Panama Papers : un informaticien suspecté d’être le lanceur d’alerte

La fuite de données qui a donné naissance au scandale des Panama Papers a-t-elle été orchestrée par un informaticien du cabinet panaméen Mossack Fonseca ? La justice suisse enquête.

D’après Le Temps, un informaticien de l’antenne genevoise de Mossack Fonseca a été arrêté. Placé en détention provisoire par le parquet, il est suspecté d’être à l’origine de la gigantesque fuite de données dont a été victime le cabinet d’avocats panaméen, fuite à l’origine du scandale des Panama Papers. Cette série de révélations sur des structures offshore permettant d’échapper au fisc, parue dans la presse internationale en avril dernier, était basée sur l’exfiltration d’une gigantesque quantité de données : pas moins de 2,6 To, représentant 11 millions de documents sur une période allant de 1977 à 2015, et portant sur 214 488 structures offshore.

mossack leakSuite à ces révélations, le cabinet d’avocats panaméen a défendu la thèse du piratage pour expliquer cette fuite. Début avril, Ramon Fonseca, un de ses co-fondateurs, a ainsi affirmé à la BBC que le scandale des Panama Papers ne résultait pas d’une fuite interne, mais d’un piratage orchestré depuis des serveurs situés hors du Panama. Les investigations menées par de nombreux experts en sécurité de par le monde ont montré que le niveau de cybersécurité du cabinet panaméen était plus qu’approximatif.

Des données soustraites

Mais Mossack Fonseca semble n’être aujourd’hui plus aussi catégorique sur le scénario de la fuite de données. L’arrestation de l’informaticien à Genève résulte en effet d’une plainte déposée par la société. L’employé visé est suspecté de « soustraction de données », « accès indus à un système informatique » et « abus de confiance ». Il conteste toutefois l’intégralité des faits, selon Le Temps. Nos confrères signalent que du matériel informatique a été saisi au domicile du suspect et chez son employeur.

« Ce que nous savons, c’est que des données ont été soustraites depuis son ordinateur à Genève et que cet informaticien disposait de tous les droits d’accès, explique au Temps l’avocat de Mossack Fonseca. C’est sur cette base que nous avons déposé plainte pour soustraction de données et violation du secret du métier d’avocat. Des investigations très poussées sont menées par la police genevoise pour analyser les traces informatiques et faire toute la lumière sur ce vol de données.» Le ministère public genevois a confirmé qu’une procédure était bien ouverte suite à une plainte de Mossack Fonseca, sans plus de détails pour l’heure.

Le manifeste d’un lanceur d’alertes

Révélé au grand public le 3 avril, le scandale des Panama Papers a permis de lever le voile sur l’étendue du recours aux structures offshore afin de dissimuler des actifs. Rappelons que les données à l’origine de ce scandale mondial avaient été transmises au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung par une source anonyme dissimulée derrière le pseudonyme John Doe. Devant l’ampleur de la tâche, nos confrères d’outre Rhin s’étaient tournés vers un collectif international de journalistes d’investigation, l’ICIJ, afin d’exploiter l’information transmise.

John Doe avait expliqué ses motivations dans un manifeste transmis au Süddeutsche Zeitung courant mai. S’y présentant comme un lanceur d’alertes non affilié à un service de renseignement ou un Etat, il indiquait vouloir lutter contre la « fraude à grande échelle » que favorisent des firmes comme Mossack Fonseca. Le texte transmis par John Doe semblait indiquer une connaissance profonde des rouages du cabinet panaméen et un ressentiment très net à l’égard de cette société, accusée d’être à l’origine d’ « actes sordides » qui nécessiteraient « des années, voire des décennies » pour révéler au grand jour.

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