Arcep : «On ne peut indéfiniment augmenter les taxes sur les opérateurs»

Les Echos ont profité du colloque du jour animé par le régulateur des télécoms pour interroger son président, Jean-Ludovic Silicani, sur la situation du secteur en France. Morceaux choisis.

Les opérateurs français ont investi plus de 6 milliards d’euros en 2010. « C’est le niveau historiquement le plus élevé. », remarque Jean-Ludovic Silicani dans un entretien accordé aux à l’occasion du colloque que l’Arcep organisait aujourd’hui, mercredi 4 mai, autour de l’« Innovation, croissance et régulation ». Selon le président de l’Autorité les opérateurs en ont les moyens puisque leur chiffre d’affaires augmente de 1 à 2 % par an sur la téléphonie mobile alors que les dépenses moyennes des consommateurs tendent à baisser de 3 à 4 %. « Le volume croit donc d’environ 5 % chaque année. »

Mais tout n’est pas rose pour les opérateurs confrontés à une évolution des usages qu’ils ont parfois sous estimée ou subit face au dynamisme des acteurs américains, notamment. Particulièrement sur la problématique des producteurs de contenus qui profitent des infrastructures des opérateurs sans que ces derniers en tirent directement profit. Le problème ne pourra pas être réglé avant la transposition en droit français de la directive européenne Paquet Telecom (une adoption initialement prévue pour la fin mai, visiblement reportée). Selon le responsable. « […] l’Arcep pourra régler des différends entre opérateurs et fournisseurs de contenus, c’est-à-dire, par exemple, entre Orange et Google. Nous pourrons ainsi indiquer ce qui est équitable ou pas dans les relations techniques et tarifaires entre ces deux catégories d’acteurs. » D’ici là, il est urgent d’attendre.

Autre point sensible, la concurrence internationale pas toujours équitable. Le président n’affiche pas d’inquiètude démesurée face à l’offensive des acteurs chinois en Europe. Il note que les industries locales, notamment Alcatel-Lucent et Ericsson, affichent de bons résultats. A ses yeux, il faut « trouver des niches à forte valeur ajoutée, sur lesquelles les entreprises étrangères, notamment chinoises, sont, pour l’instant, moins présentes ». Mais jusqu’à quand?

Sur l’ouverture tant attendue de l’accès aux fréquences 4G qui promet le très haut débit mobile, l’appel d’offre sera lancé très prochainement, avant l’été. Les conditions d’accès aux licences doivent aménager de la place pour les plus petits opérateurs en limitant la quantité de fréquences détenues par opérateur. « Nous inciterons également les opérateurs ayant un réseau à l’ouvrir aux opérateurs mobiles virtuels. Enfin, la mutualisation des réseaux sera encouragée », précise Jean-Ludovic Silicani.

Si le dirigeant considère la récente augmentation sur les offres triple play (induite par l’augmentation de la TVA) comme raisonnable, il s’inquiète plutôt du modèle de subventionnement des téléphones dans les offres mobiles. « Ce système, qui laisse penser que le terminal est gratuit, encourage le changement fréquent de mobile… ce qui accroît les importations. »

Enfin, le président de l’Arcep considère, comme les opérateurs, que les taxes auxquelles ils sont soumis atteignent leurs limites et rogne dangereusement leur marge. « Il est indéniable que les opérateurs télécoms sont soumis à de nombreuses taxes spécifiques, que ce soit pour financer la création culturelle ou la fin de la publicité sur France Télévisions », reconnaît-il. Mais selon lui, « les pouvoirs publics ont sans doute compris qu’on ne peut indéfiniment augmenter les taxes sur les opérateurs de télécoms ». Surtout à un an des élections présidentielles.