BlackBerry : RIM a-t-il terminé de manger son pain blanc ?

Le fabricant canadien continue à surfer sur la vague du succès. Mais son
modèle particulier et une concurrence de plus en plus acharnée pourrait à terme
le pénaliser. Eléments de réponse avec Christophe Ducamp, responsable des
relations avec les opérateurs

7 millions d’utilisateurs dans le monde, un chiffre d’affaires en progression de 50% sur un an, des places de leader aux USA ou en France, 225 opérateurs partenaires, le canadien RIM (Research In Motion) a le sourire. Son terminal star, le BlackBerry, reste le joujou le plus prisé par les cadres et les dirigeants nomades. La sortie du Pearl permet désormais au fabricant d’adresser un marché plus grand public, lui aussi friand d’e-mail mobile. Et RIM a profité du dernier salon 3GSM de Barcelone pour présenter son nouveau 8800, modèle professionnel dont le design a été complètement revu.

Tout pourrait aller dans le meilleur des mondes pour RIM mais de nombreux observateurs (analystes, éditeurs, journalistes spécialisés) estiment que RIM est sur le point de négocier un virage très serré. S’il ne s’adapte pas, la success-story pourrait brutalement s’arrêter, expliquent-ils.

Ce pessimisme s’appuie sur deux constats. Le premier concerne la concurrence de plus en plus vive sur le marché de l’email mobile. Tous les grands fabricants proposent désormais des terminaux similaires au BlackBerry (clavier et push e-mail), notamment Nokia, Motorola ou Sony Ericsson. Et ces terminaux sont parfois dotés de fonctions supplémentaires comme le Wi-Fi ou le multimédia. Ces fabricants mettent le paquet pour rattrapper RIM et multiplient les lancements.

Des éditeurs occupent également le terrain. Certains sont spécialisés dans l’email mobile (Visto, Oz…) et vendent leurs solutions aux fabriquants de mobiles. D’autres, comme Microsoft, on développé leur push e-mail maison. La firme de Redmond l’a ainsi intégré à Windows Mobile qui équipe de plus en plus de PDA et de smartphones.

Si le BlackBerry profite toujours d’un effet de mode, cette concurrence acharnée pourrait finir par s’imposer.

Le système propriétaire utilisé par RIM inquiète également les observateurs. Alors que les utilisateurs sont séduits par des solutions interopérables (entre le PC et le mobile via Windows par exemple, notamment pour les applications métiers), RIM persiste dans le choix d’un système fermé. « RIM pourrait subir le syndrome Palm » affirment certains.

Pour autant, cette conjonction de menaces n’inquiète pas le fabricant. Christophe Ducamp, responsable des relations avec les opérateurs nous donne sa vision des faits.

Nokia, Motorola et les autres lancent à tour de bras des terminaux à clavier dédiés à l’email mobile. Représentent-ils une menace ?

Aujourd’hui, nous considérons qu’il y a de la place pour tous le monde. En effet, 90% du marché reste à conquérir, chacun peut donc développer ses activités. Nous sommes sereins et nous nous concentrons sur notre business. Par ailleurs, notre offre est supérieure à celle de la concurrence : notre push e-mail est fiable et sécurisé et l’intégration d’applications métiers est aisé.

Microsoft et son Windows Mobile adopte exactement le même discours et met en avant les synergies entre environnement PC en entreprise et flotte mobile. Qu’est-ce qui vous distingue d’eux ?

Outre des terminaux plus efficaces (autonomie, latence, consommation des données), nos outils demandent beaucoup moins de support et de formation. Le coût après-vente est très faible. Par ailleurs, l’apprentissage d’un BlackBerry prend quelques minutes, ce qui n’est toujours pas le cas des terminaux Windows.

Le manque d’ouverture du BlackBerry est parois critiquée. Un système propriétaire ne pénalise-t-il pas votre essor et le développement d’application métiers ?

70% des entreprises qui nous utilisent ont développé une application métier, ce qui prouve bien que le problème ne se pose pas. Les applicatifs peuvent être développés très rapidement et sont très simples à utiliser grâce à nos partenaires éditeurs. Les demandes des entreprises sont simples : simplicité et efficacité, et nous y répondons.

Développez-vous les partenariats avec les fabricants pour porter votre service dans les terminaux et ainsi élargir votre marché ?

Oui. On travaille de plus en plus avec les fabricants, notamment HTC (qui est également un fidèle partenaire de Windows Mobile, NDLR). Nous participons également au Programme Connect qui met en relation les éditeurs d’OS mobiles et les fournisseurs de solutions.

Avec le Pearl et de multiples accords avec les géants du Web, vous investissez massivement dans une cible plus grand public. Cette diversification porte-t-elle ses fruits ?

Le Pearl a été très bien accueilli par les opérateurs. On constate de très bonnes ventes chez les pro-consumers (qui découvrent le mail mobile) et les pros. Ce terminal nous permet d’élargir notre cible. Quant au portage des services Web dans les terminaux, c’est en effet stratégique. Il faut apporter un maximum d’informations aux utilisateurs.

Internet Mobile, c’est bien. Mais la très grande majorité de vos terminaux ne sont ni 3G, ni Wi-Fi…

La 3G c’est pour du data lourd. Notre système, qui retraite les mails, permet de réduire considérablement le poids des datas. Au niveau mondial, la demande se concentre plus sur l’Edge (2,5G) qui offre pour le moment une meilleure couverture.