Bibliothèques numériques: un enjeu en or pour les spécialistes du scan

Kirtas, jeune entreprise américaine, propose une machine qui numérise automatiquement les ouvrages. Après les Etats-Unis, la société veut attaquer le marché français

Les projets de bibliothèque virtuelle annoncés par Google et par l’Europe font la une des journaux. Objectif, numériser des millions d’ouvrages afin d’en permettre l’accès en ligne. Mais qui aura en charge le lourd et difficile travail de numérisation ?

De nombreuses solutions existent. Mais jusqu’à présent, les machines sont manuelles et exigent une intervention humaine pour tourner chaque page à scanner. On imagine le temps passé sur chaque livre. Mais une société américaine aurait la solution avec une machine de 70 kilos (voir photo) qui permet de tourner automatiquement les pages une par une. Et avec délicatesse. C’est la promesse de Kirtas Technolgy, société dirigée par Lotfi Belkhir. La procédure semble assez simple. On pose le livre ouvert et un bras tourne les pages tandis qu’un autre les scanne. « La machine permet de numériser 1.200 pages par heure. Le coût par livre est de 10 à 15 dollars soit 80% de moins que les méthodes traditionnelles », explique-t-il. Un si grosse machine pour des livres si délicats ? Kirtas assure que son ‘bookscan’ prend ses précautions: « Sur 3,6 millions de pages numérisées par nos clients, seulement 3 ont été abîmées », nous explique Lofti Belkhir. « Mais c’est vrai qu’au départ, les bibliothécaires avaient un peu peur ». D’ailleurs, Kirtas indique des ouvrages très anciens, dont un de 1475 a été numérisé sans le moindre soucis. Kirtas arrive à un très bon moment. Si l’entreprise a déjà vendu 20 machines (à 120.000 euros l’unité) à des bibliothèques américaines, Kirtas estime que le marché va aujourd’hui s’accélérer. Les gouvernements, les universités, les scientifiques, les bibliothèques prennent aujourd’hui conscience de l’urgence à numériser les livres: « 560 tonnes d’ouvrage contiennent tout le savoir humain, si on ne numérise pas, ce patrimoine risque de disparaître. Tous le monde est d’accord sur ce risque ». Et d’ajouter: « 0,2% des livres disponibles dans le monde se trouvent actuellement sur le Web alors que les jeunes attendent qu’ils y soient tous! La numérisation est une nécessité vitale pour accéder à l’ensemble du patrimoine culturel et assurer sa survie pour les générations futures ». Dans le même temps, Google annonce son pharaonique projet tandis que l’Europe, emmené par la France, prépare sa contre-attaque. Des négociations confidentielles seraient en cours avec Google tandis qu’un rendez-vous avec la Bibliothèque Nationale de France a déjà pris rendez-vous avec Kirtas. « Car la France a pris la tête de la fronde anti-Google », souligne Lotfi Belkhir dont l’objectif est de faire de la France sa base en Europe. « Nous partons à la conquête de l’Hexagone, où le marché est en effervescence, et devrions signer un accord de distribution avec un acteur phare du marché », a-t-il ajouté sans autres précisions. « Le projet de Google a réveillé les esprits », explique-t-il. « C’est une très bonne chose. Par ailleurs, il ne faut pas craindre un monopole de leur part. Leur initiative sera forcément reprise par les autres géants du Web comme Yahoo ou Amazon. Et par les gouvernements européens bien sûr ». Mais Google a du temporairement arrêté son projet. La question des droits d’auteur pose en effet problème (voir notre article). Xerox n’y a pas cru

A l’origine, Lotfi Belkhir travaillait pour le géant américain Xerox. C’est dans cette entreprise qu’il a imagine le scanneur automatique pour livre.

Mais Xerox n’y a pas cru et n’a pas soutenu ce projet. « D’autant plus qu’à cette époque, en 2001, le groupe traversait une passe très difficile et cherchait à réduire drastiquement ses coûts », explique-t-il. Lotfi Belkhir est donc parti monté Kirtas et Xerox doit aujourd’hui s’en mordre les doigts.