Devops : les DSI français se voient trop beaux

Les DSI assurent avoir démarré le déploiement de la culture Devops au sein de leurs organisations. Sur le terrain, la transformation n’en est toutefois qu’à ses prémisses. Et les métiers s’impatientent.

Les DSI français se verraient-ils bien plus « agiles » qu’ils ne le sont en réalité ? C’est en tout cas une des conclusions qu’on peut tirer à la lecture d’une étude sur le Devops, menée par NetMediaEurope (l’éditeur de Silicon.fr), en partenariat avec CA Technologies et Devoteam, et de la teneur des débats de la première matinée des Devops Connection, organisée la semaine dernière à Paris-La-Défense. Interrogés sur le niveau d’agilité de leur entreprise – autrement dit sur leur faculté à répondre avec réactivité aux attentes des métiers -, plus de 6 DSI sur 10 estiment être parvenus à un bon niveau. Une faculté qui rime avec ce qui apparaît comme le nouveau mantra en matière d’organisation des projets : le Devops. Comme l’a rappelé Riad Aïssat, de Capgemini Consulting lors de la matinée Devops Connection, cette approche vise à rapprocher études et production informatique (dev et ops en anglais), afin d’assurer une mise en œuvre rapide des applications. « Rien ne sert d’accélérer les cycles de développement en rapprochant les développeurs et les métiers s’il faut attendre le prochain exercice budgétaire annuel pour obtenir des serveurs ! », illustre le consultant.

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Selon le Chaos Report, l’agilité diminue le taux d’échec des grands projets par rapport aux développements avec des cycles en V.

L’importance de cette nouvelle étape, qui prolonge les apports des méthodes agiles (notamment en matière de sécurisation des projets, voir le tableau ci-contre), n’a pas échappé aux DSI. 35 % des dirigeants informatiques d’organisations de plus de 1 000 personnes disent avoir adopté la culture et les pratiques du Devops. Si on y ajoute les entreprises où le déploiement de ces pratiques est à l’étude ou est prévu, on approche les 90 % de grandes entreprises séduites par la vague du Devops.

devops1Sans Cloud, pas de Devops

Ce chiffre brut ne dit toutefois rien de la profondeur de la transformation au sein de ces organisations. Car, très souvent, le déploiement du Devops se limite à un ou quelques projets clefs, pour lesquels des équipes pluridisciplinaires réunissant experts métiers, développeurs et architectes techniques (on parle de feature team) ont été constituées. « Etre dans la culture Devops nécessite de réunir la diversité des points de vue, d’animer des équipes pluridisciplinaires (réunissant métier, développeurs et administrateurs) et de renforcer les liens existants entre les stratégies et les technologies », résume Sébastien Denoual, de Deloitte Digital. Bref, une transformation en profondeur de l’organisation qui se heurte nécessairement à de nombreux obstacles et demande du temps pour être généralisée. D’autant qu’elle nécessite une architecture IT flexible, autorisant des mises en production rapide. Schématiquement, sans Cloud, pas de Devops.

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devops3Riad Aïssat souligne d’ailleurs le décalage entre la perception des DSI et la réalité du terrain. « Sur la base du modèle de maturité agile que nous avons développé, les entreprises françaises se situeraient en moyenne entre 1 et 2 sur une échelle allant de 1 à 5 », estime le consultant. Bref, encore loin d’un niveau satisfaisant. D’ailleurs, un indicateur dévoilé par Sébastien Denoual – et qualifié de Minimum Viable Indicator, un clin d’œil au Minimum Viable Product des démarches agiles – montre bien que la France ne fait pas partie des pays les plus avancés en la matière. L’opinion du consultant se fonde sur le nombre de certifiés SAFe (Scaled Agile Framework, un référentiel en vogue dans le secteur) par milliard de dollars de PIB et montre que la France est, pour l’instant, loin des meilleurs (voir ci-dessus).

Les métiers veulent des délais plus courts

A la Société Générale, une des entreprises présentes lors de la première matinée des Devops Connection, si la transition vers la conduite de projet agile date d’il y a trois ans déjà, le passage au Devops n’a débuté qu’en septembre dernier. Avec, pour objectif, de créer des feature team, des équipes centrées sur une application (ou certaines fonctionnalités) intégrant les équipes de production. Une révolution culturelle franchement pas évidente au sein d’une grande entreprise qui, comme beaucoup d’autres, a fait le choix de massifier sa production informatique au sein d’une entité unique (Global Technology Services ou GTS).

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La durée apparemment incompressible de cette transformation risque fort de mettre les DSI sous pression. Dans l’enquête réalisée par NetMediaEurope, 76 % d’entre eux indiquent subir une pression grandissante sur les délais de livraison des applications. D’ailleurs, le verdict des métiers quant à la réactivité de leur DSI est sans appel : les trois-quarts des décideurs métiers interrogés jugent décevante la vitesse de réalisation des applications, alors qu’ils ne sont ‘que’ 54 % à se plaindre des coûts, pourtant l’habituel point de tension entre informaticiens et donneurs d’ordre.

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