‘Blog’: opportunité ou menace pour l’entreprise?

Les ‘weblogs’ personnels ou ‘blogs’ poussent comme champignons. Mais quel est l’intérêt de ce nouvel outil pour l’entreprise? Quelle utilisation en interne ou en externe? Quels sont les risques?

L’explosion des ‘weblogs’ s’apparente à celle des sites Internet au milieu des années 90. Sa croissance est exponentielle. Selon le moteur de recherche spécialisé Technocrati, il en existerait aujourd’hui 8 millions, dont 800.000 en France.

Thème à la mode, le ‘blog’ est sur toutes les bouches. Ressemblant de loin à des sites perso, les ‘blogs’ sont en fait des sites écrits par une ou plusieurs personnes. Ils sont très fréquemment mis à jour et permettent à tous de s’exprimer et surtout de faire véhiculer en temps réel des informations personnelles, économiques ou sociales. Des informations filtrées, commentées… Chacun lisant et interagissant sur les ‘blogs’ des uns et des autres. La réalisation, simple et rapide, d’un ‘blog’ permet à ce nouveau support et source d’information de s’imposer à grande vitesse. L’opinion des journalistes amateurs que sont les blogueurs devient de plus en plus influente à mesure que le phénomène des ‘blogs’ prend de l’ampleur. Mais jusqu’ici, le phénomène demeurait dans la sphère amateur (même si certains blogueurs disent être accrédités par la Maison Blanche!). Comme pour les sites Internet, les entreprises se tournent lentement mais sûrement vers ce nouvel outil collaboratif, simple et très souple. Car le ‘blog’ est un énorme levier de valeur ajoutée pour le monde de l’entreprise, comme l’ont expliqué la plupart des intervenants à la journée « Les Blogs: Blogs and social software » organisée au Sénat par SixAppart, une agence spécialisée dans ces développements. Feedback et réduction des coûts En entreprise, le ‘blog’ peut être utilisé de différentes façons. De façon externe, le blog d’une société s’apparenterait à un nouveau canal d’information au même titre qu’un site ‘corporate’. Mais par rapport à ce dernier, le ‘blog’ peut, grâce à son organisation, devenir un lieu privilégié pour les clients, les fournisseurs, les partenaires… Loïk Le Meur, vice président de SixAppart France, donne ainsi l’exemple de Nokia qui diffuse toutes sa communication via des fils RSS repris instantanément par les blogs. Mais selon le dirigeant, la principale plus-value d’un ‘blog’ à usage externe réside dans la possibilité de recevoir l’avis des clients de l’entreprise d’une manière beaucoup plus directe et plus réactive qu’un site classique ou qu’un centre d’appels. De nombreux dirigeants ont ainsi lancé leurs ‘blogs’ et récoltent le feedback des clients. Pour ces derniers, la proximité établie par le blog permet des réactions plus libres et plus riches. Dans ce cadre, le ‘blog’ améliore la visibilité de l’entreprise. En interne, le blog peut facilement rejoindre les outils classiques de gestion de projet. Selon Loik Le Meur, il est nettement plus facile de mener à bien un projet via un ‘blog’ que par le biais d’e-mails par exemple. « Sur un ‘weblog’, la communication est diffusée de manière inversée: le porteur du projet va expliquer son projet sur le ‘weblog’, puis informer en une seule fois toutes les personnes concernées. Celles-ci pourront à leur tour l’enrichir en publiant des commentaires ». Inutile donc de perdre du temps avec plusieurs e-mails dont il faut à chaque fois reprendre la source. Le blog peut donc permettre une économie de temps et donc d’argent. Le contenu des ‘weblogs’ de projets peut aussi être regroupé au sein de portails internes spécifiques. Chez Disney, un petit département a commencé comme cela et aujourd’hui c’est toute l’entreprise qui gère ses projets de cette manière. Communication non maîtrisée: un risque pour l’entreprise? Pour autant, le ‘blog’ peut constituer une arme à double tranchant pour l’entreprise. Une arme qui peut se révéler destructive. En interne, de nombreux collaborateurs créent leurs ‘blogs’ pour parler de leurs employeurs. Evidemment, on n’y trouve pas le discours officiel. Et ce qui fait la joie des journalistes (avec ces sources internes d’information) fait le malheur des directions. La multiplication des ‘blogs’ internes (on en compte 400 chez Microsoft!) court-circuite ou travestit la communication officielle et permet à des infos confidentielles de circuler. Un contrôle s’avère indispensable. Oui, mais dans la pratique, quasi impossible. Chacun peut devenir source d’information que ce soit au grand jour ou de manière confidentielle! Conséquence, les incidents se multiplient: ainsi, un salarié Microsoft qui avait eu la bonne idée de prendre en photo l’arrivée de Macintosh au siège de la firme s’est fait licencier. Et ce genre d’affaires n’arrive pas que dans les grands groupes. En janvier dernier, Joe Gordon, employé de la librairie Waterstone’s d’Edimbourg (Ecosse), a été licencié pour faute grave. Son employeur lui reprochait d’avoir tenu sur son ‘blog’ des propos qui discréditaient l’entreprise. Dans le même esprit, les grandes marques peuvent subir les assauts des ‘blogeurs’ passionnés qui ouvrent des blogs spécialisés sur les marques. Si les dirigeants et les cadres disposent ainsi d’un excellent outil d’étude permettant d’évaluer la perception de la marque et des produits, l’entreprise devient fatalement la cible de ‘blogs’ contestataires ou critiques. Ce qui peut faire très mal sur le plan commercial… De plus en plus de consommateurs recherchent en effet l’avis de blogueurs avant d’acheter. Et ces ‘blogs’ de marque, non officiels, sont souvent sans concessions. D’autres ‘blogs’ ont pour ambition de court-circuiter une marque. Ainsi, Netflix, célèbre loueur de DVD par correspondance, a un ‘blog’ non officiel ‘hacking Netflix’ qui est consulté par 30.000 personnes chaque mois! Bref, si le ‘blog’ s’avère une formidable opportunité pour le monde de l’entreprise, il exige une attention et une surveillance particulière. Des contraintes qui risquent de refroidir les patrons dans un premier temps. Mais ces derniers vont peut-être s’y mettre, au moins pour occuper le terrain. Une tendance similaire à celle des sites Web classiques sur Internet : dans les années 90, peu de ces chefs d’entreprise croyaient au succès d’Internet…