CITE DES SITES : Fr. Mauriac, « poisson rouge », par Le Greco, sur le Net

Portrait en ligne de François Mauriac, académicien, écrivain trop vite oublié, chroniqueur à L’Express, entre autres, et grand amateur de vins – de qualité mais avec modération, bien sûr !

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Le poisson rouge dans les bénitiers de Barcelone», voilà comment était surnommé François Mauriac par l’hebdomadaire Gringoire, périodique aigre de droite extrême, admirablement fait et animé en particulier par le pamphlétaire Henri Béraud, qui paya cher sa haine de la Grande-Bretagne («Faut-il réduire l’Angleterre en esclavage ?» demandait-il. ) En contrepoint, André Maurois, son compagnon chez Grasset et à l’Académie, disait de Mauriac qu’il avait une « Tête de grand d’Espagne transfigurée par Le Greco.» Il était très catholique. En 1936 il prit fait et cause contre Franco, en compagnie d’au moins deux autres fidèles à l’Église, Georges Bernanos et Jacques Maritain, tandis que Paul Claudel, moins bien inspiré que quelques années plus tard, écrivait une Ode à Franco? Comment cet homme, grand bourgeois, illustre romancier, pouvait-il entrer en collusion avec une gauche vilipendée par les bien-pensants ? www.karimbitar.org/francoismauriac qui cite la revue des Anciens Élèves de l’ENA nous le rappelle sous la plume de Violaine Massenet : «La rencontre entre François Mauriac et la politique remonte à l’enfance. Lors d’un déjeuner familial, son oncle Louis, homme intègre et fantasque, entendant évoquer une fois de plus la culpabilité de Dreyfus, se lève et quitte la table. Mauriac a six ans. Bien des années plus tard, il se souviendra du silence pesant qui suivit cet esclandre et du malaise qu’il avait alors ressenti. Dans le droit fil de la pensée de son père, disparu trop tôt, et dont les cahiers intimes révèlent les ardentes convictions républicaines, il évoque en 1951 «le criminel détournement de la conscience catholique » qui a marqué l’affaire Dreyfus (La Pierre d’achoppement). Pour lui, ce drame national est la référence historique et personnelle majeure puisque, d’emblée, il pose la question du comportement des catholiques à l’égard de la vérité et celle du sursaut individuel devant les frénésies collectives. « Il y aura ensuite la rencontre avec Le Sillon de Marc Sangnier et la tentative (la tentation ?) d’adhérer au courant social-chrétien. Sangnier a réussi à éveiller en lui une mauvaise conscience qui ne s’endormira plus. La rupture interviendra en 1907: le caractère mauriacien est rebelle aux embrigadements. Mais dans ses Mémoires politiques, il reconnaîtra sa dette : « Le Sillon ne m’en avait pas moins donné dès mes dix-huit ans cette vue simple et nette qui, trente années plus tard, devait me faire prendre parti contre le général Franco et contre la hiérarchie espagnole, d’abord pour le peuple et le clergé basque, puis pour le prolétariat d’Espagne – et cela en tant que catholique et parce que catholique ».Bien avant Jacques Chirac, Edgar Faure, qui était Président du Conseil, décida en fin 1955 de dissoudre l’Assemblée Nationale. Les élections, le 2 janvier 1956, donnèrent un majorité confuse dont le président Coty dégagea un leader plutôt contesté, Guy Mollet, alors qu’on espérait Pierre Mendès France, mais ? surtout ? une cinquantaine de poujadistes parmi lesquels le tout jeune Jean-Marie Le Pen. J’étais à l’Express ce soir là et je vis la consternation sur le visage de François Mauriac. Ce qui l’incita à poursuivre son combat dans cet hebdomadaire fondé par Jean-Jacques Servan-Schreiber qui était son cadet de 39 ans ; le brillant jouvenceau aurait pu être le petit-fils du grand auteur. Ne serait-ce pas ainsi que se forment les bonnes associations ? Mauriac avait une petite-fille qui est devenue célèbre, Anne Wiazemsky, à la fois comédienne (elle est la femme de Jean-Luc Godard) et romancière chez Gallimard. Dans le site de l’Express, Martine de Rabaudy rapporte ces propos d’ Anne Wiazemsky : «A 12 ans, je donnais des contes illisibles à ma grand-mère, Jeanne Mauriac, pour qu’elle les tape à la machine. Souvent, il lui arrivait de déborder sur l’heure du Bloc-Notes (la chronique politique que François Mauriac donnait à l’époque à L’Express) et, sagement, mon grand-père attendait son tour.» Son métier de romancière lui offre aussi le pouvoir de redonner vie à ses ancêtres russes inconnus. (?) A Yalta, dans cette Crimée au climat de Côte d’Azur, des aristocrates insouciants ont vu leur fin venir, sans y croire jamais. «Les exilés ne parlent pas. Lorsque mon père demanda ma mère en mariage, François Mauriac, ignorant tout de lui, appela son ami Henri Troyat pour qu’il l’éclaire, persuadé que sa fille épousait un chauffeur de taxi.» Il existe un site och.free.fr/oenologie/citationsvin/CitationsVin14.htmqui s’efforce de rassembler tout ce qui a trait au vin. François Mauriac, né dans le plus noble des vins, y a une part belle : Ma tante m’enseignait qu’il est méprisable de s’adonner à tout autre commerce que celui du vin. » Trois attitudes face à la bonne « société » des Chartrons : L’admiration :  » Depuis que les Tuileries ont brûlé, la noblesse de France a perdu son emploi ; mais les chais de Bordeaux sont éternels et le vin royal de chez nous a le droit d’ennoblir les familles qui le servent. » La distance