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Pour Cray, les supercalculateurs ne sont pas menacés par le Cloud

Avec l'ouverture de son siège pour la zone EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique du Sud), à Bristol (Royaume-Uni), la société légendaire Cray revient sur le devant de la scène. Silicon.fr était sur place pour discuter avec son CEO, Peter Ungaro, de ses résultats et de sa stratégie.

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Pour Cray, les supercalculateurs ne sont pas menacés par le Cloud

Toujours leader mondial des supercalculateurs, Cray compte aujourd'hui 1 200 employés dans le monde (contre 860 en 2011), et aura plus que triplé son chiffre d'affaires entre 2011 et 2015 passant de 236 à 715 millions de dollars (prévisionnel).

Peter Ungaro, CEO chez Cray

« Nous avons fortement développé notre activité depuis 2010. Il nous a donc fallu ouvrir de nombreux bureaux en Europe et à travers le monde. Pour favoriser la coordination de zones géographiques et rapprocher les décisions et la R&D de nos clients, nous avons estimé qu'un siège pour la région EMEA devenait indispensable », explique Peter Ungaro, président et CEO de Cray. « Nous avons choisi Bristol pour de nombreuses raisons. Parmi lesquelles : sa situation géographique, son université de haut niveau attirant les entreprises high-tech et de nombreuses start-up. Autant d'opportunités de trouver une main d'oeuvre de plus en plus précieuse et difficile à recruter.»

Premier levier de la forte croissance de Cray, la recherche et développement à laquelle l'entreprise consacre plus de 20 % de ses revenus : 105 millions de dollars sur 562 en 2014, et 130 sur 715 en 2015.

Devant IBM, depuis la cession d'une partie d'une partie de ses serveurs à Lenovo.

Et les résultats sont au rendez-vous. En effet, dans le top 50 des supercalculateurs installés dans le monde, Cray occupe le premier rang avec 16 systèmes. Dans le top 100, elle arrive en tête à égalité avec IBM : 28 machines. Et son total de 62 installations dans le top 500 la classe en troisième position derrière IBM et HP. Pas si mal face à ces deux mastodontes !

En zone EMEA, la société revendique « 28% de la performance fournie en supercalculateurs. Et nous sommes les plus demandés pour la combinaison Big Data et supercomputing, et sans doute le leader aussi pour le HPC avec stockage intégré dans la région », tient à souligner Peter Ungaro. Cray devancerait ainsi IBM, Lenovo et Bull (graphique ci-contre).

Les entreprises : un marché prometteur ?

Toutefois, cela ne saurait suffire. Les mécanismes longtemps réservés aux grands systèmes et supercalculateurs comme la parallélisation, l'équilibrage de charge en cluster, les charges importantes sur bus mémoire évolués . sont désormais presque la norme sur les serveurs d'entreprise.

« Cray est encore perçu comme un constructeur », regrette le CEO. « Or, nous ne fabriquons pas de processeurs et assemblons des composants de type Intel ou nVidia. Aujourd'hui, nous oeuvrons essentiellement dans le logiciel et l'intégration pour réaliser des systèmes à haute performance très intégrés. »

Alors, comment se différencier ? Surtout sur un marché où IBM, HP, Oracle, Fujtsu ou Hitachi proposent eux-aussi avec des solutions intégrées et évolutives ? « Dans les années 70, nous avons innové avec les processeurs vectoriels pour applications parallèles. Aujourd'hui, ce type d'approche est beaucoup plus répandue », reconnait Peter Ungaro. « Néanmoins, nos compilateurs vectoriels et nos librairies restent les plus performants, et nous permettent de faire la différence », assure-t-il.

