A Pau, le très haut débit marie optique et Wi-Fi

Encore une ville qui, après avoir pris son destin en mains, a réussi à installer son propre réseau à haut débit

Tandis que certains se morfondent dans les bas fonds du bas débit, d’autres se donnent les moyens de leur vision multimédia… médiatique. Jean-Michel Billaut, co-fondateur du célèbre Atelier de la Compagnie Bancaire, est fier d’avoir réussi au moins une chose en région Pyrénées: il a convaincu Alain Labarrère, sénateur-maire de Pau que rien n’interdisait d’implanter dans la belle capitale du Béarn une solution à haut débit, et démocratique puisque visant le plus grand nombre -aussi bien particuliers qu’entreprises. Comment? Tout simplement en utilisant l’infrastructure existante du réseau électrique basse tension, à savoir les poteaux supportant l’énergie d’EDF. L’idée étant de leur faire supporter un câblage de fibre optique.

Faut-il rappeler qu’aujourd’hui, dans une seule fibre optique multiplexée, on fait passer 128 gigabits par seconde? But du jeu : faire converger des services téléphoniques, télématiques, radio, TV HD, domotiques, etc. Un signal fort La même infrastructure filaire, avec les mêmes protocoles, Ethernet et IP, est ainsi capable d’offrir une bande passante incomparablement supérieure à tout ce que proposent, pour l’heure, les opérateurs classiques. Avantages: le débit de la fibre et son coût, désormais très faible, et le caractère universel d’Ethernet dont le prix a fortement chuté. Ajoutez à ce cocktail une couche garantissant la qualité de services -cf. l’encadré ci-après- et vous obtenez l’une des premières plates-formes à haut débit de France et de Navarre. Jean-Michel Billaut résume ainsi: «Nous avons tout en mains pour prouver qu’il est facile d’implanter partout du très haut débit. Ceci devrait déclencher un signal fort permettant à de nombreuses industries d’émerger, entreprises qui créeront de nouvelles applications lesquelles contribueront à sortir de la crise.» Cette volonté de valoriser le très haut débit n’a rien d’une utopie. Il n’est qu’à écouter les associations de patrons américains qui prônent les 100 mégabits pour tous à l’horizon 2010. Paullywood… Le projet concerne les 14 communes de l’agglomération paloise, soit environ 180.000 « administrés ». Ils sont 10.000 à disposer aujourd’hui d’un PC et d’un accès à Internet, auxquels s’ajoutent la plupart des 11.000 entreprises implantées sur ce territoire. L’objectif implicite était d’installer une infrastructure de télécommunication à très haut débit afin de faire de Pau une ville pilote et de susciter ainsi de nouveaux emplois. Afin de pouvoir absorber les nouvelles industries, une cité «intelligente» largement câblée et à forte composante domotique est en cours d’implantation. Et l’équivalent d’une « Silicon Valley » dédiée aux nanotechnologies devrait voir le jour au pied des Pyrénées. Lancé en avril 2002, ce projet représente aujourd’hui un budget de 35 millions d’euros. Sur la partie filaire, il devrait permettre à terme d’offrir un accès à 100 mégabits pour 21 euros par mois pour tout le monde (le prix actuel de la connexion est de 30 euros, pour un débitd e 10 mbps). Le potentiel du réseau est de 60.000 prises optiques. Particuliers comme entreprises semblent enthousiasmés par le projet puisque près de 3.000 pré-abonnements ont déjà été enregistrés. Les travaux de génie civil sont achevés. L’opérateur de ce nouveau réseau à très haut débit est la Sagem: l’industriel a créé une filiale spécifique, la « Paloise des très hauts débits », qui assure la maintenance et la connexion des particuliers et des entreprises au réseau. Par ailleurs, une structure particulière, cliente de la première et baptisée ironiquement IPVset, garantit à tous ceux qui veulent vendre des services sur ce réseau les mêmes conditions de débit et de prix. L’amortissement du réseau a été prévu sur une trentaine d’années. Le paysage ne serait toutefois pas complet s’il n’y avait quelques ondes positives: le Wi-Fi s’est imposé de lui-même pour les liaisons sans fil: Doter les habitants de PDA Wi-Fi «La ‘Wifisation’ globale de la ville ne vise pas uniquement à offrir un accès Internet sans fil depuis n’importe quel point de l’agglomération» souligne Jean-Michel Billaut. «Notre objectif est d’employer le Wi-Fi pour fournir de multiples services. L’idée est d’équiper les habitants de PDA Wi-Fi pour leur proposer ces services, voire de la téléphonie IP sous Wi-Fi.» Pau va donc être l’une des toutes premières villes à être ainsi équipées à la fois d’un réseau filaire et d’un réseau radio à haut débit. Une expérimentation que « Silicon.fr » ne manquera pas de suivre avec intérêt. Un réseau métropolitain Ethernet / IP

