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« Pour moi, il n’y a pas de tour parfait. Dès que l’on commence à analyser les données, on constate que des améliorations sont possibles.» Max Verstappen a été sacré une deuxième fois champion du monde en 2022, et pour lui, il n’y a aucun doute : l’exploitation de la donnée peut faire la différence entre une première et une deuxième place, être sur le podium ou ne pas marquer de points lors d’une course. 1

Et il n’a pas tort. Red Bull, Mercedes, Ferrari, McLaren,… 8 écuries sur 10 comptent dans leurs partenaires des entreprises spécialisées en données. Qu’il s’agisse de prendre un virage, de choisir ses pneus, ou encore d’anticiper un passage au stand, la donnée est aujourd’hui un outil indispensable dans la prise de décision.

Comment l’écurie Red Bull s’est-elle différenciée en 2022 des autres écuries en tant que pilotes mais également en tant que constructeur ?

La donnée : une innovation à croissance exponentielle

Si l’utilisation de la donnée est courante, ce n’est pourtant que depuis récemment que la donnée est exploitée à une capacité optimale. Au début de l’ère de la F1, les stratégistes se contentaient du chronomètre, des observations du pilote et des leurs.

La donnée n’est vraiment venue révolutionner les stratégies du sport automobile que ces dernières années, suite à des changements de réglementation. En effet, en 2009, les essais privés deviennent interdits, puis plus récemment, les essais physiques en soufflerie deviennent limités. Ainsi, pour pallier ces limitations et répondre aux nouvelles législations, l’analyse de la donnée a émergé.

Ce n’est un secret pour personne, depuis quelque temps déjà, Red Bull Racing excelle dans la F1, avec notamment le double champion du monde Max Verstappen et leur victoire en tant que constructeur en 2022, après un règne de 8 ans de Mercedes.

Leur victoire s’explique par diverses raisons, comme le talent du pilote ou les différentes caractéristiques de la voiture, mais aussi par l’utilisation de la donnée qui leur permet de maximiser leur performance, ce qui représente leur principale stratégie.

Red Bull : la victoire au bout de la donnée

Notamment, grâce à leur analyse réalisée sur les données passées, ils sont capables de s’adapter aux changements imprévus. Chaque week-end de course, l’infrastructure IT et l’équipe technique permettent de prendre une décision rapide, performante et rentable. Ainsi, les pilotes peuvent disposer d’une voiture quasiment sur mesure et adaptée à chaque course.

Pour cela, l’équipe de Christian Horner, team principal de l’équipe, analyse les données des courses précédentes pour créer des corrélations avec la course à venir. On cherche ici à identifier les facteurs communs qui ont un impact sur la performance de la voiture et donc le résultat de la course.

Ainsi, on saura quel pneu utiliser le jour J, comment ménager le moteur, le niveau d’essence optimal à prévoir… Christian Horner précise qu’il existe un millier de composants, dont 30 000 sur une voiture de F1, qui peuvent être modifiés d’une course à une autre et ainsi avoir un impact sur le résultat de la course”. C’est ce qu’on appelle un système empirique de test, ce qui est utilisé en machine learning. Même si cela semble être la raison de l’excellence de Red Bull, il faut tout de même rappeler que l’écurie complète l’analyse de données par une production de pièces en masse et des nombreux tests en piste.

Les sponsors data, véritables acteurs des courses

Il est intéressant de supposer une possible corrélation entre le résultat d’une écurie et ses sponsors data. A l’origine, les sponsors étaient majoritairement des marques de cigarettes ou d’alcool. Maintenant, afin d’être conformes à la réglementation en vigueur, les écuries se sont indiscutablement tournées vers les sponsors data.

Les écuries de tête, telles que Ferrari ou Red Bull, ont des partenaires assez conséquents, tels que AWS pour Ferrari, Oracle pour Red Bull ou encore Tibco Data et Hewlett Packard Enterprise pour Mercedes.

