Un Teams "spécial UE" se profile

Après quasiment deux ans de procédure, la perspective d'une issue se dessine dans le dossier Teams.

La Commission européenne avait ouvert une enquête formelle en juillet 2023, à la suite de plaintes émanant entre autres de Slack. Mi-2024, elle avait communiqué à Microsoft ses conclusions préliminaires. Dans les grandes lignes : abus de position dominante depuis au moins avril 2019, par la vente liée de Teams et de ses principales applications de productivité. Cet avantage en matière de distribution était aggravé par des limitations d'interopérabilité entre les produits de Microsoft et les solutions concurrentes.

En réponse, le groupe américain avait lancé des versions d'Office 365 sans Teams. Un découplage mis en place le 1^er octobre 2023 dans 31 pays d'Europe (UE + Islande, Liechtenstein, Norvège et Suisse), puis porté à l'échelle mondiale le 1^er avril 2024. S'y ajoutait la promesse de favoriser l'accessibilité de ses API publiques à des fins d'interopérabilité. Et de "créer de nouveaux mécanismes pour permettre l'hébergement des web apps Office sur des solutions tierces".

La Commission européenne ayant jugé ces engagements insuffisants, Microsoft les a étoffés. Assez pour que Bruxelles décide de les soumettre à un "test de marché". Les "parties intéressées" ont jusqu'au 16 mai 2025 pour soumettre leurs commentaires.

Vers de plus gros écarts de prix... censés refléter la "vraie" valeur de Teams

Au niveau tarifaire, il faut s'attendre à des écarts plus importants qu'à l'heure actuelle entre les versions avec et sans Teams. En tout cas pour "[les] plus grandes suites", selon l'UE, qui précise que "le prix de Teams sera égal ou supérieur au delta de prix". En d'autres termes, il y aura un "vrai" écart reflétant la valeur de Teams. De même, les taux de remise pour Teams ou pour les suites qui l'incluent "ne dépasseront pas" ceux proposés pour les suites sans Teams.
L'ensemble vaut pour les éditions destinées aux travailleurs de bureau. Microsoft entend toutefois l'appliquer également aux éditions Frontline. Et à périmètre mondial.

En l'état, les offres "grandes entreprises" d'Office 365 ("Enterprise") n'existent plus sans Teams. Pour obtenir ce dernier, il faut souscrire à un SKU spécifique : Teams Enterprise, à 5 € HT par mois pour chaque utilisateur.
Sur les offres PME ("Business"), selon les forfaits, l'écart entre les versions avec et sans Teams va de 1,20 à 2,40 € avec abonnement mensuel ; de 1 à 2 € avec engagement annuel. Le module optionnel Teams Essentials est à 4,44 € HT/mois/utilisateur (ou 3,70 € en annuel).

Interopérabilité, portabilité et déploiement mondial

En matière d'interopérabilité, Microsoft s'engage à permettre aux concurrents de Teams d'être intégrés "de manière proéminente" dans Word, Excel, PowerPoint et Outlook. Et, à l'inverse, d'incorporer les web apps Office "pour fournir [...] des fonctionnalités équivalentes" à ce que ces applications procurent à Teams. Il est également question d'un accès à des "produits et services identifiés ainsi qu'à leurs successeurs" dans le cadre de "certaines fonctionnalités spécifiques".

S'y ajoute une promesse de portabilité : la possibilité d'extraire les données de messagerie Teams pour les utilier dans une autre application. En complément, les clients de l'Espace économique européen sont autorisés à "déployer les suites sans Teams dans des datacenters partout dans le monde". Par ailleurs, ceux qui ont conclu des contrats à long terme se verront "régulièrement" offrir la possibilité de passer à une suite sans Teams.

Ces dispositions vaudront pour 7 ans à compter de leur entrée en vigueur (10 ans pour celles relatives à l'interopérabilité et à la portabilité des données).