La Russie s’émancipe des processeurs x86 avec ses propres puces ARM

Des composants ARM 64 bits sont en cours de mise au point en Russie, avec comme objectif leur utilisation massive au sein de PC et de microserveurs. Aux raisons stratégiques se mêlent des visées économiques.

La Russie serait en train de mettre au point un processeur destiné à remplacer les puces x86 d’Intel et d’AMD dans le monde des PC personnels et des microserveurs.

Les composants Baikal pourraient faire leur entrée sur le marché dès l’année prochaine. Ils seront développés par T-Platforms, un acteur bien connu dans le monde des supercalculateurs.

La fin du Vapor-hardware ?

Les annonces de ce genre se sont multipliées en Russie ces dernières années. Toutefois, depuis la fin de l’ère des puces 8 bits, la Russie n’arrive plus guère à imposer ses offres que dans des supercalculateurs, ou des systèmes hautement stratégiques (par exemple dans l’industrie spatiale), en général avec des offres basées sur des cœurs MIPS ou SPARC.

Sans compter également les divers clones de PDP-11, qui ont finit leur carrière dans nombre de Tamagotchi et jeux de Tetris de poche (pour la petite histoire, la première version du jeu Tetris a été développée sur une machine compatible avec les PDP-11, facilitant ainsi probablement son adaptation aux microcontrôleurs russes basés sur cette architecture).

Depuis le début des années 2000, les annonces les plus fantasques sont apparues, avec des puces RISC capables d’imiter à la perfection le fonctionnement des composants x86, permettant ainsi de créer un lien entre les deux mondes. Dans la pratique, le succès commercial de ces produits n’a jamais été au rendez-vous. La dernière offre de MCST, l’Elbrus-4C, faute d’apporter un réel avantage concurrentiel, devrait ainsi se limiter aux mainframes.

L’ARMe russe pour contrer les USA

Le cas du Baikal pourrait toutefois être différent. La Russie a ici choisi d’opter pour des cœurs ARM, bien supportés par l’industrie du logiciel, mais également par les fondeurs asiatiques (et européens). Un cœur 64 bits Cortex-A57 sera utilisé, avec une fréquence de fonctionnement de 2 GHz. Des puces comprenant 8 et 16 de ces cœurs ont été évoquées.

Les ordinateurs pourvus de ce composant ARM « made in Russia » devraient équiper tous les ordinateurs et microserveurs utilisés au sein de l’Administration russe et des sociétés publiques du pays, soit près de 700.000 PC et 300.000 serveurs par an. Un marché qui pourrait également être boosté par celui des supercalculateurs, spécialité de T-Platforms.

Au total, cinq millions de composants Baikal pourraient être vendus chaque année, pour un total estimé à 3,5 milliards de dollars. La mise au point de ce composant ne répond donc pas seulement à des visées stratégiques, mais également à des impératifs économiques. Notez que Linux sera l’OS par défaut de cette nouvelle génération de machines ARM.

À quand en Europe ?

Assez curieusement, cette bonne idée ne trouve pas encore d’écho en Europe, qui aurait pourtant tout intérêt à soutenir son industrie des semi-conducteurs (représentée par des géants comme ARM ou STMicroelectronics).

Alors que les Américains, les Chinois (avec des offres comme les Godson) et les Russes disposent tous de processeurs ‘souverains’ (connaissant plus ou moins de succès), l’Europe tarde encore à aborder ce problème, avançant deux arguments aussi classiques que faux : 1/ le marché est joué (ARM est la preuve que cela n’est pas le cas) 2/ la libre concurrence est la règle (un jeu auquel même les États-Unis n’adhèrent pas à 100%).

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