CITE DES SITES: des Léonard aux Canotiers

Jadis, naguère, quand on allait à la neige, pour passer quelques jours dans la station ‘high life’ de Crans-Montana, on s’arrêtait volontiers à Martigny. Mais qu’allait-on y faire?

Cette toute petite ville permettait et permet toujours que l’on y déguste la seule production locale, un vin blanc nommé « fendant » qui est une petite merveille. Depuis est arrivé un miracle… En 1976, un jeune entrepreneur d’origine italienne, Léonard Gianadda, au hasard d’une fondation d’immeuble, découvre les vestiges d’un temple gallo-romain… Alors, tout est changé, Martigny, nouvelle Alexandrie, devint la ville d’un ensemble sans équivalent: musée gallo-romain, expositions périodiques de très haut niveau, musée de l’automobile, parc de sculptures… La fondation Gianadda porte le nom de Pierre, le frère de Léonard décédé tragiquement dans un accident d’avion. «Le musée gallo-romain trace les grands moments de Martigny de ses poteries usuelles à ses bronzes uniques… Le musée de l’automobile, le plus beau de Suisse, met à la parade des voitures d’exception, toutes en état de marche? Bugatti, Daimler, Mercédès, Berliet… Dans le parc, des sculptures émaillent les gazons de la fondation?Calder bien sûr le maître des mobiles, et puis Rodin, Ernst, Dubuffet, César et son doigt vers le ciel.» Sympathique, un peu naïf ? Nous extrayons ces lignes d’un site sympathique, un peu naïf, consacré à Martigny: on y énumère les personnalités qui nous «ont précédés dans cette ville»: Jules César, Charlemagne, Napoléon Bonaparte, Goethe, Jean-Jacques Rousseau, Stendhal, Chateaubriand, Lamartine, Lord Byron, Alexandre Dumas, Gustave Flaubert, Dickens, Maupassant, Wagner, Liszt, Stravinski, Dostoievski, Jean-Louis Barrault, Louis Jouvet, Fernandel, Mistinguett (?) et? François Mitterrand. Quel beau livre d’or. Et encore je n’ai pas recopié tous les noms, disparates quoique prestigieux, assurément… Les fondements de la bourgeoisie Sur le site www.martigny.ch, où un diaporama et des zooms nous montrent les principaux points de la ville, on nous expose les fondements de la bourgeoisie à Martigny: «Jusqu’au XVIIème siècle, il n’y eut guère de difficultés à se faire agréger à la Bourgeoisie. Celle-ci ayant acquis, petit à petit, ses lettres de noblesse, devenant plus puissante et plus riche, l’esprit de caste commença à l’envahir et les autorités établirent une sorte de barrage pour filtrer les aspirants, en fixant une finance d’admission qui augmentera sans cesse et en créant des formalités préalables.» Ne devenait pas Bourgeois qui voulait. Avant d’obtenir ce titre envié, le candidat était mis à l’épreuve par deux degrés de probation : le premier était celui de « toléré » ; ce mot voulait bien dire ce qu’il voulait dire? Le deuxième était celui d’habitant: celui-ci avait la certitude de ne pouvoir pas être chassé d’un jour à l’autre et il pouvait louer sa maison sans s’exposer à des tracasseries. Enfin, après une attente de 5 ou 6 ans, l’habitant pouvait essayer de briguer les suffrages des Bourgeois pour obtenir le titre qu’il convoitait et devenir membre de la noble Bourgeoisie.» Illustration de ce principe de bourgeoisie, le recensement. Il y avait 10.540 habitants en 1970 et 15.051 en 2002, soit une augmentation inimaginable de près de 50%. Eh bien dans les chiffres de ces recensements sont précisés le nombre de Valaisans, de Confédérés et de (vrais) étrangers, qui sont tout de même en ce moment 4.395. Comment une si petite ville a pu connaître une telle croissance de population ? Une seule explication: la Fondation Pierre Gianadda! Laquelle également attire un nombre de visiteurs inimaginable, venus de toute la Suisse et