DADVSI revue et corrigée: les réactions

Le durcissement de la loi sur les droits d’auteurs ne semble pas poser de problèmes au gouvernement. Les associations de consommateurs sont moins nuancées…

Personne ne s’y attendait. Le Conseil constitutionnel a validé l’essentiel de la loi DADVSI tout en censurant les quelques mesures qui allaient dans le sens du consommateur. Ainsi, le régime de sanctions graduées est supprimé (car inéquitable) et le droit à la copie privée et à l’interopérabilité encore plus réduit.

Du côté du gouvernement, ce durcissement ne fait pas de vagues. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture, a « constaté » jeudi « avec satisfaction que l’essentiel des dispositions » de la loi sur les droits d’auteur avait été validé par le Conseil constitutionnel.

Le ministre a également noté que le Conseil constitutionnel a « entièrement validé la procédure parlementaire choisie pour l’examen du texte ». Il a aussi constaté que « l’ensemble de l’équilibre du texte est validé ».

« La loi sur le droit d’auteur garantira le respect du droit d’auteur et la copie privée », a souligné sans rire le ministre, ajoutant qu’elle affirme « un principe nouveau, l’interopérabilité, principe validé dans ses articles 13 et 14 par le Conseil constitutionnel ».

Le ministre a estimé que la loi « concilie l’avenir de la création musicale et cinématographique française et celui du logiciel libre ainsi que l’accès des internautes à la culture ».

Cependant, le ministre « prend acte de la disjonction de l’article 24 du projet de loi ». Il avait souhaité que les internautes échappent aux peines de prison et « regrette que la saisine des députés de l’opposition ait eu pour conséquence de rétablir les peines de prison pour les internautes ».

Satisfaction des Majors

M. Donnedieu de Vabres réaffirme la nécessité « que les sanctions soient justes et proportionnées en fonction de la gravité des faits ». Il va saisir le Garde des Sceaux afin que les « poursuites soient orientées vers les cas les plus graves ».

Bref, en terme de sanctions, c’est le retour de la loterie…

Du côté de l’Industrie du disque, on sabre le champagne. Les Majors ont fait pression pendant les débats pour abandonner l’idée de sanctions minimes ou graduées. Le retour à un régime sévère va dans leur sens.

Il y a encore quelques jours, le SNEP, le Syndicat national des éditeurs phonographiques, annonçait qu’il souhaitait le maintien du régime initial de la contrefaçon.

Quant aux consommateurs, c’est la soupe à la grimace. Déjà contestable, la loi devient quasiment inacceptable.

La loi la plus repressive d’Europe

L’ADA, l’Association des audionautes regrette que « les usagers ne seront plus protégés par l’exception de copie privée. Dans sa décision, le Conseil a même tenu à préciser qu’il était normal que les ayants-droit puissent « faire obstacle à toute copie », c’est-à-dire d’interdire toute forme d’échange entre particuliers ».

Pour l’ADA, cette décision fait de la loi DADVSI le texte le plus dur jamais passé dans le monde. Pour Aziz Ridouan, président de l’ADA, « le Ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres est à l’origine d’un texte liberticide où les 12 millions d’internautes français risquent 5 ans de prison et 500 000 euros d’amende chaque fois qu’ils téléchargent un fichier sur Internet. »

« Il ne fait aucun doute que l’adoption de cette loi débouchera sur des poursuites en série contre les internautes, les développeurs de logiciels, les créateurs de blogs, de forums et de sites Internet », poursuit l’association.

Pour l’UFC Que Choisir ?, « c’est de pire en pire ». L’association « s’inquiète des conséquences de la décision du Conseil constitutionnel qui a censuré les dispositions du texte les moins défavorables aux consommateurs, ce qui aboutit à renforcer la logique inadmissible du « tout répressif » du projet de loi ».

Et de poursuivre: « la France va-t-elle se singulariser comme étant l’un des Etats européens les plus répressifs ? Il est temps d’arrêter de s’arc-bouter sur des interdits illusoires et des sanctions stériles ».

L’UFC demande « de renvoyer les dispositions déclarées contraires à la Constitution au Parlement. Puisque la Conseil a fondé sa décision sur le caractère trop flou de nombreuses notions, il importe qu’un débat soit rouvert ».

Enfin, l’initiative EUCD.info dénonce un « durcissement incroyable du texte » et estime qu’il s’agit « d’un nouveau camouflet pour le ministre de la Culture ».

Christophe Espern, de l’initiative EUCD.INFO commente: « A l’évidence la décision du Conseil Constitutionnel satisfera les majors du disque, du film et du logiciel propriétaire. Le public, la communauté du logiciel libre et les artistes sont les grands perdants de cette saisine ».