Alpine et McLaren, deux écuries similaires en termes de résultats, ont toutes deux des sponsors data importants, avec respectivement Microsoft et Google. Cependant, Alpine a pris le dessus sur McLaren en 2022, juste après avoir signé un partenariat avec data.ai. Certains peuvent y voir là l’action du nouveau partenariat data.

A contrario, les écuries comme Alpha Tauri, Haas, Williams, que l’on retrouve dans le bas du classement la saison dernière, n’ont pas ou peu de sponsors. Simple coïncidence, ou causalité ?

La donnée, encore freinée dans la course ?

La donnée, bien que largement exploitée dans la F1, n’en est pas encore à son apogée. Son utilisation peut même être limitée chez certaines écuries. De nos jours, avoir affaire à des clouds pour exploiter les « Big Data » (grandes quantités de données transactionnelles) semble indispensable.

C’est ce que proposent d’ailleurs de grandes entreprises comme Google et Amazon. En F1, l’utilisation de clouds peut être très complexe, de par le nombre de données exploitées, la diversité des sources, des formats, et de temps de recueil. Si Red Bull peut avoir accès à Oracle Cloud Infrastructure, ce n’est pas le cas de toutes les écuries.

Suivant cette logique, il faudrait aussi que toutes les données soient formatées pour l’utilisation de la data science. Comme Mercedes l’explique, cela n’est pas encore fait, mais représente leur but à atteindre. « Nous n’avons pas encore trouvé la solution, mais nous constatons qu’il nous faut construire des outils différents pour des usages différents. Notre objectif final est bien d’unifier toutes nos données pour avoir une seule source, et ensuite de les adapter à différents outils », analyse Geoff Willis, ingénieur spécialisé dans le sport automobile.

Cette unification permettra notamment d’avoir une vision globale de toutes les données, pour mieux comprendre les causes et raisons d’évènements occurrents. Nombreux sont ceux à émettre l’hypothèse qu’une mauvaise exploitation des données de Mercedes aurait un impact sur leurs travaux de R&D, ce qui pourrait impliquer une monoplace bien moins performante que celle de Red Bull cette saison.

Cyril Abiteboul, ancien Team Principal de Renault puis de Alpine, indique que Renault fut la première écurie à s’engager dans la data science, en construisant un jumeau numérique de l’ensemble de l’écurie, au lieu de, traditionnellement, un jumeau numérique d’une voiture seulement. Malheureusement, c’est une démarche de long terme dont les résultats ne sont pas immédiatement visibles et l’utilisation de ce centre de data science pour la création d’un jumeau numérique ne peut s’envisager pour des applications court terme, selon Cyril Abiteboul.

Conclusion

Aujourd’hui, les algorithmes de machine learning et deep learning sont très puissants et précis. L’erreur est minimisée. Cependant, en F1, elle peut être fatale. Une décision peut avoir pour conséquences un accident, avec son niveau de gravité. Des pilotes français comme Jules Bianchi ou Anthoine Hubert en ont payé de leur vie. De plus, l’incertitude est encore trop présente, ce qui augmente les taux d’erreur. Il est impossible de prévoir le comportement des autres pilotes.

La donnée peut être un précieux atout dans la F1, et les écuries l’ont bien compris, notamment avec Red Bull qui centre sa stratégie sur l’exploitation des données. Cependant la donnée peut encore largement être explorée pour pouvoir être exploitée à sa pleine capacité.

En effet, de par les nouvelles réglementations sur les budgets alloués à l’équipement, la performance d’une écurie ne pourra plus se justifier par la voiture en elle-même. Ainsi, c’est l’exploitation de la donnée qui, encore plus qu’aujourd’hui, permettra de différencier une écurie d’une autre, en plus bien sûr, du talent des pilotes et des équipes.

Rendez-vous très prochainement pour savoir comment les différentes écuries vont utiliser la donnée dans leur nouveau championnat et si l’une d’elles trouvera la solution pour faire de l’ombre à Red Bull.

Photo illustration : @Scuderia Ferrari Press Office

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