On connait Cray pour ses légendaires supercalculateurs installés dans les centres météorologiques et universités. Ainsi, la société compte parmi ses clients le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT) à Reading, le High Performance Computing Center de l'Université de Stuttgart, le Centre Supercomputing national suisse à Lugano et le Service météorologique d'Afrique du Sud à Pretoria. On trouve également de nouveaux clients arrivés en 2014 comme le Centre PDC pour High Performance Computing à KTH (Institut royal de technologie de Stockholm en Suède), le Met Office du Royaume-Uni (météo) ou encore l'Université du Roi Abdullah pour la science et de la technologie en Arabie Saoudite.

« Certes, nous sommes connus pour ces types de clients. Cependant, nous allons renforcer notre présence auprès des entreprises commerciales, recherchant toujours plus de puissance de calcul et de performances. Pour réaliser cette stratégie, nous comptons aussi sur l'explosion du Big Data avec notre offre de solutions intégrées analytiques (analyses de graphs et solutions Hadoop) », annonce le dirigeant.

Cray compte déjà des entreprises privées parmi ses clients comme Stalprodukt SA, un processeur d'acier de premier plan en Pologne, ou Petroleum Geo -Services, une société mondiale de pétrole et de gaz dont le siège est à Oslo en Norvège. Le CEO mentionne également l'opérateur télécoms Colt.

Même si la réalité est parfois quelque peu plus complexe, les constructeurs annoncent des solutions ouvertes et respectueuses des standards. Cray suit-il cette voie ? « Lorsque cela est possible, nous utilisons des standards (de droit ou de fait) comme Linux, Intel, nVidia, Openstack, Hadoop, Spark, etc. Néanmoins, pour obtenir de très hautes performances, nous avons besoin de réaliser certaines tâches très spécifiques. C'est pourquoi nous sommes parfois amenés à développer ce qui n'existe pas ou n'est pas fourni dans les standards », reconnait Peter Ungaro. « Cependant, nous nous assurons du maximum de compatibilité. Ainsi, nous proposons un 'Cluster Compatibility Node' permettant à l'un de nos noeuds d'apparaître comme un noeud standard vis-à-vis des autres solutions. »

Le Cloud : pour les projets à moins de 500 000 dollars

Les supercalculateurs pourraient bien bénéficier du rapprochement des modèles

« Les modèles de données font de plus en plus appel à des modèles mathématiques et statistiques, et c'est justement notre spécialité. Cray est prêt pour proposer des processus intensifs sur ses solutions très intégrées combinant puissance de calcul, stockage et analytique à très hautes performances », assure le dirigeant.
Cependant, toute l'industrie tente d'entrer sur ce terrain de jeu mêlant traitements parallèles, stockage intensif et puissance de calcul évolutive à la demande.

Sur ce point et face à la multiplication des solutions Cloud plus ou moins évoluées, particulièrement pour l'analytique (sur laquelle Cray mise fortement), le CEO affiche une certaine sérénité : « Ces solutions Cloud, ainsi que les appliances sur serveur plus ou moins performantes, répondent parfaitement à des besoins de type batch ou non-critiques. Nous ne ne les considérons pas comme concurrentes, mais plutôt comme complémentaires. D'ailleurs, des fournisseurs de services Cloud ou des opérateurs peuvent utiliser nos solutions pour offrir des services évolués, avec une tarification adaptée mettant nos technologies à la portée des budgets plus modestes. En revanche, concernant des applications critiques, pour lesquelles les performances, le temps et la latence restent essentiels, Cray incarne la solution la plus adaptée. On constate même que des entreprises font machine arrière sur certaines de leurs applications migrées vers le Cloud, lorsque ces aspects s'avèrent finalement plus critiques que ce qu'elles estimaient au départ. »

Bien que proportionnel au besoin, le coût des supercalculateurs Cray reste effectivement conséquent, même si Peter Ungaro relativise : «On connait généralement Cray pour les tests de performance et les installations à 10, 20 voire 30 millions de dollars. Pourtant, nous participons aussi à des projets dont les budgets sont de l'ordre de 500 000 dollars, et nos projets moyens se situent aux alentours de 2 millions de dollars. »

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