Altis Semiconductor en grève illimitée

Face au flou qui entoure la vente probable d’Altis par IBM et la suppression de 400 emplois, les syndicats durcissent le ton.

Le conflit se durcit chez Altis Semiconductor, l’unique site de production de circuits logiques d’Île-de-France. L’intersyndicale de l’Essonne a appellé à une grève totale et illimitée à partir d’aujourd’hui, lundi 15 juin 2009. Un mouvement apparemment massivement suivi puisque les 700 salariés travaillant sur les lignes de productions de l’entreprise basée à Corbeil-Essonnes suivent le mouvement. « Seules 14 personnes ont rejoint leur poste de travail [ce matin] », annonce la CFTC dans son communiqué. « Et il n’y a eu que 6 personnes cet après-midi », précise à Silicon.fr Emmanuel Lhuillier, délégué syndical CFTC. « Il s’agit d’une action significative avec blocage du site au niveau des véhicules, camions de livraisons comme voitures particulières, mais nous n’empêchons pas les personnes qui veulent travailler de rejoindre leur poste. »

Origine de la grogne? La probable vente prochaine du site et le plan de restructuration qui suivra inévitablement. Une démarche jusqu’alors dissimulée par la direction des principaux actionnaires d’Altis, IBM et l’allemand Infineon. « Il aura fallu une expertise comptable demandée par le Comité d’Entreprise en 2005, pour que les actionnaires IBM et IFX avouent vouloir vendre le site », rappelle l’intersyndicale qui réunit les cinq syndicats nationaux (CFTC, CFDT, CFE-CGC, CGT et FO).

Si la vente du site semble se confirmer, les conditions restent obscures aux yeux des syndicats. « La direction souhaite vendre avant le 30 juin par le biais d’investisseurs qui doivent injecter 60 millions d’euros », explique Emmanuel Lhuillier. Mais à 15 jours de l’échéance « on n’a toujours pas de nom ».

Même le nombre de salariés touchés par la restructuration n’est pas fiable. « La direction évoque la suppression de 400 emplois[sur les 1415 qui restent, ndlr] mais nous n’avons signé aucun accord préalable pour engager les négociation », précise le délégué syndical, « on ignore donc la réalité de ce chiffre. » D’autant que Altis a connu sa dose de licenciements avec près de 2000 suppressions d’emplois depuis sa création en 1999 par IBM Microelectronics.

Une situation que les syndicats imputent à IBM. « Ce sont les actionnaires qui vont donner l’enveloppe, notamment IBM, qui veut se désengager aujourd’hui. » Les salariés reprochent notamment à Big Blue de ne pas tenir ses engagements vis-à-vis de ses anciens salariés du site de production, ceux d’IBM Microelectronics. « Le plan social ne prend pas en compte la totalité de la carrière des salariés d’Altis : en 1999, beaucoup d’entre eux travaillaient sous le badge IBM », rappelle le communiqué de la CFTC.

Les syndicats reprochent également à la direction de vouloir presser les négociations et, surtout, « de ne même pas être à la hauteur des conditions données en 2007« , ajoute Emmanuel Lhuillier. Il y a deux ans, IBM annonçait sa volonté de se désengager du site qui provoquait le départ de 456 salariés. Des conditions inacceptables aujourd’hui pour les syndicats au regard de la hausse du coût de la vie et de la crise économique, et qui veulent privilégier les plans de départ en préretraite plutôt que les licenciements. « Ce n’est pas aux salariés de payer,via les Assedic, les erreurs de l’entreprise », justifie le porte-parole de la CFTC. Ils réclament également des indemnités à hauteur de 1,2 mois de salaire par année travaillée ainsi qu’une prime de départ de 100.000 euros.

La dureté du conflit a bien été ressentie par la direction qui, selon Emmanuel Lhuillier, pourrait rencontrer les syndicats dans la soirée. Un comité d’entreprise est également programmé pour demain, mardi 16 juin. Si les négociations n’aboutissent pas, un plan de sortie pourrait être trouvé du côté de la municipalité, Serge Dassault, maire de Corbeil-Essonnes, s’était précédemment impliqué. Or, depuis l’invalidation de son élection, le patron de Dassault ferait marche arrière.

Quant à Infineon, qui auait pu être intéressé par une reprise du site dans la mesure où l’essentiel de la production d’Altis lui est destiné, « sa situation financière ne lui permet pas de supporter le coût financier de l’opération », selon le syndicaliste. Tous les regards se tournent donc vers IBM. La direction d’Altis n’a cependant pas encore répondu à nos appels pour le confirmer.