CITÉ DES SITES : Sur Internet, il y a trois cocus

Sur Internet, parce qu’à Toulouse, ville rose et généreuse, lettrée, espagnole, et… sa Mairie des Trois Cocus, sa Croix des Trois Cocus, sa Place des Trois Cocus, son quartier des Trois Cocus, et même sa station de métro des Trois Cocus.

Sans aucun doute et sans jeu de mots, Toulouse est une ville dont on ne peut pas se blaser. Ville rose et généreuse, lettrée, espagnole, elle est aussi industrielle ? elle en souffrit en 2001. Ville qui chante, Toulouse est une des plus méridionales de nos grandes villes, plus au sud que Nice. Son généreux accent lui donne une joie de vivre et, à Toulouse, on est rien moins que bégueule. Comme dans quelques grands villes, il y a à Toulouse des mairies de quartier. Si vous téléphonez à l’une d’elles, sise 97, Avenue Ernest Renan, au 05.61.47.59.17, vous entendrez une voix généreuse : « Ici, Mairie des Trois Cocus, j’écoute » . J’ai demandé si on célébrait des mariages. On m’a renvoyé à la place du Capitole. On ne se marie donc pas aux Trois Cocus? Toujours est-il que Toulouse se moque du quand-dira-t-on, alors qu’à Paris la rue du Pélican s’est substituée à la rue du Poil au C-n (à la place du tiret une autre voyelle) et que la rue du Petit-Musc s’appelait autrefois rue de la Pute-y-musse (musse voulait dire travailler). À Toulouse on s’enorgueillit des Trois Cocus et ce site nous livre les lettres de noblesse de ces Trois Cocus : « – Au XIIe siècle Le seigneur du lieu, Alphonse Jourdain, accorda des privilèges aux gens qui acceptèrent de s’installer sur « la grande lande » pour la cultiver. Sur le cadastre du temps, il a noté, à « la punte » (Place des Trois Cocus), une pièce de terre avec des vignes. « – Guerre des Albigeois (1209 – 1229) Pendant cette guerre, en juin 1211, Simon de Montfort, à la tête d’une armée de chevaliers du Nord, s’installa, pendant un mois, sur cette pièce de terre. Elle fut ravagée par les hommes et 14 000 chevaux. Après cette guerre, les prairies ne furent presque plus cultivées. Elles furent abandonnées car il n’y avait pratiquement plus d’habitants dans le quartier. « – Guerre de Cent Ans (1328 – 1453) Au cours de cette guerre, les terrains furent à nouveau dévastés. Plus tard, le quartier manqua de sécurité car il servait d’asile aux malfaiteurs, aux brigands (les meurtriers n’avaient pas le droit de venir s’y réfugier). Une ordonnance de 1558 demanda la démolition des cabarets et des tavernes qui servaient de repaires aux brigands. « – La Révolution (1789 – 1799) Pendant la Révolution, des quartiers furent débaptisés par un arrêté du 5 Floréal An II (25 avril 1794). Le nom de « Nivôse » fut attribué au quartier. Cette attribution fut annulée par un arrêté du 8 Pluviôse An III (15 janvier 1795). Le quartier reprit son nom de Trois Cocus. La Croix des Trois Cocus Avez-vous remarqué cette croix ? (?) Sur le cadastre de 1571 et de 1690, elle est appelée « Croix des Quatre Carrières » car elle était située à l’endroit où se rejoignaient quatre routes et, peut-être, parce que le nom des Trois Coucuts n’existait pas encore. Cette croix n’a pas toujours existé. Dans un acte de vente du 14 Février 1449, on signale, au lieu de la croix, « L’Olme (l’ormeau) des Quatre Carrières ». (?) D’où vient le nom des Trois Cocus ? « – En 1727, un champ était signalé comme situé au quartier « des Trois Ecus » (bail à locaterie du 10 mars 1727). « – En 1740, ce même champ était signalé comme situé au quartier « des Trois Coucuts » (bail à locaterie du 18 février 1740). Le nom du quartier était-il, à cette époque, à sa période de formation ? C’est pourtant le nom des « Trois Coucuts » qu’on retrouve assez anciennement. Place des Trois Cocus, (Tres Cocuts ou Trois Coucuts), on apercevait, au sommet du pignon d’une vieille maison que surmonte une petite croix en pierre du XVe siècle, une pierre carrée, encastrée dans la muraille. Sur cette pierre était gravée la silhouette de trois oiseaux qui semblaient regarder les passants. Ces oiseaux représentaient-ils trois coucous (en occitan Tres Cocuts) et cela aurait-il donné son nom au quartier ? On raconte aussi que la transcription de l’occitan « Tres Cocuts » au français « Trois Cocus » serait due à des soldats de Napoléon qui, séjournant dans le quartier, auraient demandé à ses habitants, le nom de ce quartier. Ceux-ci leur auraient répondu « Tres Cocuts » (en occitan) et les soldats de Napoléon, ne parlant pas l’occitan, comprirent « Trois Cocus » et ils auraient noté sur le cadastre. » Sous la Révolution, on a encore débaptisé ?si je puis écrire- Les Trois-Cocus