Chronique : le regard de Stéphane Boukris au CES 2018

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Co-fondateur du groupe Ametix et co-organisateur du concours Meilleur Dev de France, Stéphane Boukris dresse un bilan de sa visite au CES 2018.

Si, en lisant le titre de cet article, vous pensez retomber sur l’écran 8K de LG ou bien l’omniprésence d’Alexa, vous pouvez vous arrêtez ici.

De retour à Paris, j’ai décidé de partager avec vous, non pas les tendances technologiques que l’on a pu lire ici et là à de nombreuses reprises. Mais plutôt un retour d’expérience sur ce qu’est le Consumer Electronic Show, et comment cet événement devenu incontournable permet de créer de la valeur pour une entreprise.

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Imaginez 170 000 technophiles (l’équivalent de 3 Stades de France), qui déambulent simultanément dans une seule et même rue (Le « Las Vegas Boulevard » ou « Strip » pour les habitués) pendant 4 jours, afin de faire du business, mais aussi avides de savoir ce que l’avenir nous réserve.

Armé d’une bonne paire de baskets, beaucoup d’énergie et une bonne résistance au sommeil, c’est avec une organisation quasi-militaire préparée de longue date que l’on peut profiter pleinement du CES.

Le Méga-Salon

Le salon est composé de plusieurs espaces assez éloignés les uns des autres. Pour ma part, je me suis concentré sur le Sands, qui abritait des grands groupes à un étage, l’Eureka Park plutôt orienté start-up à l’étage inférieur, et le LVCC, à quelques kilomètres de là, où l’on retrouvait les géants de l’automobile (Nissan, Ford …) et de l’électronique (Samsung, LG …).

Sur ce dernier, il y a d’ailleurs eu une coupure de courant notable de deux heures où nous avons été évacués du site, ce qui est assez ironique sachant que le salon est historiquement celui de l’électronique.

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CES 2018 : la voiture intelligente selon Nissan

On peut se rendre compte de l’importance du CES par les publicités débordantes et parfois envahissantes, du SkyTrain brandé Google, au restaurant brandé McAfee, en passant par la limousine Adobe.

Au CES, on a la chance d’essayer toutes les innovations qui vont s’inscrire dans le monde de demain, comme le Foldimate, véritable table à repasser automatique, ou le tapis de course connecté Peloton qui permet de suivre un cours à n’importe quelle heure du jour et de la nuit.

Cependant, il faut reconnaître qu’il y a un côté frustrant en tant que consommateur, vu qu’on n’a pas le droit d’acheter quoi que ce soit. Même si certains exposants, nous confient discrètement qu’il y a quand même quelques possibilités en fin de salon.

Dans l’avion qui m’a ramené vers Paris, j’étais assis à côté du Chinois Yang Long (MD Electronics) qui m’explique que, pour lui, ce salon n’est pas de la vente, c’est du marketing et des relations presse.

La réflexion n’est pas nécessairement ROIste, mais plutôt un investissement qui sert à prendre date et à marquer des points.

Signe de la démocratisation du numérique, on aperçoit durant toute la durée du CES, des sportifs comme Usain Bolt, des artistes comme Will I Am, venir se prêter au jeu.

J’ai eu par exemple le privilège d’échanger quelques mots avec Stevie Wonder qui me vantait les mérites du tout nouveau « smart » piano.

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Stevie Wonder au CES 2018

La place de la France

La France est incroyablement bien représentée, tout d’abord par ses grands groupes (notamment Le Groupe La Poste, idéalement situé, qui a mis en avant pour l’occasion son développement dans le secteur de l’e-santé), ses start-up (Serious Factory, Dreem, Short Edition, Quantmetry…), et enfin la représentation nationale en la personne de Mounir Mahjoubi, Secrétaire d’Etat au numérique, qui a une fois encore montré avec sa bienveillance habituelle, que notre pays dispose d’un important potentiel et d’une très grande créativité pour embrasser les enjeux de la révolution technologique.

