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Cloud et logiciels : le poids économique de la dépendance aux USA

Une étude commandée par le Cigref estime la valeur que produisent les achats de services cloud et logiciels américains par les entreprises européennes.

Publié par Clément Bohic le | mis à jour à
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Cloud et logiciels : le poids économique de la dépendance aux USA
© portalgda via VisualHunt / CC BY-NC-SA

Le cloud et les logiciels, 10 % plus chers chaque année ?

Les entreprises européennes font face à une telle hausse*, d'après un rapport que relaie le Cigref. Il découle d'une étude que l'association a commandée au cabinet Asterès. Objectif : évaluer l'impact économique des achats de tels services à des acteurs américains.

L'estimation en question résulte d'une extrapolation à partir d'un échantillon restreint. En l'occurrence, des entretiens avec 6 DSI de grandes entreprises en France.

Cette option a été retenue à défaut de données macroéconomiques exhaustives. En premier lieu, les données de flux commerciaux. Dans celles de l'OMC, les "services de cloud-logiciel" (ainsi dénommés dans le rapport) ne sont pas détaillés. Et la décomposition "software"/"other than software" n'est pas renseignée avec suffisamment de précision pour être utilisable, selon Asterès. Il n'y a, par ailleurs, pas moyen de savoir quelle part de ces flux est destinée aux ménages ou aux entreprises.

Dans le cas où des services sont produits localement via des filiales, les montants en jeu peuvent être tracés par les revenus des investissements directs à l'étranger des entreprises américaines du numérique (dividendes, bénéfices non distribués ou prêts intragroupes). Problème : là aussi, les données existantes ne permettent pas de cibler à la fois le secteur et les pays concernés. Plus précisément :

  • Pas de décomposition sectorielle assez fine dans les données du BEA
  • Trop de chiffres manquants, par secteur comme par pays, dans celles de l'OCDE
  • Pas de granularité sectorielle chez Eurostat, dont les données ne correspondent en outre pas exactement aux besoins de l'étude (non centrées sur les revenus des investissements directs à l'étranger)
  • Absence de détail de ces mêmes revenus par secteur chez le FMI et la Banque mondiale

Environ 260 Md€ de valeur créée aux USA chaque année

L'extrapolation des informations ressorties des entretiens avec les DSI s'est faite en considérant que le poids des dépenses cloud-logiciel est proportionné au PIB d'un pays. D'autres éléments ont été supposés, comme le fait que la part des dépenses cloud-logiciel dans le chiffre d'affaires serait deux fois moins importante chez les TPE/PME que chez les grandes entreprises.

Croisé avec des données sur la taille estimée du marché européen et sur sa part dans le marché mondial (CISPE, Statista, KPMG...), l'ensemble apparaît plutôt cohérent. Dans les grandes lignes :

  • Les grandes entreprises en moyenne 2,2 % de leur CA en services logiciels. Ce qui fait 66 Md€/an à l'échelle de la France et 400 Md€ à celle de l'UE.

  • Environ 83 % de ces dépenses iraient aux acteurs américains (54Md€ par an en France ; 330 Md€ dans l'UE).

  • Sur ces services, 80 % de la valeur ajoutée est réalisée aux États-Unis.. Ce qui représente 43 Md€ par an en France... et 264 Md€ dans l'UE. Soit 1,5 % de son PIB et 1,5 fois son budget.

Réorientation des achats : trois scénarios pour l'Europe

En s'appuyant sur les tableaux des entrées/sorties de l'OCDE, Asterès a évalué les effets :

  • Directs (achats réalisés par ces acteurs américains)
  • Indirects (activité générée par ces dépenses)
  • Induits (consommation de leurs salariés)

L'évaluation n'a pas tenu compte des effets en chaîne. Elle a englobé :

  • Nombre d'emplois directs générés par le secteur (fonction du chiffre d'affaires et de la production moyenne par emploi ; données OCDE)
  • Valeur ajoutée générée directement (basée sur la productivité moyenne des salariés du numérique américain ; données OCDE)
  • Impôts et cotisations sociales liés aux achats européens (estimés à partir de la part des prelèvements obligatoires dans la valeur ajoutée aux USA ; données OCDE)

En ressort la synthèse suivante :


La même méthodologie appliquée à l'Europe donnerait, moyennant une réorientation immédiate de 5 % des achats cloud-logiciel actuellement adressés à l'économie américaine :


En passant à 10 %, à l'horizon 2030 :


Et 15 %, à l'horizon 2035 :


Ces scénarios se fondent sur l'hypothèse que les gains de productivité annuels seraient supérieurs d'environ 3 points par rapport au reste de l'économie.

La hausse des prix des services cloud et logiciels n'aurait pas de conséquence directe sur l'emploi et la croissance économique, qui sont des variables en volume. Elle aurait en revanche un impact sur la balance des paiements. Si le rythme de + 10 % par an se maintenait, les États-Unis verraient leurs exportations progresser de 421 Md€ sur 10 ans. Dans le cas où 15 % des achats seraient réorientés vers uen production européenne à l'horizon 2035, les importations seraient réduites de 100 Md€ sur ce même laps de temps.

* Il s'agit avant tout d'un effet prix. Pas d'un effet qualité. L'accroissement des services inclus n'est pas systématique et le client n'est souvent pas demandeur, leur ajout s'apparentant à de la vente liée.
Avec la guerre commerciale en cours, l'incertitude est évidemment grande quant à la stabilité de l'ouverture de l'économie américaine.

Illustration principale © portalgda via VisualHunt / CC BY-NC-SA

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