Bull et Cray vont concevoir les premiers supercalculateurs ARM

Le Français va construire un prototype de supercalculateur à base de puces ARM ThunderX2, des processeurs Cavium pensés pour le calcul haute performance. De son côté, Cray bâtit un système permettant de tester le potentiel réel de cette architecture.

Le constructeur Cray va construire, pour les besoins d’un consortium comprenant 4 universités anglaises, ce qui aux yeux des experts apparaît comme le 1er vrai supercalculateur à base de puces ARM. Baptisée Isambard, la machine vise précisément à mieux mesurer le potentiel de cette architecture pour le calcul hautes performances. L’installation d’Isambard débutera en mars et doit s’achever avant la fin de l’année, selon Top500.org, le site qui suit l’évolution des principaux supercalculateurs de la planète et en agrège les performances.

« Il s’agit de l’une des premières, si ce n’est la première initiative sérieuse pour mettre au point une machine de production à grande échelle basée sur l’architecture ARMv8 64-bit, explique le professeur Simon McIntosh-Smith, le leader de ce projet et professeur de calcul haute performance (HPC) à l’université de Bristol. C’est aussi la première fois que Cray annonce explicitement un produit ARMv8 pour autre chose que du prototypage. » Notons toutefois que Fujitsu, soutien des puces Sparc d’Oracle, pourrait lui aussi basculer vers l’architecture ARM pour la construction d’un futur supercalculateur au Japon.

ARM pour économiser de l’énergie

Isambard, dévoilé lors d’une conférence sur le HPC à Barcelone, sera basé sur la plate-forme Cray CS400, qui repose habituellement sur des puces Intel Xeon avec, en option, des Xeon Phi et des accélérateurs GPU fournis par Nvidia. Cray n’a pas encore confirmé par une annonce officielle que l’architecture ARM sera bien supportée sur sa plate-forme CS400.

Le supercalculateur, qui devrait fournir une puissance se chiffrant en dizaines de téraflops selon Top500.org, embarquera 10 000 cœurs ARM à 64 bits, en plus de processeurs x86 et de puces Nvidia P100. Cette diversité s’explique par un des objectifs d’Isambard, qui consiste à comparer les performances d’une application sur différentes architectures installées dans une même machine. La météo anglaise devrait étudier la capacité des puces ARM à faire tourner ses simulations, et à dégager des économies d’énergie, une des promesses clefs de cette architecture. Le projet coûtera 4,7 millions de livres sur 3 ans, selon les projections du professeur McIntosh-Smith.

Bull : ARM pour l’exascale

Ni Cray, ni Simon McIntosh-Smith n’ont précisé quel serait le fournisseur des puces ARM. Soulignons simplement que le constructeur américain travaillait à des systèmes ARM avec Cavium jusqu’en 2014.  Pour Top500.org, le système devrait donc être basé sur les processeurs ThunderX ou ThunderX2, des puces de 54 cœurs pensées pour le HPC et attendues pour cette année. C’est aussi cette dernière puce qui servira de base au prototype Mont Blanc, développé par Bull (qui fait partie d’Atos). Le Français compte en effet sur les puces ARM pour amener son architecture HPC baptisée Sequana (en photo, sa présentation officielle en avril dernier) vers l’exascale, la prochaine frontière pour le supercalcul (ce qui représente 1 000 pétaflops, là où le système actuel le plus puissant dépasse tout juste les 100 pétaflops).

Le projet européen Mont Blanc a, en réalité, démarré en 2011 et vise à développer des systèmes HPC peu voraces en énergie, d’où l’intérêt marqué pour ARM mais aussi pour les GPU (puces graphiques). Financé par les fonds de la Commission européenne dans le cadre du programme Horizon 2020, le projet a abordé une nouvelle phase en 2015 avec la conception d’un prototype confiée à Bull. Selon le site officiel du projet Mont Blanc, cette phase du programme, dotée d’un budget de 7,9 millions d’euros, vise à aboutir à « un nouveau niveau en matière de ratio performance / consommation énergétique pour l’exécution de vraies applications ».

Pour l’heure, Bull ne vend que des systèmes HPC à base de x86, mais a déjà développé un premier prototype ARM en 2015, déjà dans le cadre du projet Mont Blanc. Cette machine, un cluster de deux racks, hébergeait 2 160 cœurs de processeurs ARM (alors des Samsung Exynos 5 Dual) et 1 080 GPU, dans un châssis BullX renfermant 72 lames. Le nouveau prototype aura, lui, une tout autre dimension. Le communiqué officiel, annonçant le lancement de cette nouvelle phase de Mont Blanc, ne précise toutefois pas de date pour la mise au point du prototype. A l’origine, le projet européen prévoyait de conclure cette étape en septembre 2016, preuve que le calendrier a, depuis, largement dérapé.

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