Stanislas De Crevoisier (Total), un habitué du CES, m’explique qu’il a malheureusement noté de son côté la disparition de quelques-uns de nos champions tels que Parrot qui disposait d’une vraie force de frappe au CES par le passé.

Notons également la présence d’autres pays tels que la Corée du Sud, Israël, le Japon ou encore la Chine dont les exposants et visiteurs étaient venus en nombre.

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La prochaine génération de vélos, développée par Yellow (La Poste)

Le Business dans tout ça ?

Pour les entreprises B2B, il y a un très grand nombre d’opportunités pour faire des affaires au CES.
Il y a tout d’abord, ces 5000 dirigeants français qui sont présents et beaucoup plus accessibles que dans l’hexagone.

Les Présidents de grands groupes (Carlos Ghosn de Renault, Alain Afflelou…), les directions du digital et de l’innovation (Olivier Abecassis de TF1, Julien Huel de Barrière, Eric Caen de CMA-CGM Arieh Ghnassia de Casino), les directions IT de Total, Malakoff Médéric ou de Canal Plus, les fonds (Iris Capital), ou tout simplement les référents sur leurs marchés tels que Paul Amsellem dans le mobile, Vidal Chriqui pour la blockchain ou Pascal Chevalier dans les médias.

Il y a par ailleurs les délégations, comme celle de la Fédération Française de l’Assurance et celle du CIGREF qui comptaient chacune un grand nombre de décideurs.

Enfin, il y a les soirées. Pas besoin d’être VIP pour y participer, il suffit juste d’être au courant des heures et des lieux.

La première d’entre elles était la soirée CES Unveiled à laquelle 1500 journalistes étaient présents, et où l’on a pu voir entre autres le plébiscite de la start-up Française Cosmo Connected qui réalise des casques connectés améliorant de manière significative la sécurité des pilotes.

Il y avait aussi, la soirée Twitter, la soirée Google, les soirées improvisées, et aussi la soirée de la French Tech au Flamingo. Quantitativement, c’était une réussite. Le Tout Paris (enfin celui de Las Vegas) était là, du Président des BigBoss Hervé Bloch à l’avocat du numérique Daniel Khan.

L’an prochain, il faudra sans doute revoir simplement la partie catering qui a laissé de nombreux start-uppers sur leur faim.

Le fait de se retrouver à l’autre bout du monde, avec 9 heures de décalage horaire avec la France, et parfois dans le hall d’un hôtel, à une table de jeux, ou dans l’avion, permet de créer des liens ou de les renforcer.

Aussi étonnant que ça puisse paraitre, j’ai pu constater que le CES 2018 est un bon prétexte pour des Français de faire des affaires avec d’autres Français, mais à plusieurs milliers de kilomètres de notre quotidien hexagonal.

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Espace French Tech à l’Eureka Park

L’intérêt d’échanger avec les entreprises d’autres pays permet surtout de comprendre la culture business des autres, leur façon de développer des produits, et aussi c’est toujours intéressant de savoir comment ils nous perçoivent comme marché et l’image que nous reflétons à l’international.

En conclusion, je dirais que c’est une expérience originale, intéressante et enrichissante.

S’il est clair que nous manquons cruellement de temps pendant ces quatre jours, je pense qu’en s’organisant bien il est possible de vivre ce temps fort business sans regrets et d’en récolter les fruits à court ou moyen terme, à condition d’être organisé, avenant et de rester sérieux sans se prendre au sérieux.

Stéphane Boukris est un chef d’entreprise et investisseur dans le secteur du numérique. Il est l’un des co-fondateurs du groupe Ametix (revendu à Docapost en 2017) qui accompagne les organisations et les hommes dans leur transformation digitale. Il est lauréat de la BFM Académie en 2008, des Favor’i de la meilleure innovation en 2010 (FEVAD). Stéphane est également investisseur dans de nombreuses start-ups.