des pays circonvoisins. «Léonard de Vinci, expo didactique, interactive www.gianadda.ch nous apprend qu’au Vieil Arsenal de la fondation, d’avril à novembre prochain, une exposition sera consacrée à Léonard de Vinci-l’inventeur. On y verra quelques-unes de ses innombrables inventions. «L’exposition est consacrée à l’homme fascinant que fut Léonard de Vinci (1452-1519) et elle donne une vue approfondie de l’activité de ce génie universel. La fascination qu’il exerce encore sur nous, quelque 500 ans plus tard, est due à sa curiosité et à sa passion indéfectible d’explorer le monde et ses secrets.» «Les exploits d’inventeur et de chercheur de ce savant universel fixent des repères dans le développement de l’humanité. Léonard de Vinci caressait le rêve de voler et d’être mobile.» «On lui doit l’invention de l’hélicoptère et du parachute, de la première automobile propulsée par ressort et de la bicyclette.» «Léonard a anticipé le scaphandre, a développé des instruments optiques et s’est toujours préoccupé de mesurer exactement le temps.» «Réalisés selon ses croquis, les modèles mobiles que le visiteur peut prendre en main permettent de saisir ? au sens propre du terme ? les idées de Léonard.» (cf. Le dessin de De Vinci : L’homme de Vitruve, 1490. Plume et encre, aquarelle légère sur crayon argenté, Galleria dell’Accademia, Venise, reproduit à la fin de cet article) De Paul Klee à Modigliani… À la Fondation elle-même, Léonard (Gianadda) organise d’innombrables expositions. Au commencement (1980) il y eut Paul Klee et, depuis, on ne va pas les citer tous, Picasso, Goya, Giacometti, Berthe Morisot, Marie Laurencin, Toulouse-Lautrec, Modigliani (avec un tableau peint des deux côtés et ainsi exposé, qui appartient, je crois, à la Fondation), Dufy, Gauguin, Rodin, et combien d’autres. Et Camille Claudel. À cette occasion, en 1990, on avait eu l’idée avec Reine-Marie Paris, biographe de Camille, sa grand-tante, de proposer à Léonard un spectacle pour le vernissage, spectacle monté par Marie-Rose Carlié, Jean Négroni et le pianiste Jean-Pierre Armengaud. «Pourrait-on aussi demander à Madeleine Robinson d’être de la partie?» dit Gianadda. Il pensait à elle parce que la grande comédienne s’était retirée dans les abords de Martigny. La soirée fut un triomphe devant un millier de spectateurs et l’exposition plus encore. Si bien que le musée Rodin demanda à Léonard Gianadda de la lui prêter. Et la même exposition eut le même succès, quoiqu’elle fut moins bien «habillée» rue de Varenne qu’au fin fond du Valais. Gianadda académicien On a beaucoup parlé récemment de l’élection à l’Institut d’un ancien chef d’État. On a moins parlé – et c’est dommage – de l’entrée à l’Institut (Académie des Beaux-Arts) de Léonard Gianadda. La France sait parfois être reconnaissante ! Où retrouver la célèbre Phillips Collection…

De la fin mai à la fin septembre est prévue une nouvelle exposition exceptionnelle, celle des chefs-d’oeuvre de la Phillips Collection de Washington. La Phillips Collection recèle des tableaux de choix, des oeuvres de Cézanne, Courbet, Daumier, Degas, Van Gogh, Monet, etc. Et surtout

Le Déjeuner des canotiers de Renoir, qui bénéficie dans son musée américain d’une salle personnelle où l’on peut s’éblouir de la beauté de cette oeuvre. Qu’on me pardonne un nouveau souvenir personnel. J’ai visité il y a quelques années la Phillips Collection. Frappé par le français parfait qu’employait une gardienne noire, je lui demandai indiscrètement d’où elle venait : «J’ai été élevée à Paris – me répondit-elle – mon père y était ambassadeur d’Éthiopie.» Puis-je suggérer à Léonard Gianadda de convier cette femme à accompagner sa collection à Martigny ?…