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Sommet de l'IA : police, justice, santé...comment les services publics utilisent l'IA

En amont du Sommet de l'IA, les ministères mettent en avant des cas d'usage. Chatbot, analyse vidéo, détection des feux...En voici quelques-uns.

Publié par Clément Bohic le | Mis à jour le
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Sommet de l'IA : police, justice, santé...comment les services publics utilisent l'IA
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Une IA pour tous les fonctionnaires ? C'est l'idée du Gouvernement.

Il est plus précisément question de proposer "aux 5,7 millions d'agents publics" un équivalent sécurisé de ChatGPT. Objectif : que tous les ministères - à commencer par la Santé, la Justice et l'Éducation - aient une solution disponible sous 12 mois.

Dans ce contexte, l'IA deviendra, nous affirme-t-on, un axe prioritaire traduit dans des feuilles de route ministérielles qui seront présentées au plus tard à Viva Tech (juin 2025). Il s'agira notamment d'identifier "lesquelles des nombreuses expérimentations conduites ces dernières années passeront à l'échelle".

ASTREE, PAROLE, SYSTEME V, Pyronear : quatre projets dans le périmètre de la Place Beauvau

Le ministère de l'Intérieur prévoit d'officialiser sa stratégie IA fin mars.

Parmi les projets qui se trouvent dans son périmètre, il y a PAROLE. L'Agence nationale des forces de sécurité intérieure a développé cet outil de transcription des auditions de mineurs. Elle l'a expérimenté en brigade et en commissariat. En 2024, il permis de transcrire 6000 heures d'auditions, "avec une économie annuelle potentielle de 150 000 heures pour les enquêteurs" (sur la base d'une heure d'audio analysée en 8 minutes contre 180 auparavant). L'expérimentation s'étend à 30 départements avant une généralisation nationale prévue en 2025.

Dans l'arsenal de l'agence se trouve aussi SYSTEME V. Cet outil pour l'analyse vidéo judiciaire est déployé dans 19 unités de police nationale et 18 de gendarmerie nationale, La v2, attendue pour cette année, apportera entre autres la détection des plaques d'immatriculation et des visages "sans reconnaissance faciale".

Du côté de la Fabrique numérique du ministèe, on a développé l'outil ASTREE, destiné à accélérer le traitement des contentieux de masse. La phase de construction avait démarré au printemps 2024. Le projet s'est d'abord porté sur la constitution automatique d'un bordereau pièces (identification des faits et moyens d'une requête puis des pièces nécessaires à la défense, et saisine des services ou des outils). Le deuxième axe concerne la constitution d'une fiche de synthèse pour accompagner la rédaction de requêtes. La mise en place d'ASTREE est prévu au premier semestre 2025, après une expérimentation sur des contentieux liés au Code de la route.

Dans le cadre de la Semaine de l'IA, le Gouvernement met aussi en avant une solution de détection anticipée des feux de forêt. Le projet est sous la houlette de la Direction générale de la sécurtié civile et de la gestion des crises. Météo France, les SDIS, l'Office national des forêts et Entente pour la forêt méditerranéenne y participent. L'outil sous-jacent n'est pas nommé, mais il semble s'agir de Pyronear. Une ONG a développé cette solution open source qui implique des caméras installées sur des points hauts et dotées d'algorithmes de détection. Elle a récemment fait part d'une phase de test réussie avec les SDIS d'Aveyron et de Seine-et-Marne.

Albert à la Cour d'appel, Mistral au pénal

Au ministère de la Justice, on dit avoir identifié quatre cas d'usage prioritaires. En l'occurrence, la retranscription d'entretiens (dans un premier temps, réunions), l'interprétariat/traduction, le résumé de dossier et l'aide à la recherche juridique. Sur ce dernier point, des tests sont réalisés avec la Cour de cassation avec des outils d'éditeurs juridiques. Pour ce qui est de la retranscription, une première solution interne "devrait voir le jour dès 2025". En parallèle, il est prévu d'accompagner le développement d'Albert pour les besoins du parquet général de la cour d'appel de Paris et des parquets de son ressort.

En attendant, il y a, par exemple, EDILE. D'autres ministères utilisent cet outil d'aide à la rédaction de textes de loi, mais celui de la Justice fut le premier servi, avec une bêta déployée fin 2023. Le principe : importer depuis Légifrance des textes à modifier, pour produire un texte conforme aux règles de légistique et aux formes du JORF.

En novembre dernier, lors des Rendez-vous des transformations du droit, le ministère de la Justice avait présenté d'autres outils, dont un pour explorer la base Natinf (Nature d'infraction) en langage naturel. Ses équipes avait aussi évoqué Mistral Pénal, un service censé faciliter l'exécution des tâches dévolues au greffier pénal. Il avait alors été testé sur 5 audiences.

Travail et santé, autres points d'ancrage pour Mistral AI

Dans le périmètre du ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, il y a France Travail. Parmi les outils IA de l'agence figure ChatFT. Ce chatbot connecté à la documentation interne et juridique est désormais ouvert à tous les agents, après son adoption par les conseillers. Il vise autant la production de texte que la synthèse d'information et la "proposition de pistes créatives".

