Bouygues Telecom attaque Numericable-SFR pour manquement contractuel

Bouygues Telecom conteste certaines conditions du contrat qui le lie à Numericable dans le cadre des offres d’accès très haut débit en marque blanche. Et réclame 53 millions d’euros de dédommagement.

Bouygues Telecom et Numericable-SFR risquent de se retrouver prochainement… devant les tribunaux. La filiale télécom du géant du BTP attaque son concurrent, et néanmoins fournisseur, pour manquement contractuel. Le 24 juillet dernier, Bouygues Telecom a assigné la filiale d’Altice, le groupe télécoms dirigé par Patrick Drahi devant le tribunal de commerce de Paris et réclame 53 millions d’euros de dédommagements.

Depuis novembre 2013

Le litige porte sur les offres d’accès Internet. Pour proposer le très haut débit à ses abonnés, Bouygues Telecom s’appuie notamment sur le réseau fibre/câble très haut débit (THD) de Numericable (NC Numericable à l’époque), et sa filiale Completel dédiée au marché des entreprises, dans le cadre d’un contrat signé en mai 2009 par les deux opérateurs. Environ 400 000 clients Bouygues Telecom accèdent ainsi à Internet depuis le réseau de Numericable qui commercialise le service en marque blanche. Le contrat avait déjà fait l’objet d’une réclamation en novembre 2013. Mais les deux parties n’ont visiblement pas trouvé de terrain d’entente. Au-delà des dédommagements financiers, Bouygues Telecom demande également l’annulation de certaines clauses du contrat.

Bouygues Telecom a déposé sa plainte un mois à peine après avoir refusé l’offre de rachat d’Altice pour 10 milliards d’euros. Fin juillet, l’Autorité de la concurrence approuvait de son côté, à quelques modifications près, les offres de détails d’accès aux quelques 9 millions de prises du réseau THD (30 Mbit/s et plus) de Numericable. Destinés aux opérateurs concurrents, ces offres de gros (bitstream ou marque blanche) leur permettront de déployer rapidement des forfaits THD à leurs utilisateurs finaux en attendant qu’ils déploient leurs propres réseaux fibre (FTTH). Et cela dans des conditions commerciales soutenables pour les opérateurs virtuels. L’ouverture du réseau de la filiale d’Altice figurait parmi les conditions imposées par l’Autorité de la concurrence dans le cadre du rachat de SFR par Numericable.

Un moyen de pression ?

L’attaque en justice de la société dirigée par Olivier Roussat est-elle un moyen pour ce dernier de faire pression sur son fournisseur afin d’obtenir de meilleurs tarifs, comme le suggère un acteur anonyme du dossier cité par L’Express ? Il est certain qu’une renégociation du contrat ne pourrait que faire du bien aux finances malmenées de Bouygues Telecom (qui perdait encore 62 millions d’euros au premier trimestre 2015 malgré la hausse des clients). Mais Bouygues Telecom ne dispose pas d’énormes moyens de pression. D’abord parce que ses 400 000 clients en marque blanche pèsent peu sur les 6,4 millions d’abonnés de Numericable au total (d’autant que l’opérateur ne peut les retirer du jour au lendemain du réseau de son fournisseur). Ensuite, Bouygues Telecom a signé des accords de co-investissements avec Orange et SFR en 2010 pour déployer des réseaux FTTH. Bouygues vise les deux millions de prises optiques d’ici la fin de l’année. Il ne restera donc pas client de Numericable-SFR éternellement.

Dans tous les cas, « les sociétés NC Numericable et Completel entendent contester l’ensemble des demandes de la société Bouygues Telecom », fait savoir le groupe Altice dans les comptes consolidés de Numericable-SFR du premier semestre 2015.


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