Régulation du numérique : les 12 travaux de l’Arcep 2.0

Connectivité optique des PME, déploiement de la fibre, couverture mobile, neutralité du Net et autre Internet des objets… L’Arcep présente les nouveaux chantiers d’une organisation qui entend afficher sa modernité.

Une fois n’est pas coutume. Pour ses vœux 2016, l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) avait réservé le grand amphithéâtre de la Sorbonne en lieu et place de l’habituel grand salon (néanmoins toujours dévolu à l’incontournable cocktail d’après discours). Un lieu mieux adapté au nouveau style de l’Autorité qu’insuffle depuis un an son jeune président Sébastien Soriano et où se sont mêlées intervenants (Emmanuel Macron, ministre de l’Economie et des Finances, et le président de la commission des affaires économiques du Sénat, Jean-Claude Lenoir), projections vidéo (des témoignages des collaborateurs de l’Arcep) et présentations diapos dans une ambiance lumineuse sobre, mais savamment orchestrée. Comme l’a caricaturé le consultant Olivier Ezratty, invité à exposer une prospective de la société numérique en binôme avec la fondatrice de Leetchi, Céline Lazorthes, « l’Arcep fait son TEDx ».

Tracer une nouvelle direction pour la régulation

Un style interactif qui tranche avec les modèles du passé et illustre clairement la transformation du régulateur, désormais schématisée par le hashtag #ArcepPivote avec, au passage, une nouvelle identité visuelle (et un changement de logo). Après avoir rappelé les grandes lignes des réalisations du régulateur depuis 19 ans (ouverture à la concurrence, dégroupage, très haut débit, fluidification du marché mobile…), Sébastien Soriano a donc affiché sa volonté de « tracer une nouvelle direction pour la régulation ». Au-delà des travaux menés depuis son arrivée l’année dernière (attribution des fréquences 700 MHz, couverture des zones blanches, partage des réseaux…), celle-ci se concrétise aujourd’hui par la présentation des conclusions de la revue stratégique de l’institution lancée en juin 2015. Une revue qui a pour objet de présenter les moyens de répondre aux nouveaux défis du régulateur face à un secteur régulièrement secoué par les évolutions technologiques pour « participer au succès de la transformation numérique du pays ».

Cette mission se décline autour de 4 grandes priorités – infrastructure, connectivité des territoires, neutralité du Net et innovation – et transparaîtra à travers 12 chantiers pour les 24 prochains mois. L’Arcep veillera ainsi notamment à offrir aux PME un accès économiquement viable aux liaisons optiques, à accélérer le déploiement et la migration vers la fibre (par l’extinction progressive de la paire de cuivre), à doper la couverture mobile et les débits (notamment par le partage des réseaux), à connecter les territoires, à accompagner l’émergence des réseaux dédiés à l’Internet des objets (IoT) ou encore à ouvrir un espace d’expérimentations.

Des opérateurs plus transparents

L’Autorité veut également obliger les opérateurs à plus de transparence en enrichissant les cartes de couvertures mobiles pour les rendre toujours plus proches de la réalité du terrain, mais aussi en exploitant leurs données internes pour s’assurer de leur neutralité. « Nous irons chercher les données chez les opérateurs pour les travailler et les rendre publiques », a assuré Sébastien Soriano. Quitte à passer par l’espace de signalement que le régulateur ouvrira en direction des consommateurs et entreprises. De manière plus ambitieuse, l’Arcep entend même s’attaquer aux épineuses questions de neutralité des grandes plates-formes (moteurs de recherche, stores applicatifs…) et de l’ouverture des OS des terminaux mobiles.

Une démarche qui fera appel au crowdsourcing, autrement dit à la participation du plus grand nombre, pour trouver les solutions aux défis auxquels le secteur des télécoms, comme l’ensemble de la société, sera confronté ces prochaines années. Derrière l’ensemble de ces travaux, il y a « un fil conducteur, celui visant à encourager les échanges pour combattre les silos qui les entravent », a résumé Sébastien Soriano. Ce qui se traduit notamment par une régulation par la data (pour inciter les acteurs à agir plus qu’à subir), et une volonté de s’ouvrir toujours plus à la collaboration avec les autres instances nationales (Autorité de la concurrence, Cnil, CSA…), les régulateurs européens et structures privées (l’incubateur TheFamily aujourd’hui). Une façon pour l’Arcep de marquer son empreinte dans le paysage en s’inscrivant comme « l’architecte et le gardien des réseaux d’échange » et, peut-être, de se préserver de toute velléité politique de fondre l’Arcep dans le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel). Projet régulièrement remise sur le tapis.

« En 2017, il n’y aura pas de vœux de l’Arcep », a prévenu Sébastien Soriano en conclusion de sa présentation. La cause ? Le Berec (le régulateur européen), dont la France assurera cette année la présidence, et dont le point d’orgue sera l’organisation d’un événement dédié en février 2017. L’Arcep profitera alors de l’occasion pour fêter ses 20 ans.


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