En parallèle de ChatFT, France Travail développé MatchFT. Il y a également du Mistral AI derrière. Testé dans plusieurs régions auprès d'une centaine d'agences, l'outil affine la sélection de profils faite par un conseiller et prend contacte avec les candidats par SMS. Une conversation guidée par IA permet de vérifier l'intérêt desdits candidats et de valider des prérequis.

Côté santé, l'une des vitrines s'appelle PARTAGES, porté par le Health Data Hub. C'est l'un des lauréats de l'appel à projets "Communs numériques pour l'IA générative". Une trentaine de partenaires, dont une vingtaine d'hôpitaux, sont dans la boucle. Mistral AI aussi. Finalité : concevoir un LLM open source en langue française adapté au secteur de la santé. Cela servira de socle à des outils ciblant une demi-douzaine de cas d'usage, dont :

> Pseudonymisation des données textuelles de santé
> Assistance aux praticiens sur des tâches médico-administratives (codage de l'information médicale et résumé structuré de comptes rendus)
> Création de contenus pédagogiques pour les étudiants en médecine
> Analyse et de structuration des informations médicales pour soutenir la recherche clinique (en particulier en oncologie)

L'Assurance maladie porte une autre expérimentation, centrée sur un outil asssitant les médecins généralistes dans l'interprétation des électrocardiogrammes. Le projet devrait débuter à l'été 2025, probablement en Haute-Garonne et dans le Val-de-Marne.

Un dérivé de Mistral 7B en service au rectorat de Lyon

Le ministère de l'Éducation nationale entend encourager l'expérimentation ou le déploiement de l'IA tout particulièrement pour la production de rapports et la synthèse d'indicateurs.

L'une de ses vitrines IA se trouve dans l'académie de Lyon. Sur place, le rectorat utilise Cassandre (Conseil Automatisé et Support par Système d'Analyse Numérique de Documents Réglementaires et Éditoriaux). L'outil a été développé avec la start-up Pleias dans le cadre d'un appel à projets interne au ministère. Il se fonde sur le modèle OpenHermes Mistral 7B, additionné d'un RAG. Le tout sur l'infrastructure d'Albert. Le personnel RH l'utilise pour répondre aux questions des enseignants. Un passage à l'échelle nationale est "à l'étude".

Les Français de l'étranger, servis par Albert

De l'Albert, il y en a aussi au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, par exemple depuis 2024 pour apporter des réponses aux Français de l'étranger. Cette année auront lieu des expérimentations sur l'aide à la production du mémoire contentieux dans les juridictions internationales et à la communication des archives diplomatiques.

Dans la cellule de veille stratégique du ministère, on utilise Arlequin. Cet outil de traitement du langage est expérimenté depuis 2023. Notamment pour repérer les campagnes de dénigrement des intérêts français à l'étranger et pour mesurer le sentiment que les initiatives françaises suscitent à l'international.

L'IA pour prédire précipitations et ressources minérales

Le ministère de la Transition écologique a LIRAe, une liseuse IA en appui aux services sur l'autorité environnementale (accélération de l'instruction des dossiers ; 10 à 20 % de gain de temps).

Parmi les opérateurs du ministère, Météo France a développé Espresso. Ce modèle d'apprentissage profond basé sur un réseau DeepLabV3+ estime les précipitations à partir d'images satellite. Il fut utilisé lors du passage du cyclone Chido à Mayotte.

Quant à BGRM (Bureau des recherches géologiques et minières), il conduit le projet DROP (Développement de la recherche vers l'opérationnel en prédictivité). Pas tout jeune (le BGRM lui avait décerné son prix de l'innovation en 2021), il porte sur la cartographie prédictive des ressources minérales.

Comand AI et Preligens, deux fournisseurs du ministère des Armées

En 2024, le ministère des Armées a monté une AMIAD (Agence ministérielle pour l'IA de défense), dotée de 300 M€ par an, de 115 chercheurs... et bientôt d'un supercalculateur pour entraîner des modèles.

Un assistant interne fondé sur Mistral et ajusté sur des données de défense est accessible depuis fin 2024 aux 260 000 agents des armées, après 6 mois d'expérimentation auprès de 300 utilisateurs. Il aide à répondre à des questions ainsi qu'à synthétiser, traduire et transcrire du texte.

Le ministère travaille aussi avec Comand AI. Cette start-up parisienne, qui a récemment levé près de 10 M€, a pour patron un ancien d'Air Liquide et de Naval Group (construction navale de défense). Elle propose une suite logicielle pour la planification des opérations militaires et l'analyse des retex. Expérimentée dans l'armée de terre, elle devrait passer à l'échelle fin 2025 sur toutes les armées.

Autre entreprise française avec laquelle travaille le ministère : Preligens. Elle a développé des algorithmes à destination des analystes en guerre acoustique (dits "oreilles d'or"). Objectif : les aider à identifier la nature et la position des navires à partir des sons qu'émettent leurs appareils propulsifs et leurs équipements spécifiques.

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