qui devinrent Frimaire tandis que St-Martin-du-Touch et Bozel devenaient l’un et l’autre Fructidor, St-Léonard Fruits-Sucrès et St-Médard-en-Jalles Fulminant. Geneaguide.com donne la nomenclature complète, qui est assez réjouissante. Les Trois-Cocus sont un quartier, une mairie mais vont aussi devenir une station de métro ! Sa ligne comportera plusieurs stations réparties sur un parcours de 15 km: Borderouge, Trois Cocus, La Vache, Barrière de Paris, Minimes, Canal du Midi, etc. Et, comme on a un sens aigu de l’art à Toulouse, les tunneliers portent des noms glorieux dont celui de l’inventeur du Tango, enfant du pays, Carlos Gardel : « Il se prénomme Carlos Gardel. Sa mission, creuser la voie de la future ligne B, entre la station de métro des Trois Cocus et celle de Jeanne d’Arc. Le lancement tout récent de ce premier tunnelier a marqué un tournant dans les travaux de la construction du métro toulousain qui amorce maintenant sa phase de gros oeuvre? [?] Ces machines spectaculaires, véritables taupes mécaniques, [?] seront désormais quatre pour percer la ligne B qui reliera la station des Trois Cocus, au nord, à celle de l’Université Paul-Sabatier, au sud de Toulouse. Des tunneliers, baptisés cette fois en hommage à quatre artistes régionaux, à commencer par la figure emblématique du tango argentin, le Toulousain CarIos Gardel. Ce premier tunnelier entamera ainsi le parcours qui lui a été confié, 4,7 km depuis les Trois Cocus, place Micoulaud, jusqu’à Victor Hugo près de la station Jeanne d’Arc, soit le tracé correspondant à sept stations. Au rythme moyen de 17 mètres par jour, et à près de 25 mètres de profondeur, cette foreuse impressionnante devrait extraire quelque 500000 tonnes de terre des sous-sols d’ici à la fin 2004. L’immense roue de coupe creusera la terre qui, une fois extraite, sera évacuée par des tapis roulants, remontée à la surface, et acheminée par camions jusqu’aux entreprises de construction. Avec ses 7,75 m de diamètre, le tunnelier Carlos Gardel sera de loin le plus imposant. Les trois autres, eux, ne débuteront leur travail de titan qu’entre septembre 2002 et mai 2003, la fin des travaux de forage n’étant prévue que pour l’automne 2004. « Déodat de Séverac » se chargera de la section Université Paul Sabatier-caserne Niel, soit 3,4 km de sous-sol. « Gabriel Fauré » parcourra 3,7 km entre la caserne Niel et Aubuisson. Quant à « Xavier Darasse », le plus petit avec 5,30 m de diamètre, il creusera deux tunnels parallèles sur un petit kilomètre entre Aubuisson et le marché Victor Hugo! Au total, ce sont 15km qui seront ainsi parcourus, soit cinq de plus que l’actuelle ligne A, et vingt nouvelles stations qui viendront enrichir le réseau métropolitain. » (Ici), les piétons et vélos du quartier Croix-Daurade sont chouchoutés, affirme le site 20minutes.fr : « Nous allons relier le quartier aux Trois-Cocus et à Borderouge, pour que les gens puissent s’y rendre par ces modes de transport doux récise Danièle Damin, la maire du quartier. Les trois Cocus figurent aussi dans un poème sauvagement intitulé Kartiénumération : Mon coeur devient dur comme pierre, J’ai déjà le mal d’ici-bas. La Garonne et le Quai Saint-Pierre, Lalande, la Salade et l’Aïga. Doit-on vraiment partir si nu, Qu’à tout on tourne le dos. La Filaire, Bourret, Trois Cocus, Saint-Agne, Gleyses, l’Ormeau. Regardons aller loin d’ici Les eaux du Canal du Midi. (Toulouse-Renaissance.net ) Les Trois-Cocus sont littéralement intégrés à la vie de Toulouse et je suis persuadé qu’ils ne sont guère objet de plaisanterie du type « Un cocu ? Un entier qui partage sa moitié avec un tiers » (Alphonse Allais). Mais je vais peut-être faire un peu de peine à nos amis toulousains en leur révélant que les Trois Cocus existent sous d’autres cieux : à Bruxelles. « Cocus (Rue des) « Nom ancien de la Petite rue du Musée. À l’origine (15e siècle), elle s’appelait Bottelgier straetken (Bouteiller). Le peuple l’appela rue des Trois-Cocus parce qu’elle n’avait que 3 maisons. Ce nom figure sur de nombreux actes du l8e siècle, mais à la fin du siècle le numéral ?trois? est généralement omis. En 1806, les habitants demandèrent un changement de nom ?au nom de la décence?. La ville choisit ?Petite rue du Musée?, mais trente ans plus tard on disait encore ?rue des Cocus?, même dans des journaux. » Les Belges n’ont pas transformé en quartier, en métro, finalement en mythe leur Trois Cocus. L’honneur de Toulouse est donc sauf ! Et il nous faut apprécier qu’Internet, affiche parfois un humour hénaurme à la Flaubert, digne de Queneau voire de Prévert.