critique :  » Ceux qui vendaient du vin fin avaient le pas sur ceux qui vendaient aussi du vin ordinaire et ceux qui vendaient du vin ordinaire n’étaient guère plus considérés qu’un médecin ou qu’un infime maître de conférence à l’Université. » La dérision : « Cette profession confère ici une sorte de noblesse (…) Ils ont de larges costumes anglais, s’intéressent au football; ils ne lisent jamais et n’ont vu d’autres peintures que celles de leurs étonnants barbouilleurs locaux. Ils ne voyagent pas, ayant tous leur propriété à Pessac. Beaucoup vont cependant jusqu’à Arcachon, c’est pour eux le bout du monde. » « L’?uvre de Mauriac est vigoureusement originale, rappelle www.occitanie.org/occitans/mauriac.html qui en fait, pourquoi pas ? un écrivain occitan. Catholique, il a su décrire les exigences de la sensualité, les ravages que le mal opère dans les âmes, ce besoin profond de Dieu. Son oeuvre n’est pas non plus exempte d’une poésie frémissante. « De ses origines bordelaises, il gardera les parfums violents, les couleurs embrasées de la terre méridionale qui constitueront non seulement un décor mais aussi un personnage essentiel de ses romans.» Le terroir reste attaché à François Mauriac et www.routefmauriac.org/ nous décrit : « En venant de Bordeaux, de Latresne à Saint Maixant La Route François Mauriac (D-10 sur les cartes routières) chemine le long des coteaux et longe la Garonne aux courbes sinueuses. Elle traverse l7 bourgs et villages qui souvent dominent la vallée de la rivière et qui méritent le détour ou une pause car tous sont riches d’un patrimoine témoin de plusieurs siècles d’histoire. » C’est à Saint-Maixant qu’est la maison où Mauriac a écrit «À Malagar, pour moi l’éternité commence ». Un site nous accueille, https://malagar.asso.fr/html/flash_f.html pour nous guider dans ce domaine transformé en centre culturel par le Conseil régional d’Aquitaine qui est la seule institution régionale de France à posséder une maison d’écrivain. Avis à Rhône-Alpes pour le château de Brangues où repose Paul Claudel?Le site Malagar publie les références d’à peu près tous les sites consacrés aux lettres, c’est très appréciable. www.academie-francaise.fr/immortels/base/academiciens/, très précis, analyse fort bien Mauriac : Satires cruelles du pharisianisme bourgeois, ses romans sont avant tout l’?uvre d’un « catholique qui écrit » comme il se plaisait à se définir lui-même. C’est le combat en chaque homme entre Dieu et Mammon, pour reprendre le titre de l’un de ses essais, que Mauriac décrit, sondant les abîmes du mal et cherchant à percer les mystères de la Rédemption. Au faîte de sa gloire, François Mauriac allait modifier, au milieu des années 1930, son regard sur le monde ; délaissant quelque peu la littérature, il allait s’engager dans le combat politique. S’éloignant progressivement des positions conservatrices de sa jeunesse, il entreprit de dénoncer la menace fasciste, condamnant l’intervention italienne en Éthiopie, puis le bombardement de Guernica par les nationalistes espagnols en 1937. Lorsque éclata la Seconde Guerre mondiale, François Mauriac avait définitivement choisi son camp : il appartint sous l’Occupation à la résistance intellectuelle, condamnant l’« excès de prosternations humiliées qui [tenaient] lieu de politique aux hommes de Vichy » ; il participa au premier numéro des Lettres françaises clandestines, en 1942, et publia, en 1943, toujours clandestinement, sous le pseudonyme de Forez, Le Cahier noir. À soixante ans, le Mauriac d’après-guerre se fit surtout écrivain politique. De 1952 à sa mort, chroniqueur au Figaro, auquel il collaborait depuis 1934, puis à L’Express, il devait livrer chaque semaine, dans son « Bloc-notes », d’une plume souvent polémique, sa critique des hommes et des événements. En 1952, il condamna la répression de l’insurrection marocaine et apporta à la cause de la décolonisation toute l’autorité du prix Nobel de Littérature, qu’il venait de recevoir, en acceptant de prendre la présidence du comité France-Maghreb. » (?) François Mauriac fut élu à l’Académie française le 1er juin 1933, par 28 voix au premier tour, à la succession d’Eugène Brieux. Cette « élection de maréchal » survenait alors que le romancier, gravement malade, venait d’être opéré d’un cancer des cordes vocales. Sa réception sous la Coupole, le 16 novembre 1933 compte parmi les moments marquants de l’histoire de l’Académie. François Mauriac eut à subir les subtiles perfidies dont André Chaumeix émailla son discours de réception. Cet auvergnat, conservateur et hédoniste, goûtait peu en effet la noirceur de l’?uvre mauriacienne : «Vous êtes le grand maître de l’amertume… À vous lire, monsieur, j’ai cru que vous alliez troubler l’harmonieuse image que je garde de votre région… J’ai failli prendre la Gironde pour un fleuve de feu, et la Guyenne pour un n?ud de vipères…» Que reste-t-il de Mauriac aujourd’hui , de Mauriac qu’il ne faut surtout pas considérer comme un écrivain régional ? Ses pièces, dont Asmodée avec le lumineux personnage d’Emmanuèle et le sombre M. Coûture, ne sont plus dans l’air du temps et ses romans, à part Thérèse Desqueyrous, ne sont plus très lus. C’est dommage pour Préséances, sans doute son chef-d’?uvre. Mauriac demeure surtout pour sa présence et ses écrits politiques, comme Maurice Barrès et Anatole France.