Le réseau en fibre optique fonctionne sous Ethernet niveau 2 et transporte des paquets selon le protocole IP (Internet protocol). Il véhicule donc voix et données. La gestion des priorités de débit et de qualité de service est assurée par le protocole MPLS. Le débit proposé est au minimum de 10 mégabits/sec comme sur un réseau d’entreprise, et jusqu’à 100 Mbps sur certains accès prioritaires. L’architecture centrale est assurée par des commutateurs Cisco Systems. Grâce au rachat des droits d’usage du réseau Noos, le maillage de l’agglomération a pu être réalisé sans gros travaux de génie civil. Il sera complété, sur certains lotissements, par des bornes Wi-Fi, du même type que celles déjà installées au Palais Beaumont, à l’aéroport ou à l’hôtel Roncevaux de Pau. L’un des objectifs est de faire de Pau la première étape d’un «new-deal» européen permettant d’offrir 100 Mbps à tout un chacun, ce avant les Etats-Unis. Lié à ce programme « Pau Broadband Country », le nouveau quartier de la Porte des Gaves, qui doit être équipé vers 2008-2010, devrait également servir de vitrine pour les applications domotiques du très haut débit. Baptisé Paulywood, cet arrondissement de quelque 1.200 logements fonctionnera avec des énergies renouvelables (piles à combustible, notamment). Les services proposés par IPVSET aux entreprises incluent: -une offre « images » (visiophonie et vidéo à la demande), -une offre voix (VoIP, centre d’appels déporté) -une offre données (accès Internet 100 Mbps, solutions de travail à distance et d’outils coopératifs, sauvegarde en ligne, ingénierie coopérative, réalité virtuelle), -un service de sécurité (ronde de vidéo surveillance). Enfin, la technopôle TIC, regroupant pour l’heure quatre bâtiments et ayant créé quelque 300 emplois dans les nouvelles technologies ces trois dernières années, constitue la première zone française full IP à être bientôt directement raccordée au réseau métropolitain PBC à 10/100 Mbps. Destinée à s’étendre plus avant, elle met actuellement en place un centre de réalité virtuelle et teste un centre de calcul partagé selon les principes du grid computing. Le coût du projet: 35 millions d’euros d’investissement public, 16 millions de SAGEM via la Paloise des très hauts débits, et 5 millions environ d’investissement sur la première société : IPVSET Les services aux usagers privés: -Internet avec un débit 10 à 20 fois supérieur à celui de l’ADSL Un bouquet de jeux en ligne (dont notamment un club d’échecs en 3D) -des solutions de visiophonie -une solution de téléphonie gratuite vers les autres abonnés du réseau très haut débit -de la vidéo à la demande (sur un catalogue de plus de 1500 films) Les autres partenaires du projet sont: Microsoft : savoir faire en matière d’ingénierie logicielle et conseil sur génération de revenus sur les applications multimédias Cisco : participation à la modélisation du business plan et des modèles économiques et juridiques Intel : participation active à l’implantation du Wi-Fi IBM : participation aux expériences de sauvegarde à distance + soutien technologique aux P.M.E. Toshiba : implication dans le développement de solutions portables