La Cour des comptes regrette… l’ONP !

Faute de centralisation de la paie des fonctionnaires au sein de l’ONP, l’Etat peine à prévoir correctement l’évolution de sa masse salariale, selon les Sages de la rue Cambon. Handicapant au moment où l’Etat doit faire des économies en la matière.

Après avoir sévèrement critiqué la conduite du projet ONP (Opérateur national de paie) dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes en vient à regretter l’abandon du pharaonique projet de rationalisation de la paie des 2,7 millions d’agents publics. Dans un nouveau rapport paru cette semaine, les Sages de la rue Cambon notent que la disparition du SI-Paye, le système d’information hébergé par l’ONP qui devait mutualiser la production de la paie de l’administration, réduit les capacités de pilotage de la masse salariale de l’Etat. Une lacune dommageable à l’heure où ce dernier prévoit de limiter l’inflation de ces dépenses à 250 millions par an en moyenne (sur la période 2015-2017), contre 700 millions de progression en 2014. Soit 450 millions d’économies à trouver.

Bref, un sérieux tour de vis s’impose. Mais, pour ce faire, encore faut-il maîtriser les dimensions statistiques du problème, ce en quoi l’ONP aurait été bien utile, observe la Cour des comptes. Car, aujourd’hui, les prévisions de masse salariale sont agrégées par les ministères qui sont « incités à utiliser un outil informatique commun, construit par la direction du budget pour essayer d’homogénéiser, partager et contre-expertiser ces prévisions », écrivent les Sages. Sauf que les informations issues des SIRH ministériels sont « de qualité inégale », note la Cour. Et aussi que la Défense fait bande à part, refusant d’utiliser l’outil du Budget pour ce qui ressemble à de faux prétextes selon la Cour.

L’outil ‘juge de paix’ qui manque

S’il avait existé – rappelons que le projet ONP a été torpillé mars 2014 suite à un rapport du DSI de l’Etat, Jacques Marzin, missionné pour réaliser un audit du projet -, l’ONP aurait donné naissance à une « base de données homogènes sur les rémunérations permettant de fiabiliser et de partager, entre le ministère du Budget et les autres ministères, les prévisions de masse salariale ».

En l’état, et faute d’un outil ‘juge de paix’, les ministères gardent donc « largement la main » sur les prévisions de dépenses en salaires. Ce qui génère des écarts entre prévision et exécution, selon la Cour des comptes, les ministères ayant « le souci d’afficher une prévision de masse salariale cohérente avec les normes d’évolution des dépenses de l’État » sans toutefois être en mesure de la respecter. Notons tout de même que la situation s’améliore quelque peu, l’écart entre prévision et réalisation étant tombé à 207 millions d’euros en 2014, le niveau le plus bas depuis au moins 2009.

La Défense pointé du doigt

Dans cette classe de mauvais élèves en statistiques, la Cour des comptes pointe même un cancre notoire, le ministère de la Défense. Les écarts entre exécution et loi de finances initiales sont « en moyenne, entièrement imputables » à ce dernier, écrit la Cour. En cause, des défauts dans l’organisation, la difficulté de cette administration à prévoir l’évolution de sa masse salariale, la sous-estimation du coût des opérations extérieures, mais aussi les errements du logiciel de paie Louvois. Afin de pallier aux erreurs de ce dernier, la Défense a mis sur pied un coûteux plan d’accompagnement de ses personnels, nombreux à recevoir des feuilles de paie erronées, a entamé une réorganisation de ses RH et lancé le remplacement de son progiciel de paie. Des mesures qui « n’auront pas d’impact à brève échéance », écrit la rue Cambon, le remplaçant de Louvois ne devant pas voir le jour avant 2017. Or, les économies sur la masse salariale sont, elles, attendues dès l’année prochaine.

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