Tribune: Internet, zone de liberté ou zone de non-droit ?

L’émission Les Infiltrés de France 2 remet sur le tapis le difficile problème de la surveillance d’Internet : doit-on filtrer ou laisser faire ?

Difficile de passer sous silence le documentaire diffusé mardi soir sur France 2, dans le cadre de l’émission Les Infiltrés. « Pédophilie : les prédateurs » abordait un sujet difficile, traité ici d’une façon particulière, les prédateurs se retrouvant les cibles des investigations de la rédaction de l’agence CAPA.

Le débat qui a suivi était évidemment tendu, chaque intervenant faisant son possible pour ne pas stigmatiser Internet. Les avis divergent toutefois: filtrage parental ou filtrage global? Éducation ou surveillance de la part des parents? Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille, rappelle que les sites pédopornographiques pourraient bientôt être la cible de mesures de filtrage. Du côté de la police, le commissaire divisionnaire de l’OCLCTIC (Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication), Christian Agrhoum, regrette du bout des lèvres le manque de moyens mis à sa disposition devant l’explosion de la criminalité sur Internet.

Certains jugent aujourd’hui ces mesures de filtrage et de contrôle liberticides. Il ne faudrait pas confondre un état policé avec un état policier. A contrario, d’autres estiment que les criminels ne doivent pas avoir la liberté de s’épanouir sur le Net. Après tout, c’est le modèle qui est appliqué hors du monde virtuel. Dans ces conditions, doit-on continuer à laisser faire, au risque de se retrouver avec un Internet mafieux et totalement hors de contrôle, ou doit-on agir, au risque d’aller trop loin et de devoir faire marche arrière par la suite?

Interdire les sites de chat laxistes ?

Pour revenir au sujet de l’émission de France 2, il est difficile de ne pas s’insurger contre les sites de chat en ligne. Ils sont tout d’abord l’expression même d’un défaut éducatif: où est passé le précepte simple qui veut de ne pas laisser des enfants parler avec des inconnus? C’est évidemment la porte ouverte à tous les dangers, en particulier lorsqu’il est impossible de savoir qui est et quel est l’âge de l’inconnu en question.

De plus, comment ne pas réagir devant l’absence quasi absolue de systèmes de contrôle ou de modération, qui fait de ces sites un véritable terrain de jeu pour les prédateurs sexuels? Demandes de signalement ignorées ou non relayées aux forces publiques, aucune alerte levée en cas de détection d’un mot épineux (« cam », « sexe », « msn », mention d’un âge trop élevé, etc.), ces sites sont à l’image du web: une belle façade, mais un backend totalement inefficace.

La course à l’échalote pour lever un maximum de recettes publicitaires, au mépris de la sécurité des enfants, comme le soulignait Damien Bancal de Zataz, un des invités de l’émission. Dans ces conditions, il est légitime de se demander si la responsabilité de ces sites ne devrait pas être mise en cause. De fait, à ce niveau d’irresponsabilité, nous frôlons la mise en danger d’autrui, une infraction du Code pénal qui peut à elle seule justifier la fermeture de tels sites.

N’hésitez pas à venir partager votre avis avec nous sur ces différentes questions. Pour les réactions liées plus précisément à l’émission et à la pédophilie sur Internet, n’oubliez pas que France 2 a également mis en place un forum dédié spécifiquement aux Infiltrés.