassait les 1 400 signatures. Elle devrait être remise à Eric Denoyer dans le milieu de la semaine prochaine.

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