Nvidia : ‘Le processeur graphique est le plus important dans un PC’

Au moment où AMD multiplie sa communication autour de l’intégration d’ATI et
du graphisme, et où Microsoft impose sa révolution DirectX 10 via Vista, nous
avons souhaité faire le point avec le concurrent Nvidia

« Nous sommes le premier fabricant de puces graphiques, avec un chiffre d’affaires qui devrait dépasser les 4 milliards de dollars en 2007, et le troisième fournisseur de plates-formes PC, après Intel et AMD. En revanche, nous sommes CPU agnostique. C’est moins connu car notre communication était trop associée au jeu« , nous a affirmé Stéphane Quentin, Product PR Manager France, Belgique et Europe du Sud de Nvidia, premier fabricant mondial de solutions graphiques, qui a répondu à nos questions

Comment percevez-vous votre marché ?

L’année 2007 est une année de transition, qui va confirmer que le processeur graphique prend le pas sur le CPU pour traiter l’image, et ce au delà du jeu. Si avec notre solution Quadro nous occupons 80 % du marché de la CAD, avec l’arrivée de Windows Vista le processeur graphique va désormais bien au delà des applications CAD.

Avec la vidéo haute définition, par exemple, le processeur graphique doit prendre en charge la décompression, car il n’y a pas un processeur multi-core qui est capable de décoder un HD DVD ou un Blu Ray. Ou alors il ne fait que ça et il le fait mal !

Dans le domaine de la mobilité, 52 % des plates-formes d’ordinateurs portables sont équipées d’un module de cartes de Nvidia, qui permet d’accélérer l’arrivée de la 3D via cette carte qui peut être remplacée, ce qui représente l’avantage pour les fabricants de faire évoluer leurs machines au rythme de nos technologies.

Il faut également citer le développement par Nvidia de DirectX 10, conjointement avec Microsoft. Nous sommes leader de fait puisque nous avons développé le seul driver DirectX 10 disponible, nous avons défriché le terrain avec Microsoft. Ou encore citer l’annonce au 3GSM d’un CPU dédié à la téléphonie…

D’une gamme à l’autre les composants graphiques sont identiques, alors pourquoi une gamme pro ?

Tous les ans, nous proposons une nouvelle architecture et tous les six mois nous assurons un ‘refresh‘. Donc l’offre grand public et jeux est renouvelée tous les six mois. Notre gamme Quadro pour les professionnels dispose au contraire d’un engagement de durée de vie de quatre ans, de drivers spécifiques et de certifications.

Comment a réagi Nvidia au rapprochement de AMD et de ATI ?

Il faut d’abord rappeler que le business d’AMD est inexistant s’il n’y a pas Nvidia ! De plus, comme les loisirs numériques entraînent les marchés, le graphisme est très important pour le grand public.

Le vrai problème pour AMD, c’est Centrino (plate-forme portable d’Intel qui assure à ce dernier 80 % du marché), donc la plate-forme portable. Aujourd’hui, on achète un ordinateur portable, mais plus un ordinateur de bureau. Donc AMD avait besoin d’une plate-forme pour contrer Intel. Mais avec notre capitalisation boursière, Nvidia était trop cher pour AMD. Ils ont donc acheté ATI. On comprend d’autant plus leur stratégies que nous avons fait partie de la négociation.

Chez Nvidia, nous préférons rester spécialisé et consolider la stratégie de coopétition avec nos partenaires et concurrents. C’est pour cela que nous sommes le seul à proposer une plate-forme pour chaque segment, de l’entrée de gamme au professionnel.

Et vos rapports avec Intel ?

Intel a besoin de Nvidia, en particulier de la plate-forme de jeu SLI (possibilité de coupler deux cartes graphiques) qui a largement participé au succès d’AMD depuis 2004. SLI est l’arme de Nvidia pour Intel, pour capturer les joueurs.

On ressent un décalage technologique entre les CPU et les GPU…

Un c?ur graphique assemble 700 millions de transistors. Un c?ur de processeur pour PC, ce sont 150 millions de transistors et beaucoup de mémoire. La complexité des processeurs graphiques explique notre décalage, qui peut sembler être un retard, sur les technologies en 65 nanomètres.

Les GPU (ensemble composants graphiques, contre le CPU, ensemble des composants processeur) sont aujourd’hui des processeurs à part entière, qui effectuent des calculs plus simples que les CPU mais en traitent des volumes beaucoup plus importants. Avant, le GPU calculait chaque pixel à l’écran, aujourd’hui on lui demande de calculer des bases de données ou des plates-formes pétrolières.

C’est le cas par exemple de CUDA (Compute Unified Device Architecture) destiné aux processus financiers, ou encore de l’émergence des stations graphiques externes (Quadro Plex), plutôt tournées vers la simulation et le calcul pur.

En quoi DirectX 10 est-il une révolution ?

Jusqu’à présent, DirectX réunissait les API pour faire communiquer CPU et GPU qui se partageaient le travail. Avec DirectX 10, le calcul géométrique est effectué directement par le GPU.

On en tire deux avantages : l’augmentation de la géométrie, une application 3D peut se passer du CPU et le GPU peut traiter vingt fois plus de polygones ; l’augmentation du physique dans la simulation, avec la gestion des particules comme l’eau ou la fumée, et la gestion des textures, comme l’imagerie médicale.

C’est révolutionnaire et ça va relancer l’industrie. Pour disposer des avancées de la 3D DirectX 10, il faut une nouvelle carte graphique, un nouveau système d’exploitation, Vista, et un environnement logiciel dédié, que nous sommes le seul à maîtriser.

Comment voyez-vous le futur ?

Le CPU a été le processeur du 20ème siècle, le GPU est le processeur du 21ème siècle. Derrière chaque écran il va y avoir du Nvidia, c’est notre objectif. Notre c?ur, c’est la 3D, qui tire le marché vers le haut, avec par exemple une carte DirectX 10 à 600 dollars.

Si on traite le graphique au niveau du processeur, ça va limiter les pe rformances de la plate-forme. Un projet comme Fusion d’AMD (qui va marier traitement et graphisme sur un même processeur) n’est qu’une réponse à un marché qui sera limité. Nous préférons continuer sur notre vision du composant graphique indépendant, surtout que nous disposons des meilleures performances par watt.

Que peut-on attendre de Nvidia dans les mois à venir ? Au travers du discours du fabricant et de l’avancée de ses travaux, nous pouvons anticiper la stratégie de Nvidia pour 2007 (non confirmée officiellement par le fabricant)…La technologie GeForce 7x (grand public DirectX 9) devrait être intégrée aux cartes mères d’abord chez AMD puis chez Intel.La technologie SLI devrait se multiplier, ainsi que les stations Quadro Flex (solution graphique externe au poste de travail).La gamme GeForce 8x va implémenter très rapidement DirectX 10 et se décliner de l’entrée (100 $) au haut de gamme (600 $ et plus).Reproduisant le succès de sa carte graphique qui s’enfiche sur le design des ordinateurs portables, la technologie équivalente pour les téléphones va leur ouvrir les portes de la 3D.